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Tout a commencé par ce courriel de ma chef au contenu web :
— Charles, ce mois-ci on a comme thématique “voyage”, penses-tu que ça pourrait être quelque chose qui te stimulerait?
— Ben fallait que j’aille à Louiseville voir un chat que j’ai donné… Ça va-tu être assez dépaysant?
— ‘Barnak… En tout cas, c’est mieux d’être sur mon bureau vendredi matin, parce que je commence à en avoir plein le c… (Je vous épargne le reste de la conversation, mais laissez-moi vous dire qu’elle avait l’air pas mal emballée.)
Anyway, étant un gars de la ville particulièrement sujet à l’anxiété sociale, je peux vous affirmer que tout ce qui se trouve à 1h30 de route de Montréal m’est complètement extraterrestre et terrifiant, autant dire que j’étais à la recherche d’un raccourci vers les Indes.
Donc, histoire m’épauler psychologiquement dans ce périple, documenter mes découvertes, ainsi que me servir d’interprète auprès des indigènes, j’ai fait appel à mon amie, blogueuse, écoterroriste, végane radicale ainsi que grosse punk début trentaine : Lora Zepam, qui oeuvrera ici également comme photographe de toute cette aventure de merde.
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Donc après être passé lui acheter une lasagne au tofu en échange de ses services, nous sommes partis toutes voiles dehors vers les terres sauvages et indomptables de la Mauricie occidentale.
Ce fut un voyage somme toute particulièrement dull sur ce trou noir de stimulus visuels que l’on appelle “la 40″, seul moyen de ne pas sombrer dans la démence: comptabiliser la quantité phénoménale de siffleux aplatis sur l’accotement. Un grand total de 56 étalés (littéralement hihihih) sur une période de vingt minutes… Tout porte à croire que les siffleux devraient vraiment commencer à se briefer entre eux sur leur processus d’”essai-erreur”. La route vers Louiseville est tapissée par la mort…
Dieu seul savait quelles autres horreurs nous y attendaient.
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Impossible de me souvenir combien de temps nous avons dérivé ainsi. Notre courte escale au dernier Couche-Tard civilisé question de s’acheter des Gatorades et un set de colliers quétaines assortis en faux noisetier avec nos noms gravés en lettres attachées “parce qu’on va clairement être les seuls totons à s’acheter ça depuis l’ouverture”, me semblait déjà appartenir à un autre âge quand soudain, au détour d’une voie ferrée où se fossilisait lentement la dépouille d’un train de marchandises qui n’avait manifestement pas eu notre chance, elle s’est dressé devant nous…
Lettres rouges à bordure dorée, police pseudowestern inquiétante, se balançant sordidement au vent dans la grisaille : l’enseigne “Bienvenue à Louiseville”.
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À perte de vue s’élevaient, comme des rangées de monolithes érigées en mémoire du bon goût une marée des maisons à un étage ornées de vierges dans un demi-bain, mobiles de canards qui font du bruit dans le vent et autres abominations que je n’arrive pas encore tout à fait à m’expliquer aujourd’hui…
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Donnez-nous vos âmes!
Le rôle de notre principal contact sur place ainsi que guide sherpas louisevillois allait, dans le cas échéant être comblé par l’auteur reclus, ermite local et possible théoricien des anciens astronautes : Patrick Brisebois, représenté ici s’achetant des batteries et du fromage en slices.
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Ce dernier, manifestement excité par l’arrivée de voyageurs, s’est empressé de nous accueillir d’une bonne rasade de l’alcool local : le vodka-pickle, une mixture primitive que j’ingérai à contre coeur afin de ne pas déclencher un incident inter-tribal. Je tentai également d’établir un lien de confiance avec notre nouvel ami aborigène en lui offrant quelques poffes de bon vieux pot montréalais qui ont eu pour effet de le rendre cocassement incohérent et désorienté.
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“Dans le fond, la vie est un Tetris de complexes…” — Patrick Brisebois
À mi-chemin dans un délire fiévreux relatif à “la variable ‘C’ est la guillotine de l’inspiration” il s’est néanmoins efforcé de nous dresser une liste des principaux points d’intérêts louisevillois, suite à quoi nous sommes partis tête baissée dans la brousse.
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Notre première escale a été le légendaire Tigre géant de Louiseville, sorte de poste de troc vestige d’une époque antédiluvienne où les fruits et légumes côtoient sans véritable effort de cohérence, cartes de souhaits, jouets gonflables pour la piscine à thématiques déroutantes ainsi qu’un shitload de sandales crocs…
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Tout ici effleure les limites de l’imagination humaine, telles qu’en témoignent ces trouvailles déstabilisantes :
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Une bière gonflable? Mais pourquoi? Qui?
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Une pizz gonflable? Logique, mais pourtant de plus en plus étrange…
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Des crocs.. Toujours des crocs… Le temps semble s’être arrêté ici.
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Ok, le set de Hotwheels Palpatine et Yoda… Cette folie n’arrêtera donc jamais?
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Tout ici semble se vouloir rassurant avec des effets désastreux.
À notre sortie, Patrick en a profité pour porter à notre attention quelques monuments locaux tels “la maison la plus cubique du monde” ainsi que le légendaire bureau de la députée fédérale NPD Ruth-Ellen Brosseau.
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En ces lieux, le jour, la nuit et les saisons s’enchainent à un rythme insaisissable.
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“Je pense qu’elle tripait sur Mulcair, mais plus maintenant qu’il est moins hot…”, nous confie-t-il.
En route vers notre second de quatre points d’intérêts, il me semblait que la ville même tentait de nous dérouter un peu plus à chaque pas.
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Le très chic restaurant grec à thématique italo-hispanique «El Greko».
Seconde escale: le magasin général de Louiseville, toutes les énergies chaotiques et incompréhensibles des lieux convergeaient vers cet endroit.
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En tout cas, si vous voulez un souvenir de première communion, c’est ici que ça se passe.
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Si j’étais un membre des premières nations, j’imagine que je trouverais ça charmant.
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Et le prix du bibelot le moins susceptible de créer un malaise si l’on invite des Noirs à la maison va à…
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Pendant ce temps dans l’allée des totons…
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Vos enfants vivront des heures de plaisir à découvrir l’anatomie bovine!
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“Spécialement conçus pour les femmes hyperperformantes dans la quarantaine”, ça me semble un peu spécifique, mais le marché est là…
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Cette fois où les concepteurs de figurines animalières se sont mélangés entre le rhinocéros et l’hippopotame.
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J’ai rarement vu des droits d’auteur être contournés aussi habilement.
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Vos enfants adoreront apprendre le dessin à l’aide de… CETTE ARAIGNÉE ROBOT!
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Yé!
Prochain arrêt : un des moult antiquaires Louisevillois.
À peine avions-nous pénétré l’enceinte, qu’un homme saoul, cinglé ou peut-être les deux, nous a indiqué dans le dialecte local qu’on “devrait tout acheter ici dedans” et que ça serait “un esti de bon deal” avant de disparaître dans le gris du brouillard. Prophétie? Forme maladroite d’humour? Nul moyen de le savoir, tout le monde dans le magasin semblait valider cet échange comme un typique moment attachant louisevillois…
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Le fameux combo ours/lampadaire.
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Je niaise pas, c’est vraiment vendu ensemble…
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Vos enfants rêvent de devenir des méchants dans James Bond?
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Idéal juste au-dessus d’un lit.
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“Maman? Je vais déménager je crois, semblerait que ce soit ici que les affaires se passent!”
Le propriétaire, visiblement ébranlé par la présence de clients, tentait par tous les moyens de nous intéresser à l’histoire de sa fameuse cuve de stérilisation, ou encore à son transporteur à chats des années 40… J’investis un effort d’alimenter la conversation de quelques répliques sur le pilote automatique telles : “Ah oui? Wow!”, “Bin câline, j’aurais jamais cru que c’était si vieux que ça”, et “Ah, ben c’est certain que c’est pas les mêmes prix qu’à Montréal…”.
Impossible de s’en débarrasser, il a redoublé d’ardeur en insistant pour nous montrer “les trésors du sous-sol”. Mon premier réflexe a été initialement la méfiance, mais je l’ai tout de même accompagné tout à coup qu’on trouve des œuvres d’art volées par les nazis, sait-on jamais! Mais non… Les “trésors du sous-sol” n’étaient malheureusement que beaucoup, beaucoup, beaucoup de chaises…
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En bonne écoterroriste radicale, Lora a finalement opté pour l’apaiser en lui achetant son transporteur à chats des années 40… Mais pas avant d’avoir réalisé qu’ils n’acceptent que le comptant, ce fameux gage de légitimité.
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Le centre commercial de Louiseville… Une sorte de cimetière d’éléphants, POUR HUMAINS!
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“Salon Reviens”, ben là j’ai comme pas le choix!
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Ah oui? Néons ET réverbères carrés? Pendant un instant j’ai cru qu’on était à Paris!
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— Charles, tu sais pourquoi on les appelle des inséparables ?
— C’est à eux qu’il faudrait poser cette question-là ma chérie…
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Je suis UN ESCLAVE!
Épilogue :
Notre départ a été ponctué d’une pluie diluvienne, Lora a maintenant en sa possession le plus vieux transporteur à chats connu par l’homme, le monde extérieur me terrifie plus que jamais… Et me semble qu’entretemps Patrick a trouvé un chat roux et lui cherche un foyer, n’hésitez pas à communiquer avec lui pour l’adopter, mais je vous avertis, ça inclut un voyage à Louiseville…
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Pour lire un autre texte de Charles Beauchesne : “J’ai été le chef de gare du train des tout-petits”