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Le Festival Acadie Rock, ça rock en goddamn.

Par
Mad Amesti
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Écrire ce billet représente un ben plus gros défi que tout c’que j’m’étais imaginé. Pourtant, j’suis juste censée écrire sur un festival, normalement y’aurait pas d’quoi page-blancher en fixant l’écran avec un peu d’bave sul coin d’la bouche, les deux yeux dans graisse de bines.

Mais hey, c’était le Festival Acadie Rock à Moncton. J’m’en remets à peine, physiquement, émotivement, culturellement.

Mon pauvre foie, mon cœur rempli, pis j’ai la tête en vrac.

Tu penses que c’est un festival de rock, right? Ou ben peut-être que tu penses que c’est un festival de l’Acadie avec des kiosques où tu peux manger une poutine à trou en te magasinant des affaires folkloriques acadiennes genre un bubble head d’Édith Butler écrit “Paquetville” dessus?

C’pas ça pantoute.

C’est une grande et belle célébration — émotive comme j’en ai rarement vue — de la culture acadienne dans tout ce qu’elle a de plus beau. Un festival multidisciplinaire qui dure 8 jours et dont le climax se trouve le 15 août, fête nationale des Acadiens. Ça s’appelle “Acadie Rock” en hommage au recueil de poésie du même nom de Guy Arsenault, publié en 1973. Des poèmes subversifs, dans ta gueule, qui ont élevé le chiac au rang de littérature.

Extrait :

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Buctouche by the sea
Cocagne in the bay
Shédiac on the rocks
Northumberland
Straight
pi un jardin de patates
au côté d’la mer.

Un jardin de
Kent Homes
au côté d’la Highway
cultivay par :
lrving Plus.

FarewelI
Kent Homes.

Ta maison
çé ton ché vous.

(Note : personne ne m’a parlé de la chanson Tous les Acadiens de Natacha Saint-Pierre, c’est étrange.)

Donc, la fierté acadienne c’est puissant sur un moyen temps. Pas étonnant de la part d’un peuple qui a su conserver sa langue et sa culture malgré des décennies à vivre avec l’épée de Damoclès de L’ASSIMILATION au-dessus d’la tête.

Ces gens-là crient leur existence, à grands coups de poème, de musique et de créations de toutes sortes, pis osti qu’c’est beau.

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LE CENTRE CULTUREL ABERDEEN

Tout ça a commencé avec le “15 Août Des Fous!”, il y a quelques années. Ça durait juste une journée et toute se passait là, spectacle extérieur, lecture de poésie, party. Éventuellement, le mandat de gérer les festivités quinzaoûtiennes (yep) a été passé au Centre culturel Aberdeen, une coopérative qui occupe un superbe bâtiment historique au centre de Moncton; une ancienne école primaire avec des planchers de bois qui craquent et des grands murs de briques. On y trouve des locaux d’artistes, en arts visuels et médiatiques, une garderie, un restaurant à se péter la tête dins murs (Les Brumes Du Coude), une grande salle de spectacle et plusieurs organisations actives dans le domaine des arts et de la culture.

J’y ai passé des moments que j’oublierai pas de sitôt (y’avait du Jameson pas cher.) La grande salle a une acoustique extraordinaire, parfaite pour assister à des shows de musique et danser sa vie, autant qu’à aller à une soirée de poésie dans une ambiance relaxe. À part le 15 août, c’est là que se passaient presque toutes les activités du festival. On s’y retrouvait à chaque fois un peu plus maganés d’la veille, mais c’était toujours aussi bon d’y revenir.

LE GRAND TINTAMARRE

Le Tintamarre c’est la tradition acadienne de se réunir à un endroit, le 15 août, en arborant de toutes les façons imaginables les couleurs du tricolore étoilé, et en traversant la communauté en faisant le plus de bruit possible. Les gens se pointent là avec des instruments improvisés, à 18h pile ça commence.

Enweille, crie-le qu’t’es Acadien, que le monde entier t’entende.

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J’me sentais au printemps 2012, mais avec du bonheur en bonus. J’avais amené ma clarinette pour l’occasion. Alors qu’on marchait en faisant du bruit en esti, je jasais avec une Acadienne qui m’a fait réaliser qu’en ce moment même, tous les Acadiens du monde faisaient le Tintamarre. J’ai pogné d’quoi. J’ai soufflé plus fort dans la clarinette.

Départ du Grand Tintamarre du Centre Culturel Aberdeen./Crédit photo : Max-Antoine Guérin
Départ du Grand Tintamarre du Centre Culturel Aberdeen./Crédit photo : Max-Antoine Guérin

LES SHOWS, LES PARTY PIS TOUTE.

Côté musique, le line-up du Festival était salement impressionnant. Pour le grand spectacle extérieur, on a eu droit aux Hay Babies, Les Hôtesses D’Hilaire, Karim Ouellet, A Tribe Called Red et Marc à Paul à Jos.

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Marc dont le père s’appelle Paul, pis l’père à Paul s’appelle Jos, Marc à Paul à Jos t’a pognes-tu?

Malgré que le 15 août était un lundi soir, y’avait du monde à messe en esti, plus que 10 000 personnes, anglophones et francophones, sont venues assister au show. Ça devait pas être beau à job le mardi matin. En plus que le 15 août n’est même pas un congé férié, ce que je trouve proprement SCANDALEUX, le 16 août au moins, lui, il aurait pu l’être.

Le soir du 16 août, lors de la soirée de poésie Gérard-Leblanc, Valéry, l’animateur de la soirée, a dit cette perle de sagesse acadienne : “La meilleure façon de se remettre d’une brosse, c’est d’en virer une autre.”

Ok.

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Les autres soirs, j’ai aussi pu assister aux performances de Réforme, Feu Follet, Klô Pelgag, Violett Pi, Tide School, Joey Robin Haché. J’ai pas pu tout voir malheureusement, et je ne vais pas faire une critique exhaustive de chaque groupe, mais chacun d’entre eux a été une découverte on ne peut plus rafraichissante. Un heureux mélange de tradition et modernité.

J’ai eu néanmoins quelques coups de cœur/foudre.

  • Serge Brideau, le chanteur des Hôtesses d’Hilaire, qui m’a fait visiter son bus tour, un autobus scolaire pimpé dans lequel ça sentait la p’tite hôtesse à patte cassée, (très rock) en me racontant des incroyables péripéties de TABLE et avec qui le hang était de grande qualité. Il est aussi un excellent comédien, on peut le voir dans quelques courts, dont celui-ci qui m’a pas mal accrochée. Et les paroles de ses chansons m’ont plus d’une fois fait rire jaune.
Serge Brideau en bédaine avec les Hôtesses d’Hilaire.
Serge Brideau en bédaine avec les Hôtesses d’Hilaire.
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  • Klô Pelgag, parce qu’elle et sa gang se sont pointés déguisés en salade de fruits, elle-même en pomme grenade.
Klô pomme grenade qui tente de jouer d’la guitare./Crédit photo : Max-Antoine Guérin
Klô pomme grenade qui tente de jouer d’la guitare./Crédit photo : Max-Antoine Guérin
  • La bière au fricot.
  • Les voix feutrées des Hay Babies.
  • Le Laundromat. Non, ce n’est pas une buanderie, c’est un café le jour, bar le soir où il y eu plusieurs after-show. J’y allais pour boire un café le jour et mon fun c’était de compter combien de personnes se pointaient là avec leur panier de linge sale et repartaient crédules, déçus.
Les after-party au Laundromat./Crédit photo : Max-Antoine Guérin L’équipe incroyablement chaleureuse des coulisses d’Acadie Rock. Après les avoir côtoyés pendant 5 jours, c’est comme si on se connaissait depuis toujours. Deux poètes qui ont littéralement conquis mon cœur de fille qui connait rien à la poésie. Céleste Godin et Gabriel Robichaud. Leurs mots m’ont bouleversé l’âme à m’en faire shaker le p’tit menton. Plus que des poètes, ce sont des guerriers de la culture acadienne. Après les avoir écoutés, j’aurais voulu offrir mes services de mercenaire pour cette nation qui n’est pas la mienne, mais qui est tellement magnifiée de toutes parts dans ce festival, que j’envie presque la relation fusionnelle qu’ils ont avec leur patrie.
Les after-party au Laundromat./Crédit photo : Max-Antoine Guérin L’équipe incroyablement chaleureuse des coulisses d’Acadie Rock. Après les avoir côtoyés pendant 5 jours, c’est comme si on se connaissait depuis toujours. Deux poètes qui ont littéralement conquis mon cœur de fille qui connait rien à la poésie. Céleste Godin et Gabriel Robichaud. Leurs mots m’ont bouleversé l’âme à m’en faire shaker le p’tit menton. Plus que des poètes, ce sont des guerriers de la culture acadienne. Après les avoir écoutés, j’aurais voulu offrir mes services de mercenaire pour cette nation qui n’est pas la mienne, mais qui est tellement magnifiée de toutes parts dans ce festival, que j’envie presque la relation fusionnelle qu’ils ont avec leur patrie.

J’aime ça le Québec. Mais l’Acadie je l’aurais frenchée, solide.

Céleste Godin, poétesse et en arrière, Marc — Chops — Arsenault, directeur artistique d’Acadie Rock/ Crédit photo : Max-Antoine Guérin
Céleste Godin, poétesse et en arrière, Marc — Chops — Arsenault, directeur artistique d’Acadie Rock/ Crédit photo : Max-Antoine Guérin
Gabriel Robichaud.
Gabriel Robichaud.
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Pour bien clore Acadie Rock, on termine avec l’évènement “C’est Right Short”. Une collaboration entre Acadie Rock et le Festival international du Cinéma Francophone en Acadie (FICFA) pour faire découvrir le court-métrage. On y projette des courts de toute sorte, drôles ou dérangeants, on peut en visionner quelques-uns ici.

Faque, c’est pas mal ça qui est ça dans l’monde du sport.

Acadie Rock, je t’aime. On va se revoir pour sûr.

J’te laisse sur ces mots de Céleste, ils sont issus d’un poème qu’elle a récité le soir du 16 août, le soir du hang over national. C’est un poème qui parle de l’Acadie oubliée, celle qui est isolée, de l’Acadien qui est seul, sans communauté et dont l’identité est menacée.

Well, C’t’affaire­citte peut clairement pas finir de même

So j’vous propose un toast

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On lève nos verres à tous ceux qui ne sont pas ici avec nous

À ceux qui ont raison d’être jaloux

À ceux qui n’entendent jamais des poètes

À ceux qui ont le 15 août comme seule fête

À ceux qui ont mal à leur Acadie

À ceux qui rêvent de vraiment vivre leur patrie

À ceux qui ont trop honte pour parler

À ceux qui ne savent même pas ce qu’ils sont en train de manquer

À ceux qui n’ont jamais aimé en français

À ceux qui se trouvent juste drôles en anglais

À ceux qu’on oublie toujours

À ceux qu’on ne mentionne jamais dans nos discours

À ceux qu’on a un peu abandonné

À ceux qui se sentent seuls et isolés

À tous ceux qui ne sont pas des privilégiés comme nous

Cheers!

***

Pour lire un autre compte-rendu de festival : “On est Festif! ou on l’est pas”

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