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Bienvenue au Jardin géologique

Par
Vincent Fortier
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Urbania souhaitait faire une visite hors de l’ordinaire au Jardin botanique de Montréal. On a donc fait fi des fleurs et on s’est intéressé… à de la garnotte!

On compte 22 000 taxons au Jardin botanique de Montréal. C’est à dire 22 000 plantes et fleurs portant un nom différent. Ce qui en fait l’un des plus importants de la planète. Mais qu’importe. Ma visite, menée sous un soleil de plomb, ne visait pas à recenser les variétés vivantes de ce coin de nature.

En marchant dans le Jardin avec Andrée Hallé, chef de section Programmation et muséologie à l’emploi du Jardin depuis 16 ans, – bon, d’accord, nous avions un kart! – nous nous sommes rendus compte que l’histoire de l’institution montréalaise était résolument coulée dans le roc. Après tout, le jardin est sis sur une immense ancienne carrière qui aurait rendu jaloux Monsieur Miroc.

Voici donc l’histoire rocambolesque des roches du Jardin.

Retour dans le passé

Dans le jardin des lilas, au pied d’un buisson, bien peu de visiteurs remarquent cet amas de pierres grises. Il s’agit des ruines d’un bâtiment du Mont-de-La-Salle, institution d’enseignement des frères des Écoles chrétiennes, construit de 1885 à 1887 et découvert en 2000 lors de fouilles. Ironie du sort, Conrad Kirouac y étudie pendant deux ans au tournant du siècle. Conrad deviendra plus tard le frère Marie-Victorin et fondera le Jardin botanique en 1931. Les frères quittent le Mont-de-La-Salle en 1917 et le bâtiment est la proie des flammes en 1925, puis détruit.

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Déjà, au début du 20e siècle, on avait identifié l’immense site, qui allait de Rosemont à Pierre-de-Coubertin, pour en faire un immense parc. Marius Dufresne – qui a fait ériger avec son frère Oscar le château Dufresne, coin Sherbrooke et Pie-IX – élabore, en 1915, un ambitieux projet comprenant des pistes de courses de chevaux, un amphithéâtre pour le hockey et la crosse, des lacs artificiels, des hôtels, une galerie d’art, un aquarium, un zoo et un casino… Le jardin de Dufresne ne verra jamais le jour, mais le projet, plus modeste, de Marie-Victorin s’en inspire dans les grandes lignes.

Le Jardin, une ancienne carrière

En marchant dans l’Arboretum, la partie chouchou du Jardin d’Andrée Hallé, on remarque une grande variation dans la dénivellation du sol. C’est qu’il y moins de 100 ans, tout le nord du Jardin était une immense carrière de calcaire. Une bonne partie des bâtiments voisins –comme le Marché Maisonneuve, mais pas le château Dufresne qui a été construit avec des importations italiennes – comportent des pierres de la carrière de la cité de Maisonneuve. «Je suis toujours étonnée quand je me dis qu’ici, avant, c’était un trou! fait remarquer Mme Hallé. C’est incroyable ce qu’on a réussi à faire.»

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À quelques endroits dans le jardin, on remarque même des trous dans les pierres pour le dynamitage. Les plans originaux, dessinés par Henry Teuscher, prévoyaient des jardins suspendus dans la carrière, qui a été toutefois été remplie avant l’aménagement du site. Lors de notre passage, nous avons pu voir les nouvelles stations d’interprétation de l’Arboretum (photo) réalisées par Atelier in situ et qui seront inaugurées le 14 juin. Scoop!

Histoire de cailloux

L’accouchement du jardin japonais a été douloureux. L’architecte paysagiste Ken Nakajima a dessiné les plans en 1967, pendant l’Expo. Mais le projet avorte. Lorsque l’on reprend l’idée, 20 ans plus tard, une histoire de pierres complique encore la tâche. Aucun des gros cailloux qu’on présente au Japonais ne font l’affaire, et il serait trop coûteux de faire venir des pierres d’outre-mer. C’est finalement après une visite à Thetford Mines que Nakajima découvre la péridotite – non ce n’est pas une maladie mais bien une pierre verdâtre – qui concorde avec sa vision (photo).

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Dans le jardin chinois, la pierre jaunâtre près de la pagode vient d’aussi loin que… l’île Sainte-Hélène. Les pierres grises trouées qui remplissent les aménagements et servent de sculpture viennent toutefois du lac Tai, près de Shanghai. Dans la pagode, on trouve même une petite exposition sur les gongshi, ou pierres à images, ces minéraux troués mais non sculptés, qui ressemblent à de véritables œuvres d’art.

Jardin de roches

Au sud du jardin alpin, Andrée Hallé me fait découvrir une petite promenade que je n’avais jamais vue auparavant. De part et d’autre du chemin, on trouve une multitude de roches – et quelques cactus qui survivent à travers. Du quartz au titane, en passant par l’amiante. Les panneaux d’interprétation, un peu défraichis, parlent même des différents types de minéraux. Visiblement passionnée par le sujet, Mme Hallé imagine bien voir un parcours géologique dans l’Arboretum.

En vrac

• Lors de notre visite, on mettait en place les immenses structures des Mosaïcultures. L’événement, qui couvrira une bonne partie de la surface du Jardin, débute le 22 juin.
• L’institution montréalaise travaille à un nouveau jardin qui devrait voir le jour en 2015. L’espace dédié à la phytotechnologie montrera les vertus des végétaux, des toits verts aux marais filtrants.
• Une nouvelle serre multifonctionnelle pour tenir des événements sera construite à côté du nouveau Centre de la biodiversité. Elle devrait être prête d’ici 2017.

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