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Chandail de Russ Courtnall

Par
Jonathan Roberge
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Le plus vieux souvenir de hockey, qui flâne entre mes deux oreilles, est de jouer au sport sacré avec mon père dans le corridor de la maison familliale. J’ai trois ans, lui une moustache. Mon Sherwood en bois, une balle orange et je dois le déjouer pour envoyer la balle en direction de la cuisine. Chaque fois que je tirais, il kickait une jambe en l’air comme Dryden et ensuite, il s’écroulait au sol pour me laisser compter.

J’ai commencé à patiner à l’âge de 4 ans. J’ai joué mon premier match sur glace à l’âge de 5 et, à 6 ans, je pleurais la coupe Stanley que les Flames de Lanny McDonald venait de prendre aux Habs. Ce soir là, j’avais eu le droit d’écouter le match au complet et même de boire de l’orangeade. Mais là, ce rouquin brandissait le trophée de Lord à bout de bras avec son look de « Youppi passé dans le blender » et chiait sur mon bonheur. J’étais détruit. Je suis allé me coucher avec une boule dans la gorge. Rendu dans mon lit à deux étages (je dormais en haut parce que j’étais le plus vieux), mon frère m’avait entendu brailler dans mon oreiller et s’était levé pour aller le dire à mes parents. Mon père était venu me consoler en me disant que le hockey « c’était juste un jeu… », donc pas une raison de pleurer.

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Quatre ans plus tard, le 9 juin 1993, le Canadien remportait la coupe Stanley! Ce soir là, couché dans mon lit entre les posters de Ed Belfour pis de Patrick (clin d’œil) Roy, le petit gars de Repentigny que j’étais ne pouvait pas se douter que je venais de voir le précieux trophée dans les bras de mes glorieux pour la dernière fois… J’étais persuadé que le bleu-blanc-rouge était reparti pour une série de Coupes comme dans les histoires d’antan que mon père me racontait. Je me suis endormi avec un sourire dans la face pis le jersey de Courtnall sur le dos (même s’il ne jouait plus pour le CH).

Le lendemain, à l’école, les souliers qui faisaient de la lumière du p’tit Gariépy n’étaient plus le centre d’attraction et les cartes de femmes toutes nues du grand Beaulieu ne rivalisaient pas avec la défaite infligée à Wayne Gretzky!

Le grand Beaulieu s’était mis à rire de moi parce que je portais un chandail de Russ Courtnall qui ne jouait plus pour le club. On s’était battu. Il m’avait kické dans les couilles et la directrice nous avait chicanés et nous avait dit que le hockey « c’était juste un jeu… », donc pas une raison de se battre.

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Comme tous les ti-culs qui aimaient ce sport à mon époque, j’ai collectionné les cartes de hockey. J’avais des cartables remplis d’Upper D-E-C-K, d’O-Pee-Chee et de cartes McDo en 3D! Je jouais au mini-hockey à m’en faire de la corne sur les genoux pis j’avais le t-shirt de Patrick Roy qui faisait un clin d’œil. Je jouais tout le temps au hockey… Sur les patinoires extérieures, sur la rue Beaudoin près du parc Laforest, et avec mon équipe de hockey aux quatre coins de la province. Je jouais même l’été, dans des écoles de hockey. Le hockey était ma vie.

Au secondaire, l’orienteur m’avait appelé à son bureau après que nous ayons rempli un formulaire sur nos champs d’intêrets. À la case « Métier », j’avais écrit : Gardien de but dans la ligue nationale ou artiste humoristique. Je crois que ça ne plaisait pas au dinosaure qui nous enseignait. Il aurait préféré que je trouve un vrai métier. J’étais debout, devant la classe et il me questionnait devant tout le monde sur mon parcours pour atteindre mes objectifs. Avec du recul, il me ridiculisait carrément et tentait de me décourager. Il m’a dit que joueur de hockey et/ou artiste dans le milieu de l’humour « c’était juste des jeux… » et que je devais penser à me trouver un vrai travail.

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La vie fait bien les choses. Je suis donc devenu photographe sportif pour le compte de la compagnie à mon père, lui-même photographe sportif. J’ai inconsciemment mixé deux de mes passions ; le hockey et l’image. Pendant 10 ans de ma vie, j’ai photographié du hockey toutes catégories confondues, du Novice au Junior AAA à la grandeur du Québec et de l’Ontario. J’ai photographié les vedettes, qui aujourd’hui, foulent les glaces de la LNH alors qu’ils n’étaient alors que des Pee-Wee. Avec le temps, ma carrière dans le milieu humoristique s’est concrétisée et j’ai donc abandonné ce travail.

Aujourd’hui, je ne suis peut-être pas un gardien de ligue nationale. Je suis un goaler dodu, pas flexible du tout, qui a vieilli, mais qui n’a pas perdu son cœur de petit gars. Je joue souvent dans des ligues de garage où je retrouve la bonne vieille odeur de poche de hockey mixée à celle des patates d’aréna. Je joue régulièrement au hockey non seulement pour garder « la forme » , mais parce que le hockey pour moi est synonyme d’amitié et de soupape à nos vies stressantes. Je joue parce que ça me permet de décompresser dans une ambiance de camaraderie. Le sport unit les gens et nous ne pouvons le nier.

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Pour faire plaisir à mon orienteur, je joue au hockey pour décrocher de mon vrai travail, celui d’artiste humoristique.

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