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Avoir peur

et se jeter dans le vide dans les moments où ça compte le plus

Par
Jay Du Temple
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Je viens de vivre les 72 heures les plus intenses de ma vie professionnelle et les dernières 30 minutes les plus intenses de ma vie personnelle.

Commençons par avant-hier, soit le 7 septembre. Je me lève à 8 h du matin pour aller animer la conférence de presse d’Occupation Double (show télé que j’anime cet automne à Bali), et le soir, tourne le tapis rouge (qui sera diffusé le 1er octobre sur les ondes de V) qui se termine tard dans la nuit. Je quitte le lieu de tournage le sourire aux lèvres, heureux que ce soit fait. Deux juniors au poulet plus tard, je me couche vers les 4 h 30 du matin.

J’ouvre les yeux à 9 h : incapable de me rendormir. Beaucoup trop excité à l’idée de savoir qu’on est enfin rendu le 8 septembre, date où j’ai la chance de faire mon show devant un Métropolis (je sais qu’il a changé de nom, mais je dis encore Club Price et « cours de catéchèse », donc wait for it, MTelus) à pleine capacité, et ce, en ayant en « première partie » (je mets des guillemets, tu comprendras pourquoi) mes amis David Beaucage, Katherine Levac et Adib Alkhalidey (je te l’avais dit).

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Ce n’est pas normal d’avoir 1000 personnes qui t’applaudissent. C’est insensé. Je le voyais et je ne le croyais pourtant pas. Je ne crois encore pas que c’est réellement arrivé. Je ne sais pas ce que j’ai fait dans une autre vie pour mériter ça, mais j’ai dû être ben ben fin.

La fatigue, le stress et l’adrénaline m’ont permis de veiller jusqu’à 5 h du matin, en saluant amis et famille à coup d’accolades et de shooters.

Je fais ma valise de la meilleure façon : hangover et en retard pour être bien certain d’oublier le plus de choses possible.

Je m’apprête à faire un triple saut dans le vide.

Je quitte pour l’aéroport avec mes meilleurs, mes parents. Tout allait bien jusqu’à ce que ma sœur débarque à l’aéroport en surprise avec mon neveu et ma nièce. Les larmes sont sorties de nulle part. Ces deux êtres humains qui courent vers moi pour me serrer une dernière fois pour les 3 prochains mois, ça bat toutes les salles de 1000 places que j’aurai la chance de remplir. (No offense Métropolis. Merci aux gens qui sont venus.)

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Je traverse la gate et leur dis au revoir une dernière fois du regard. Je voudrais qu’ils voient physiquement mon cœur battre pour comprendre l’intensité avec laquelle je les aime.

Je traverse et réalise : je quitte pour Bali pour animer Occupation Double, et ce pendant 3 mois, et je vais te le dire : ça m’effraie.

Je n’ai jamais été en Indonésie, je n’ai jamais quitté le Québec 3 mois et je n’ai jamais animé un aussi gros show télé. Je m’apprête à faire un triple saut dans le vide. Souhaitons que je ne pogne pas un flat en arrivant dans l’eau.

Sauter

En fait, c’est plus comme un saut en parachute : il y a quelque chose d’extrêmement excitant, mais la peur n’est pas bien loin. Souvent en atterrissant on dit à nos proches : « J’ai zéro eu peur! » Et ce n’est pas ce que la vidéo du saut démontre.

Mon examen de conduite, la première fois que j’ai fait du vélo, quand j’ai demandé à Joëlle de venir avec moi au bal, là j’avais peur.

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En même temps, le fait d’avoir peur prouve que ce que tu t’apprêtes à faire te tient à cœur. L’examen de calcul intégral où j’ai eu 3 %, je n’étais pas nerveux en entrant dans la classe. Même que c’est la première fois de ma vie où j’étais heureux d’avoir 3 %, moi qui pensais avoir 0. Ça ne me stressait pas parce que je m’en foutais de cet examen.

Mon examen de conduite, la première fois que j’ai fait du vélo, quand j’ai demandé à Joëlle de venir avec moi au bal, là j’avais peur : je voulais réussir.

La peur n’est pas toujours mal, je pense. Au contraire : elle ressort le meilleur de nous souvent. La première fois que je suis monté sur scène pour faire mon premier stand up à vie, j’ai été nerveux pendant une semaine. Je ne dormais plus. Je ne mangeais plus. J’avais chaud et froid. J’étais en ménopause.

Puis, je suis monté. Les gens ont applaudi. Ils ont cessé. Je me suis mis à parler. Puis, un premier rire est arrivé. Et là, ma vie a changé.

Plus la peur est grande, plus tu dois livrer.

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On dirait qu’en quelque part, je savais que ce moment allait être important dans ma vie. Plus la peur est grande, plus tu dois livrer parce que le moment a une valeur probablement élevée à tes yeux. Ce qui rend la tâche encore plus difficile. Une fois dans le moment par contre, la peur est remplacée par le plaisir, l’effort, l’action, l’impulsion. Ta peur t’a tellement habitée qu’elle t’a forcé à te préparer encore plus que tu ne l’aurais fait.

La peur avant, c’est bon. Elle ne doit juste pas te figer. Ce qui arrive parfois, mais tu dois passer par-dessus. C’est ce que j’ai appris dans la chanson « Lose yourself » de Eminem.

J’ai peur, oui. Mais, j’ai aussi hâte. J’ai hâte de voir, de vivre, d’explorer, de découvrir. J’ai hâte de ne pas être chez moi, de ne pas savoir, de ne pas comprendre, de devoir demander et apprendre. J’ai hâte d’être ébloui, mêlé, perdu, pour mieux me retrouver.

Souvent, ma peur est reliée à ce que les gens pensent. Quand je me concentre sur moi, je suis content d’avoir peur, parce que ça veut dire que j’avance.

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