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Ces professions aux souffrances silencieuses

Aider les professionnel.le.s de la sécurité publique à soigner leur santé mentale.

Par
Laura Laval
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URBANIA et l’Institut canadien de recherche et de traitement en sécurité publique (ICRTSP) ont collaboré à la rédaction de cet article pour aider le personnel de la sécurité publique (PSP), ses dirigeant.e.s et leurs familles à trouver les ressources nécessaires pour prendre soin de leur santé mentale.

On a souvent tendance à élever les individus pratiquant certaines professions au rang de superhéros et de superhéroïnes : travailleur.euse.s de la santé, paramédicaux.cales, pompier.ière.s, etc. L’intention est bonne, mais attribuer des qualités surnaturelles à des personnes peut finir par amoindrir, voire effacer des réalités parfois très difficiles (et complètement humaines) auxquelles elles font face.

C’est le cas notamment pour les premier.ière.s répondant.e.s et autres membres du personnel de la sécurité publique, qui jouent un rôle crucial dans nos communautés. Effectuant un travail qui peut s’avérer extrêmement stressant, ardu et potentiellement traumatisant sur le plan psychologique, le personnel de la sécurité publique est constitué de professionnel.le.s qui courent un grand risque de souffrir de troubles de santé mentale, en particulier depuis la pandémie, qui a constitué une pression supplémentaire.

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Pour ceux et celles qui ont des proches travaillant en sécurité publique ou que l’enjeu intéresse, on a préparé un petit guide qui permet de reconnaître les signes de trouble de santé mentale chez ces travailleur.euse.s et de les aider à trouver les ressources nécessaires pour en prévenir les conséquences négatives sur leur bien-être et celui de leurs familles.

Des métiers variés

Lorsqu’on parle de sécurité publique, on pense d’abord aux métiers les plus connus : pompier.ière.s, paramédicaux.cales et policier.ière.s. Le domaine est toutefois beaucoup plus vaste. Les agent.e.s des services frontaliers et des services correctionnels ainsi que le personnel des services de recherche et sauvetage, par exemple, font aussi partie de la sécurité publique.

Et c’est sans compter ceux et celles qui travaillent dans l’ombre, comme les communicateur.trice.s de la sécurité publique (par exemple, les répartiteur.trice.s des services d’urgence, les opérateurs au 911) et l’ensemble du personnel, souvent invisible, qui soutient les activités de tous ces services. En fait, le personnel canadien de la sécurité publique compte plus de 350 000 personnes actuellement en service, sans parler des nombreux membres qui ont quitté les services.

Toutes ces personnes sont exposées à de nombreux facteurs de risque pouvant affecter négativement leur santé mentale. Ils et elles sont témoins de milliers d’événements potentiellement traumatisants sur le plan psychologique, peuvent se blesser physiquement et mentalement pendant l’exercice de leurs fonctions, vivre un stress énorme en devant prendre des décisions cruciales rapidement, ou simplement à force de porter la lourde charge émotionnelle liée à ce type de travail.

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Tout ça, c’est ce que ces gens vivent en temps « ordinaire ». Si on y ajoute une pandémie mondiale, le cocktail commence à devenir dangereux. D’ailleurs, la majorité des membres du personnel de la sécurité publique ayant fait appel aux programmes de traitement du PSPNET, le centre de recherche clinique de l’ICRTSP, a rapporté que la COVID-19 avait eu un impact négatif sur leur vie émotionnelle et dans leur quotidien. Pour ces personnes comme bien d’autres ayant eu à le vivre, le fait d’avoir été obligé de continuer à travailler durant la pandémie malgré les risques encourus pour soi-même ou ses proches fut – et demeure – extrêmement stressant.

Des risques qui pèsent lourd

Ces nombreux facteurs de risque peuvent ainsi créer des situations extrêmement difficiles à vivre pour le personnel de la sécurité publique.

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La fatigue de compassion est une des principales conséquences de ce stress vécues par le personnel de la sécurité publique. Elle peut se manifester après qu’on a pris soin d’une ou de plusieurs personnes et qu’on a ressenti de la compassion pour leur douleur. Recevoir constamment des nouvelles inquiétantes sur la pandémie, être témoin des effets directs de la COVID-19 sur les gens, devoir faire face à des défis logistiques et prendre soin de communautés vulnérables, ça épuise. Selon le site Web de l’ICRTSP, « ceci peut avoir un impact psychologique, y compris un sentiment d’impuissance ou de confusion, ainsi que des effets physiques qui pourraient les empêcher de fonctionner ».

Une autre conséquence importante est le risque de vivre une blessure morale. Toujours selon l’ICRTSP, « un trouble qui peut se produire lorsqu’une personne agit en enfreignant ses croyances profondes ou devant le devoir de faire un choix difficile moralement (comme de déterminer qui reçoit ou ne reçoit pas une intervention médicale nécessaire). Pour le PSP, cela se produit le plus souvent lorsque la personne est incapable d’agir dans l’intérêt fondamental d’une personne qu’elle tente de protéger ou d’aider, ou encore lorsque des contraintes organisationnelles nuisent à sa capacité d’offrir les meilleurs soins possibles ». Dans un contexte de pandémie, on peut affirmer que c’est le genre de chose qui se produit bien trop souvent.

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En plus de tout cela, le personnel de la sécurité publique est susceptible de subir un épuisement professionnel, c’est-à-dire d’être accablé par des conditions de travail extraordinaires qui durent trop longtemps.

Le risque de vivre un épuisement professionnel est encore plus grand quand les signes avant-coureurs passent inaperçus.

À cause de la nature unique, particulière et difficile des métiers de la sécurité publique, il peut être difficile pour ceux et celles qui les exercent de se confier à des proches, parce que leur réalité peut-être pénible à imaginer, à accepter et à comprendre. On comprend mieux alors l’importance de savoir reconnaître les signes indiquant une détérioration de leur santé mentale.

Repérer les signes

Il existe de nombreux signes qu’une personne travaillant dans la sécurité publique souffre d’une blessure de santé mentale. En voici quelques-uns : épuisement physique ou émotionnel, engourdissement émotionnel, absence d’émotion, sentiment d’être submergé, sentiment d’impuissance (particulièrement concernant les causes de stress et de souffrance), changements des habitudes de sommeil (comme trop dormir ou avoir de la difficulté à dormir), symptômes physiques (maux de tête, nausée, maux d’estomac, etc.), usage de substances psychoactives (prescrites ou non), colère, irritabilité ou anxiété accrues, évitement, retrait ou isolement, diminution de la performance au travail et à la maison, difficulté à prendre des décisions, relations tendues avec les coéquipier.ière.s, les collègues, les ami.e.s ou la famille, baisse de l’empathie envers autrui, cynisme, baisse de satisfaction de la carrière, hypersensibilité.

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Encourager le dialogue

Si on remarque ces signes chez des proches qui travaillent dans le secteur de la sécurité publique, il est important de les encourager à s’exprimer et à demander une aide concrète. On peut aborder le sujet en leur disant : « Je vois que tu vis une période difficile, as-tu envie d’en parler? » C’est important de leur faire comprendre que leurs émotions sont tout à fait légitimes, que c’est normal de vivre ce genre de situations et qu’ils ou elles ne seront pas jugé.e.s.

Expliquez-leur comment vous aimeriez leur venir en aide – par exemple en leur offrant votre écoute, en les aidant à chercher des ressources, en restant à leurs côtés durant leurs démarches pour chercher de l’aide. Rappelez-leur qu’ils ou elles ne sont pas seul.e.s, sont aimé.e.s et peuvent compter sur votre soutien et celui de leur entourage.

Trouver des ressources

Parmi les ressources existantes, il y a l’offre variée de soutien psychologique de l’ICRTSP. Son site Web regorge d’informations pertinentes tant pour les professionnel.le.s que leurs familles.

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De plus, PSPNET a créé un programme gratuit, confidentiel et autonome d’accès à la thérapie cognitivo-comportementale sur Internet (TCCI).

En somme, il est important de se rappeler que les professionnel.le.s de la sécurité publique et leurs familles ne sont pas seul.e.s à relever les défis inhérents à leur métier et que des ressources gratuites, confidentielles et fondées sur des données probantes leur sont offertes. En fait, tout un système existe pour s’assurer de soutenir ceux et celles qui tiennent un rôle à la fois crucial et critique dans nos communautés. La plus belle et la plus importante étape pour commencer le processus de guérison, c’est d’en parler.

Pour en savoir plus sur les ressources confidentielles et gratuites offertes par l’ICRTSP aux membres du PSP et à leurs familles, cliquez ici!