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URBANIA et le Festival Classica s’unissent pour vous donner un bref cours de maître sur l’opérette.
Lors d’un sondage mené à la fin des années 1980 dans une centaine d’universités au Québec, plus de 56 % des sondés ont répondu « Une petite version d’un opéra » à la question « Qu’est-ce que l’opérette? ». À leur grande surprise, cette réponse était complètement fausse – tout comme l’histoire que je viens de vous raconter. Il n’y a même pas 100 universités au Québec, mais seulement une vingtaine.
C’est ce qu’on appelle un excellent « sujet amené » pour vous parler de l’opérette, parce que, aussi importante soit-elle pour la culture québécoise, c’est malheureusement une forme d’art de moins en moins connue (surtout des jeunes de mon âge). Je n’ai pas de statistiques pour vous prouver cette affirmation, mais puisque j’ai déjà brisé le lien de confiance qui nous unissait, alliez-vous réellement me croire?
Trêve de plaisanteries (quoiqu’il y en ait profusion dans l’opérette), retournons à la base.
C’est quoi la différence entre opéra et opérette?
Malgré le fait que, dans les opéras comme dans les opérettes, on puisse voir des gens costumés qui chantent avec des trémolos, ce sont deux formes d’art bien distinctes.
Mais comment les distinguer?
Excellente question, Clément. Eh bien, pour tout vous dire, je suis loin d’être un expert en la matière. Je ne suis qu’un simple créateur d’histoires toujours en quête du meilleur jeu de mots.
Sauf que si l’on se fie à ce qu’Internet m’a appris, l’opéra se concentre en grande partie sur la performance musicale des interprètes. Les histoires sont beaucoup plus complexes et dramatiques. Les chanteur.euse.s ont des voix plus puissantes. Si la pièce que vous allez voir s’éloigne de l’humour et ressemble dangereusement à du Pavarotti (qu’il repose en paix) qui chante sa peine d’amour en allemand vêtu d’un tuxedo, vous êtes probablement devant de l’opéra.
Cependant, si vous assistez à une pièce plus satirique, comportant plus de danse, de jokes, de critique de la société, vous avez peut-être affaire à de l’opérette. Oui, parfois dans le chant, on se rapproche quand même de l’art dont il est question quelques lignes plus haut, mais ça reste deux pratiques artistiques qui diffèrent.
La petite histoire
Pour mieux comprendre le comment du pourquoi, c’est toujours bon de plonger un peu dans l’histoire de la chose. Un petit retour aux sources, comme on dit.
L’opérette a effectué ses balbutiements de nouveau-né au courant du XIXe siècle, particulièrement en France. Certains pourraient dire que deux de ses plus grands créateurs furent Florimont Rongé, dit Hervé, et Jacques Offenbach. Je vous arrête tout de suite : il n’est pas question du groupe rock québécois derrière Promenade sur Mars (quoiqu’un reboot en opérette de la discographie du groupe ne serait pas une mauvaise idée en soi… à méditer).
De retour en Europe : à la suite de la fusion, au fil du temps, de deux traditions musicales, l’opéra musical et la comédie musicale, l’opérette gagne en popularité, car elle permet aux auteurs du style de critiquer certains dogmes de la société par l’humour. Cette forme d’art, grâce à ses danses, ses blagues et ses chants, devient donc un outil pour exercer la liberté d’expression. Parle-moi d’une révolution.
C’est vers la fin du XIXe siècle qu’elle s’exporte au Québec, mais il faudra attendre le début du siècle suivant pour qu’elle charme le cœur des Canadiens français. On n’est pas faciles à convaincre.
Made in Québec
C’est en fouillant dans les vieux manuscrits poussiéreux rangés sous clé de la BAnQ que l’on peut retrouver les premiers écrits portant sur l’opérette au Québec. (Une technique plus simple de ma part aurait pu consister à googler « l’histoire de l’opérette au Québec », mais, que voulez-vous, je suis un homme en quête de vérité pour mon lectorat.)
J’ai donc découvert (ou plutôt appris, encore sur Internet) que cet art lyrique a connu un boom de popularité au Québec autour des années 1920, entre autres grâce à la compagnie théâtrale Les Variétés lyriques. Fondée en 1918 par le compositeur et chef d’orchestre Joseph-Arthur Bernier, cette compagnie a cartonné à Montréal à l’époque en reprenant des œuvres européennes et en présentant des spectacles bien d’ici, comme Le Roi d’Yvetot, de Victor Viviès.
Avec l’arrivée de nouveaux courants musicaux (comme le rock) au courant du siècle, l ’opérette a malheureusement perdu de ses adeptes. Mais détrompez-vous, elle n’est pas morte, car il existe encore aujourd’hui des troupes qui gardent des pièces anthologiques bien vivantes. Pensons notamment au NOM (Nouvel Opéra Métropolitain), qui a vu le jour dans le cadre du Festival Classica et qui a pour mission de remettre l’opérette d’ici sous les projecteurs.
Le dernier acte
Bref, si jamais une firme de recherche passe réellement dans votre coin pour faire un sondage culturel sur ce qu’est l’opérette, j’ose croire que vous pourrez aider les statistiques en faveur de la satire chantée.
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Pour en savoir plus sur le Nouvel Opéra Métropolitain en assistant à une opérette et à deux opéras présentés le 31 mai et les 6 et 14 juin, c’est juste ici.