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CatVideoFest : j’ai visionné 75 minutes de vidéos de chats au cinéma pour que vous n’ayez pas à le faire
Travailler chez URBANIA, ça peut avoir l’air bien beau de l’extérieur : on parle de sujets l’fun, on a de magnifiques bureaux et on organise les partys les plus mémorables. Mais derrière ces apparences séduisantes se cache un grave problème.
Chez URBANIA, l’espèce canine règne. Notre logo est un chien, il y a au moins un pitou au bureau chaque jour et on fait constamment des projets qui mettent des chiens en vedette. Je connais le nom d’absolument tous les chiens de mes collègues, mais les chats, eux, demeurent injustement anonymes.
En tant que #CrazyCatLady, je n’ai rien contre les chiens… du moment que les chats ont aussi leur place. Après tout, tout le monde sait que les chats sont les véritables rois de l’Univers. Il suffit de se fier à leur attitude aristocratique pour le comprendre.
Je me suis donc donné comme mission personnelle de redonner à l’espèce féline la place qui lui est due chez URBANIA. Si cet article est supprimé dans les prochains jours, vous saurez que j’ai été censurée par le règne canin et que j’ai perdu ma bataille (vous remarquez que j’ai donné un titre ambigu à cet article pour tenter de passer sous le radar).
Parc à chats virtuel
Ma première action pour redonner aux chats leurs lettres de noblesse fut donc d’assister au CatVideoFest, un festival qui présente chaque année une sélection des meilleures vidéos de chats dans près de 200 villes en Amérique du Nord, dont Montréal. Après une édition qui avait affiché complet dans la métropole en 2019, puis deux années d’annulation covidienne, l’événement s’arrêtait lundi soir dernier (à la mi-août… miaou… la comprenez-vous?) au Cinéma du Parc pour une projection de 75 minutes de vidéos félines.
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Mais avant de m’y rendre, j’ai passé un coup de fil à Will Braden, le directeur de CatVideoFest.
Celui-ci m’a d’abord expliqué que l’objectif du festival est d’amasser des fonds pour des refuges et des organisations de protection des animaux dans les villes où il s’arrête. En 2019, plus de 50 000 $ ont été amassés, en plus des adoptions, des placements en famille d’accueil et des actions de sensibilisation menées lors des projections.
À Montréal cette année, les sous récoltés seront remis au Réseau Secours Animal (RSA), un refuge pour chats sans euthanasie entièrement géré par des bénévoles.
Chaque année, Will Braden visionne plus de 10 000 vidéos de chats – celles soumises par des fans du festival sur son site web et d’autres qu’il trouve sur Internet – afin de dénicher la crème de la crème des Nyan Cat de ce monde. Il crée ensuite une compilation, qui ne se résume pas qu’à des vidéos comiques.
« Je veux montrer aux gens une variété de types de vidéos de chats, explique en anglais le réalisateur de Seattle. Il y a toujours au moins une vidéo animée, des mini-documentaires, des courts-métrages étudiants, des vidéos musicaux… et bien sûr, toutes sortes de vidéos drôles de chats qui prennent une débarque! »
« Tout le monde pense que son chat est super spécial, mais ce n’est pas toutes les vidéos que je reçois qui sont… incroyables, avoue-t-il en riant. Pour qu’une vidéo soit retenue, il faut qu’il y ait quelque chose d’intéressant, d’informatif, de drôle ou de touchant. Je veux que les gens quittent l’événement en se disant : “Il y a une raison pour laquelle j’ai payé pour voir ça au cinéma au lieu de sur mon cellulaire.” »
Will Braden a commencé à s’impliquer dans le festival en 2012, après qu’une vidéo de sa série Henri le chat noir – qui présente les méditations existentielles d’un chat – eut remporté le prix du public lors de la première édition de l’Internet Cat Video Festival, l’ancêtre de l’événement actuel.
Pour lui, la popularité des chats sur la Toile s’explique en partie par notre désir de partager les excentricités de nos animaux. « Il y a beaucoup de vidéos de chiens sur Internet. Mais les chiens, on peut les traîner partout. Avec les chats, on doit se partager les choses virtuellement, parce qu’il n’existe pas vraiment de parcs à chats, ou de journée “Amenez votre chat au travail”. L’internet est donc devenu un grand parc à chats virtuel. Les gens partagent des vidéos de leurs chats pour avoir un sentiment de communauté, du genre “Oh, je pensais que mon chat était le seul à faire ça, mais le tien fait ça aussi!” »
« Il y a aussi le fait que les chats sont très impérieux, ils pensent qu’ils dominent le monde. Alors on prend plaisir à les voir se planter un peu – tant qu’ils ne se font pas mal », rigole-t-il.
Des félins pour oublier la fin du monde
Même si Will m’a bien vendu l’événement, je me présente au Cinéma du Parc en étant un peu inquiète qu’il n’y ait pas un chat (!). Mais à mon arrivée près de la salle de projection, Mireille et Pénélope, deux bénévoles du Réseau Secours Animal installées à un kiosque, m’annoncent que l’événement fait salle comble. Une séance supplémentaire a même été ajoutée samedi prochain!
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Mireille, qui est responsable de l’équipe des adoptions, m’explique que depuis quelques semaines, le refuge est à pleine capacité avec 150 chats et peine donc à prendre en charge de nouveaux résidents.
« Il y a beaucoup, beaucoup de gens qui ont adopté des chats en 2020 à cause de la pandémie. Il n’y en a pas tant qui sont venus nous les reporter, heureusement, mais ça fait quand même moins de familles qui sont ouvertes à prendre des chats maintenant », indique-t-elle.
Les deux bénévoles espèrent donc trouver de nouveaux parents d’adoption parmi les spectatrices et spectateurs attendus. Ça ne devrait pas être trop difficile, puisque le cinéma se remplit rapidement de passionné.e.s de minous.
Un homme prend une photo de sa copine devant l’affiche du festival. « Il fallait qu’on vienne parce que j’ai plusieurs chats à la maison… », me raconte la dame. « Elle en a douze! », l’interrompt son conjoint. « Arrête de dire ça, j’ai l’air folle! », rétorque celle qui désire conserver son anonymat pour éviter tout cat shaming, et qui tient à préciser que huit de ses chats sont dans une grande maison à Laval, et les quatre autres en condo à Montréal.
Mireille, la bénévole, rassure la dame en lui mentionnant qu’elle a elle-même six minous dans son 4 1/2 montréalais. Je me sens soudainement moins digne de mon titre de #CrazyCatLady, avec seulement deux chats qui m’attendent sur mon sofa plein de poils.
Avant d’entrer dans la salle, la femme aux douze chats me confie qu’elle s’est également déplacée pour tenter de se changer les idées, puisque son père est décédé récemment. Sarah, une autre jeune femme, me rappelle elle aussi les effets bénéfiques des vidéos de chats pour le moral : « Avec toutes les choses terribles qui se passent en ce moment, des fois, on a juste le goût de mettre notre cerveau à off et de rire devant des vidéos de chats en oubliant que le monde brûle. » Pas faux.
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TikTok sur grand écran
Je m’installe finalement au fond de la salle, slush à la main, alors que la projection débute. Aussitôt, les rires et les « awww » de cutitude fusent. On a le droit aux classiques : des chats qui attaquent des objets inanimés, qui se battent avec des chiens, qui font de drôles de miaulements, qui menacent le sapin de Noël ou qui semblent chanter sur la musique jouée par leurs propriétaires.
Mais il y a aussi quelques vidéos qui sortent de l’ordinaire, comme celle qui documente un refuge pour chats improvisé dans un abri antibombe en Ukraine, dans la ville de Shostka, ou encore celle montrant un chat qui a pu recommencer à marcher grâce à des prothèses imprimées en 3D.
J’ai quand même un peu l’impression de regarder mon fil TikTok sur grand écran, mais au moins, il y a un peu plus d’ambiance et c’est pour une bonne cause.
À la fin de la séance, plusieurs dizaines de personnes s’agglutinent autour du kiosque du Réseau Secours Animal. J’entends les gens parler de leurs chats et se montrer des photos sur leurs cellulaires.
Je repense alors à Will Braden, qui me disait plus tôt au téléphone : « J’organise cet événement pour que les gens se retrouvent avec d’autres gens de leur communauté, qu’ils sentent qu’ils aident ensemble un refuge local et qu’ils partagent une expérience commune plaisante. Je veux rappeler aux gens qu’on peut apprécier les choses… joyeusement, sans aucun niveau d’ironie hipster, juste parce que c’est plaisant. »
On peut dire que c’est mission accomplie.