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Ce que Kanye West nous a appris sur le trouble bipolaire

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On le connaît pour ses méga hits comme Touch the Sky, Stronger et Good Life, mais plus récemment, Kanye West a surtout fait les manchettes pour ses nombreuses frasques abracadabrantes.

Depuis sa sortie médiatique sur son trouble bipolaire, Yeezy est passé par plusieurs phases, qualifiant sa condition de «superpouvoir» par moment et refusant de prendre ses médicaments.

Que ce soit sa rencontre avec Donald Trump à la Maison-Blanche en 2018 affublé d’une casquette Make America Great Again ou ses longues diatribes à l’endroit de personnalités comme Jay-Z, Beyoncé et Hillary Clinton pendant sa tournée en 2016, le rappeur de Chicago a fourni de l’eau au moulin à ses détracteurs et mêlé ses fans à plusieurs reprises au cours des dernières années.

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C’est en 2018 que le public a commencé à avoir des réponses. Après une absence artistique de deux ans, Kanye sort son huitième album, Ye. Sur la pochette, on peut lire I hate being bipolar, it’s awesome (Je déteste être bipolaire, c’est génial).

Depuis sa sortie médiatique sur son trouble bipolaire, Yeezy est passé par plusieurs phases, qualifiant sa condition de « superpouvoir » par moment et refusant de prendre ses médicaments.

Dernièrement, lors d’un rassemblement pour sa campagne présidentielle, il s’est effondré en larmes en tenant un discours confus autour de l’avortement et a écrit des tweets pratiquement cryptiques frôlant la paranoïa les jours suivants.

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Cette semaine, c’est sa femme Kim Kardashian West qui s’est portée à sa défense appelant à la «compassion et l’empathie» des gens dans cette crise que traverse son mari.

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Pour essayer de comprendre ce qu’est le trouble bipolaire, j’ai fait appel à Jean-Rémy Provost, directeur général de l’organisme Revivre, qui vient en aide aux personnes touchées par les troubles anxieux, la dépression et le trouble bipolaire.

Une maladie en montagnes russes

«On a tendance à catégoriser les gens selon leur diagnostic. Par exemple, on dit souvent: un tel est dépressif, une telle est anxieuse, un autre est bipolaire. Mais il faut comprendre que la personne n’est pas sa maladie. Elle vit seulement avec», résume Jean-Rémy.

«Il faut comprendre que la personne n’est pas sa maladie. Elle vit seulement avec.»

Discerner cette différence est le point de départ pour comprendre ce que ça implique selon lui. «Quand on dit que Kanye West est bipolaire, on ne l’ostracise pas seulement lui. On ostracise tous ceux qui vivent avec le trouble bipolaire», précise-t-il avant de nous donner une définition sommaire de ce trouble. «C’est une maladie de l’humeur qui se manifeste tant par des phases de dépression que d’exaltation ou de manie. Il peut y avoir des signes avant-coureurs ou non et elles peuvent être entrecoupées de périodes de stabilité», explique-t-il.

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Les symptômes sont nombreux et variés. Dans la phase dépressive, la personne avec le trouble peut ressentir une énorme tristesse, une perte d’énergie, une grande fatigue et une perte de joie de vivre en général qui peut mener à des idées suicidaires.

Lors de la phase «maniaque», c’est tout le contraire. La personne peut éprouver une estime de soi augmentée, des idées de grandeur, une énergie débordante, un débit de la parole élevé et une réduction des heures de sommeil. «L’image de la montagne russe est pas mal adéquate pour décrire comment ça se passe» note Jean-Rémy.

Mais si on regarde le comportement de Kanye, est-ce qu’on peut vraiment mettre ça sur le dos de son trouble bipolaire? Selon le DG de Revivre, c’est plus compliqué que ça.

«Dans son cas, on sait qu’il a eu le diagnostic de trouble bipolaire donc on peut penser que ses agissements ont un lien avec ça. Par contre, il faut faire attention avant d’émettre des hypothèses du genre. Une personne sans le trouble peut vivre des émotions intenses qui s’apparentent aux symptômes sans être “malade” pour autant. Tout comme une personne avec le trouble bipolaire peut avoir des émotions “normales”. Mélanger les choses comme ça ne fait que stigmatiser la maladie».

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Le diagnostic de trouble bipolaire est complexe et demande une observation scrupuleuse d’un médecin qui va «examiner l’histoire familiale du patient et son parcours» avant d’en venir à des conclusions.

Utiliser son influence pour briser les tabous

«Pour les personnes non diagnostiquées qui vivent avec les hauts et les bas de la maladie, s’ils se reconnaissent dans le discours d’une personnalité publique, ça peut les aider à aller chercher de l’aide.»

Parler publiquement de son trouble bipolaire est une bonne manière de briser les tabous sur la maladie selon Jean-Rémy. À condition que l’on s’y prenne de la bonne manière. «Pour les personnes non diagnostiquées qui vivent avec les hauts et les bas de la maladie, s’ils se reconnaissent dans le discours d’une personnalité publique, ça peut les aider à aller chercher de l’aide. Toutefois, il faut que la personne parle de sa propre expérience et évite d’aller dans les généralisations. Sinon, ça peut mener à l’inverse du résultat escompté et attiser les préjugés encore une fois».

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Le directeur-général croit que les meilleures armes pour comprendre le trouble bipolaire sont l’écoute et l’empathie. «L’idée est d’indiquer à la personne qu’on veut l’aider sans se transformer en intervenant. Des fois, ça peut impliquer de faire le pont entre la personne et un organisme comme le nôtre, par exemple».

Jean-Rémy aimerait que les tabous concernant cette maladie mentale tombent. «Je vis avec quelqu’un qui a un trouble bipolaire depuis 25 ans. On a un enfant ensemble et tout va très bien. Ce que j’aimerais que les gens retiennent, c’est que l’on peut bien vivre au quotidien malgré cette maladie».

À garder en tête avant de juger Kanye.