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Avoir un chien en garde partagée

Y'a pas juste les enfants dans la vie qui subissent les contrecoups d'une séparation.

Par
Hugo Meunier
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«On s’est séparés en super bon terme, c’était important d’avoir le meilleur arrangement pour lui.»

«Les premiers jours, quand elle repart, je me sens seule et personne ne m’attend à la maison.»

«Présentement, je suis triste de ne pas la voir. J’y pense tous les jours.»

«C’est sûr que ça a contribué à maintenir des ponts entre nous, même si on n’est plus ensemble.»

Avouez que vous avez déjà entendu ce genre de citations dans plusieurs contextes de séparation et pourtant, on parle de garde partagée de chien ic. Même attachement, même deuil une semaine sur deux, mais surtout même effort pour maintenir des ponts avec l’ex-conjoint(e). Entretiens avec ces individus qui ont choisi d’entretenir une relation au-delà du couple, au nom de leur animal de compagnie.

De l’importance de bien s’entendre

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Laurence Lebel était en couple depuis cinq ans lorsqu’elle et son copain de l’époque ont décidé d’adopter Lucie, leur adorable Cavalier King Charles. Ils ont rompu moins de deux ans plus tard. «On s’est séparés en super bons termes et c’était pour nous important de trouver le meilleur arrangement», raconte Laurence, une gérante de bands, qui célèbre trois ans de garde partagée.

«Mon ex travaille de la maison, donc c’est mieux qu’il le garde puisque j’ai des horaires atypiques, mais on est restés amis, ce qui est primordial», souligne Laurence.

«Mon ex travaille de la maison, donc c’est mieux qu’il le garde puisque j’ai des horaires atypiques, mais on est restés amis, ce qui est primordial», souligne Laurence, qui avoue que Lucie a joué un rôle central dans le maintien du lien. «Lui, il a refait sa vie avec une blonde et moi je refais la mienne, mais on va ensemble chez le vétérinaire ou changer sa bouffe chez Animal Vert. C’est comme un enfant», explique-t-elle.

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Elle n’a d’ailleurs pas pu réprimer un sentiment de jalousie territorial lorsque son ex s’est fait une nouvelle amoureuse. «Je me disais intérieurement : attache-toi pas, c’est mon chien», raconte Laurence en riant, précisant que tout se passe finalement à merveille. «En fait, j’ai remarqué une amélioration. Elle est plus relaxe avec moi. L’éducation qu’il reçoit en garde partagée l’amène à s’adapter aux deux situations», résume Laurence, qui s’estime chanceuse de vivre une telle relation, qui fait en plus bien rire son entourage.

Pour l’amour de Shivas

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Chantale Gascon ne voulait pas de chien au départ, mais a finalement cédé un an et demi avant la fin d’une relation qui aura duré cinq ans. «En achetant Shivas, on avait statué que quoi qu’il advienne, c’est lui qui le garderait, puisque c’est lui qui le voulait», raconte la jeune femme.

Les choses ne se sont pas exactement passées ainsi. Son ex est allé passer un été à Los Angeles et Chantale a accepté de garder Shivas pour trois mois. La magie a évidemment opéré. Depuis, Chantale essaye de prendre régulièrement Shivas. «Les premiers jours quand elle part, c’est triste, je me sens seule et personne ne m’attend à la maison», admet Chantale, qui échange à l’occasion des messages et photos de Shivas avec son ex. Aurait-elle maintenu ce lien sans l’animal? «C’est une bonne question, peut-être…», répond la principale intéressée, ajoutant que même son père demande régulièrement des nouvelles de «la p’tite».

S’ennuyer de Pomme

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«Présentement, je suis triste de ne pas voir mon chien. J’y pense tous les jours.» Xavier Kronström Richard ne s’en cache pas : il s’ennuie de Pomme, l’épagneul qu’il a acheté avec son ex en 2010 et qu’il continue de voir en garde partagée depuis la rupture du couple trois ans plus tard. Comme Xavier et sa nouvelle copine viennent d’avoir un bébé, il était préférable que Pomme, un chien de chasse «assez nerveux», reste à l’écart du cocon familial naissant. Pour un temps en tout cas.

«On est deux solitaires, j’aurais été plus distant sans le chien, qui favorise des interactions. Pour le voir, je colle pour prendre le café, etc.», observe Xavier.

Une situation qui chagrine Xavier, très attaché à Pomme. «C’est un chien qu’on adore tous les deux et même après notre séparation, on avait des appartements proches et on faisait une semaine\une semaine», explique Xavier, qui admet même avoir approfondi sa relation avec son ex grâce au lien maintenu par Pomme. «On est deux solitaires, j’aurais été plus distant sans le chien, qui favorise des interactions. Pour le voir, je colle pour prendre le café, etc.», observe Xavier, qui croit profondément que Pomme pourra éventuellement réintégrer la dynamique familiale.

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D’ici là, il se console avec un calendrier mettant en vedette Pomme chaque mois.

L’inévitable attachement

Séparée depuis quelques mois, Silvy Dolbec s’était offert un chiot avec son ex il y a deux ans : un Cocker croisé Beagle nommé Élliot. «Un amour», résume tendrement Mme Dolbec. «Mon ex était attaché aussi. Quand on s’est séparés, il me demandait de venir voir Élliot et de le prendre parfois le weekend», raconte la résidente de Thetford Mines. «Ça m’arrangeait, parce qu’Élliot est un gros bébé et il est demandant», ajoute-t-elle.

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Aujourd’hui, son ex refait tranquillement sa vie dans une autre ville avec une autre femme et le chien est un peu relégué au second plan dans sa vie. «Il vient des fois», commente-t-elle, observant que le chien est plus calme en passant plus de temps seul avec elle. «C’est sûr que le chien s’ennuie, il (l’ex) a eu un impact dans sa vie. On ne veut pas comparer avec les humains, mais il ne faut pas sous-estimer leur intelligence », résume Silvy.

Un chien = un meuble

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D’un point de vue légal, aucun recours judiciaire n’est possible concernant la garde d’un chien dans un contexte de séparation, explique Sarah Canta, avocate spécialisée en droit de la famille. Aux yeux de la loi, les chiens sont considérés au même titre que les meubles, donc les deux partis sont invités à régler leur partage de gré à gré, à l’amiable idéalement. «Les juges n’embarqueront pas là-dedans. Ils vous rappelleront que la vie est courte et qu’il faut en profiter», illustre l’avocate. Comme pour les meubles, le chien risque de revenir à la personne qui l’a acheté et qui a un reçu pour le prouver.