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Dans mon garde-robe gît une paire de hauts parleurs, de qualité très raisonnable, qui accumule la poussière. Je les brancherais bien dans mon ordi, mais un incident de type quelqu’un-a-monté-le-son-trop-fort-durant-un-party-et-depuis-ce-temps-mes-speakers-marchent-pu est survenu il y a environ deux ans.
Je ne sais trop que faire de ces deux belles boîtes noires de plastique et de kevlar. D’un côté, acheter de nouveaux haut-parleurs ne coûte pas super cher; on peut en trouver pour 20$ grâce à la magie de l’internet. De l’autre, une petite voix intérieure me dit que ça doit sûrement se réparer, des speakers sautés. Hésitant, je les laisse donc dormir sur une tablette, à côté de vieilles boîtes inutiles, et écoute ma musique ailleurs.
Ces tours de son meurtries font écho à un imbroglio de notre époque : j’ai une bébelle, ma bébelle casse, alors j’en achète une autre pour la remplacer et jette aux vidanges mon ancienne bébelle même si quelques réparations peuvent la ramener à la vie. Profondément illogique, mais ô combien plus simple.
Évidemment, il y a certains objets qui ne peuvent se réparer. On ne jugerait point Hulk de magasiner de nouveaux chandails après une crise de colère. Ou un loup-garou après une métamorphose nocturne. Mais un cas de type ah-merde-j’ai-un-trou-dans-mes-pantalons, ça se corrige généralement grâce à une petite visite chez la couturière. Mieux encore : ça s’apprend et on peut le faire par soi-même. En voici un tutoriel disponible sur YouTube.
Jeter nos cossins abîmés sous prétexte que l’on doit les remplacer est une mauvaise excuse. Un petit mensonge que l’on aime se conter pour se sentir mieux après avoir agi en paresseux. Mais au-delà de cette gymnastique intellectuelle de fragmentation, câlisser aux ordures des objets que l’on peut effectivement sauver à un coût. D’une part, un coût environnemental, parce que nos vieux cossins, qui vont pourrir au dépotoir, seront remplacés par des cossins neufs produits en usine en Asie du Sud-est dans des conditions de marde, transportés plusieurs milliers de kilomètres en cargo pas très hybride avant d’être revendus au Dix30 du coin. Écologiquement, ce n’est pas très sain. D’autre part, un coût humain, parce que les conditions de travail dans cette partie du monde sont, pour être poli, pas très reluisantes. Et en plus, acheter une bébelle neuve fait souvent plus mal au portefeuille que de faire réparer son ancien cossin brisé.
Même outre ces considérations, c’est simplement overkill de remplacer un objet que l’on peut faire réparer. Et derrière ce simple combo jette & remplace se cache un impératif tout simple, mitraillé à gauche et à droite et répété comme l’était la prière il y a quelques décennies de cela, qui est celui de l’économie. Il faut consommer, faire tourner la roue inarrêtable de la production/distribution/vente/consommation/abandon des marchandises sinon vous perdrez toutes vos jobs et serez incapables de nourrir votre famille.
En d’autres termes : acheter, jetez et rachetez parce que c’est un impératif sociopolitique, non pas pour vos besoins personnels, alors que de nombreuses affaires pétées pourraient tout simplement, avec un peu d’amour, les bons outils et de la bonne volonté, être réparées.
S’il y a donc de fidèles lecteurs d’Urbania capables de sortir mes haut-parleurs détruits de leur purgatoire agonisant dans mon garde-robe, faites-moi signe. Je n’ose pas les jeter aux ordures.
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