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Assaut du Capitole: ce que l’on sait du « shaman de QAnon » un an plus tard
Le 6 janvier 2021 au matin, une foule compacte et nombreuse, principalement composée de supporteurs du président américain sortant Donald Trump, se forme aux abords du Capitole à Washington, afin de contester l’élection du nouveau « leader of the free world », Joe Biden.
Les choses s’enveniment rapidement alors que des protestataires réussissent à percer la sécurité du bâtiment gouvernemental, complètement submergée par la horde. Les membres du Congrès, en pleine séance, doivent rapidement évacuer le périmètre, alors que les manifestants investissent les lieux à leur guise.
Parmi les clichés plus surréels les uns que les autres, un personnage a particulièrement frappé l’imaginaire du monde entier: un homme affublé d’un casque en poil avec des cornes, torse nu et visage coloré aux couleurs de son pays hurlant comme un loup en brandissant un drapeau des États-Unis sur le plancher du Sénat. C’est Jacob Chansley, mieux connu sous le nom du « shaman de QAnon », une théorie du complot indiquant Donald Trump comme un « sauveur du peuple américain» venant les délivrer d’un groupe d’élite pédosatanique œuvrant dans les médias, le gouvernement et à Hollywood.
Survol du parcours d’un coucou qui a marqué le début d’année 2021.
De la Navy aux marches du Capitole
Originaire de Phoenix en Arizona, le jeune Jacob Chansley étudie en religion, philosophie et psychologie au Glendale Community College avant de passer par la Navy pendant quelques années. Le trentenaire se tourne ensuite vers l’écriture. Le fruit de son labeur se compose de deux livres autoédités à saveur conspirationniste sous le pseudonyme Loan Wolf, rapporte le Washington Post. Chansley trempe aussi brièvement ses pieds dans une carrière d’acteur et d’artiste multidisciplinaire selon The Independent.
Avant d’être reconnu à travers le monde comme le « shaman de QAnon » en chest, Chansley publie déjà depuis un certain temps des vidéos abordant plusieurs théories du complot sur la plateforme Rumble sous le pseudonyme YellowStoneAZ et est un personnage connu de la scène d’extrême droite de Phoenix, prenant part à des événements anti-Black Lives Matter et anti-mesures sanitaires contre la COVID-19 en 2020.
Selon The Arizona Republic, le trentenaire manifeste également à plusieurs reprises près du Capitole de l’Arizona en scandant à tue-tête des théories du complot reliées à QAnon. Il confesse en entrevue qu’il se déguise de la sorte pour attirer l’attention des badauds afin de « communiquer la vérité ».
Depuis l’élection de Donald Trump à la tête du pays en 2016, Jacob Chansley, qui a depuis changé son nom de famille pour Angeli, adhère aux théories de QAnon et adule le président américain.
Le 7 novembre 2020, soit quelques jours à peine après le scrutin que Donald Trump qualifie de « frauduleux » et que Joe Biden soit officiellement élu président, le « shaman » se rend au palais de justice du comté de Maricopa à Phoenix afin de protester contre les résultats du vote à l’occasion d’un discours incitant les manifestants à ne « pas croire ce mensonge ».
Deux mois plus tard, presque jour pour jour, le monde entier fera la connaissance du « shaman de QAnon » à travers des images tout droit sorties de Mad Max en direct du Capitole.
«C’était une sorte de tragédie clownesque pour la démocratie, pas juste américaine, mais du monde entier»
« Il y avait quelque chose de complètement surréel dans tout ça qui, d’une drôle de façon, concordait avec le surréalisme du règne de Donald Trump. C’était une sorte de tragédie clownesque pour la démocratie, pas juste américaine, mais du monde entier », amène l’analyste politique Rafael Jacob à propos de l’assaut du Capitole et plus particulièrement de la présence du « shaman » sur le plancher du Sénat.
Un an plus tard, le chercheur associé à la Chaire Raoul-Dandurand craint encore les contrecoups de cette attaque envers la démocratie. « Ce qui est inquiétant, c’est de réaliser qu’il y a encore une partie de la population qui appuierait ces gestes-là aujourd’hui avec tout ce que l’on sait. Je crois que ces gens ne comprennent pas tout à fait ce qui s’est passé et minimisent le geste », laisse-t-il tomber au bout du fil.
Un shaman actif même derrière les barreaux
Sans surprise, Jacob Chansley/Angeli a été arrêté pour entrave à une procédure officielle, entrée par effraction dans un bâtiment fédéral et trouble à l’ordre public quelques jours après les événements (il aurait lui-même contacté le FBI pour leur indiquer que c’était bel et bien lui sur les photos) et purge aujourd’hui une peine d’emprisonnement de quarante et un mois, soit l’une des plus longues condamnations à ce jour au sein des protestataires du Capitole.
Si l’homme au casque de poil de coyote s’est dit « déçu » par Donald Trump, qui n’était manifestement pas le sauveur tant espéré, qu’il se dissocie aujourd’hui du mouvement QAnon et qu’il dit avoir « déconné », il n’a pas cessé d’être « actif » en direct de son pénitencier à Washington pour autant.
En décembre dernier, l’animateur Joe Oltmann du Conservative Daily Podcast a invité le prisonnier à son micro afin qu’il parle plus en détail de son cas et du récent renvoi de son avocat. Le « shaman » s’est plutôt penché sur des sujets touchant, vous l’aurez deviné, à des théories du complot comme l’assassinat de John F. Kennedy, les élections « corrompues » de 2020 et la vaccination pendant près de deux heures.
Lorsque le co-animateur du podcast Max McGuire a questionné Chansley sur le traitement du système judiciaire à son égard, le protestataire s’est comparé à Gandhi, Martin Luther King et même Jésus Christ.
« C’est une partie du rôle de shaman: être celui qui se bat dans la guerre spirituelle pour les autres, celui qui montre les failles du système et aide à les réparer », a-t-il déclaré en entrevue.
On ne sait malheureusement pas ce que l’avenir nous réserve. Mais pour 2022, souhaitons-nous que des personnages comme ce « shaman » disparaissent comme par magie.