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Avec pas de parking

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Se parker n’est pas un droit jalousement défendu par la Charte des droits et libertés; c’est le maire de Bogotá (oui oui, Bogotá, capitale de la Colombie, pays d’Amérique latine plus célèbre pour son commerce illégal que pour ses innovations en terme d’urbanisme et d’aménagement urbain)qui nous le rappelait dans le documentaire Urbanized de Gary Hustwit; une notion qu’il faudrait ramener à la mémoire des Montréalais lorsqu’ils sacrent contre le manque de stationnement en ville, qu’ils chialent contre Luc Ferrandez, maire du Plateau, pour ses gestes audacieux en terme d’apaisement de la circulation, ou quand ils désertent les boutiques du centre-ville pour se rendre au Dix-30 et profiter d’un magasinage sans tracas ni enjeux de parcomètre… Et oui, pour nous, se parker est en quelque sorte un privilège.

Malgré tout ce que l’on peut croire, Montréal offre ce service à un prix relativement abordable. Au Canada, les Calgariens (453 $) et les Torontois (336 $) paient en moyenne plus cher que les Montréalais (280$) pour une passe de stationnement mensuelle. Considérant que posséder une voiture est un choix individuel et que les bénéfices liés à son utilisation sont également individuels, n’est-il pas normal et légitime que ses impacts négatifs, subis par la collectivité, soient encadrés par et pour cette même collectivité ?

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Parking = gaspillage d’espace public potable
Tous les Montréalais subventionnent les propriétaires de voiture en leur allouant à faible coût de l’espace public qui pourrait servir à un autre usage ayant une valeur ajoutée beaucoup plus intéressante pour la collectivité (piste cyclable, voie réservée pour bus, verdure, trottoir plus large, place publique, commerce, etc.). Montréal et la plupart des villes d’Amérique du Nord sont encore trop souvent pensées et développées en fonction de l’automobile. D’ailleurs, l’efficacité d’un axe routier est principalement calculée en fonction du nombre de véhicules et non pas en fonction du nombre de personnes qui peuvent s’y déplacer. Suivant cette logique, pour augmenter l’efficacité ou la capacité d’un axe routier, le réflexe est d’augmenter le nombre de voies pour laisser passer plus de voitures plutôt que de mettre en place des mesures de transport collectif (autobus à grande capacité et/ou à grande fréquence et voie réservée, par exemple) qui permettraient à plus de gens de circuler en moins de temps et en utilisant le moins d’espace public. Le concept de réaménagement du complexe Turcot est un excellent exemple d’actualité, alors que cette vision a largement été critiquée par ses opposants.

Montréal est-elle mûre pour un changement de culture ?
Pas plus tard que l’an dernier, il a été proposé de piétonniser une partie de la rue Masson. Les commerçants, s’inquiétant qu’une rue sans voiture et sans stationnement puisse réduire la rentabilité de leurs commerces, ont pesé lourd dans la balance pour faire tomber le projet. Pendant ce temps, d’autres villes osent et devinez quoi…elles ont du succès! New York a complètement revue le partage de la rue Broadway, une artère centrale en plein cœur de la ville, dans une mégalopole de plus de 8 millions d’habitants. Le concept est simple mais efficace : une bande cyclable est clairement identifiée (peinte en vert) et est adjacente à un espace piéton aménagé d’un mobilier urbain au design distinctif. Le reste de la rue est dédiée à la circulation automobile. Si la métropole étatsunienne peut avec succès amputer une de ses grandes artères de la moitié des voies de circulation automobile et des places de stationnement, Montréal peut certainement en faire autant. La ville de Bordeaux en France a converti près de la moitié des rues de son centre historique en rues piétonnes en plus de retrancher plusieurs voies automobiles sur ses principaux axes pour mettre en place un des tramways les plus modernes au monde. Résultats : la circulation automobile au centre-ville a chuté de 22 % dans l’année ayant suivi la finalisation de ce projet. Enfin, Bogotá, dont nous faisions mention plus haut, a également osé un changement de culture en mettant en service en 2000 le TransMilenio, un véritable métro de surface avec voies en site propre (voies retirées aux voitures en autres) en plus d’avoir adopté un système de rotation basé sur le numéro de la plaque d’immatriculation, interdisant ainsi aux véhicules de circuler deux jours dans la semaine.

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Facilement, Montréal pourrait revoir le partage de l’espace entre piétons et automobilistes sur des rues comme Sainte-Catherine et étendre la zone piétonne dans le Vieux-Montréal pendant la période estivale. Les opportunités existent, ne reste qu’à les appliquer. Avec le cocktail transport déjà en place (métro, bus, vélo, marche, Bixi, Communauto, pistes cyclables, taxi, etc.), Montréal peut bien se permettre de restreindre un peu plus la place prédominante qu’y occupe l’automobile.

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