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6 faits à savoir sur la lauréate du prix Nobel de physique… et le sexisme en sciences
La Canadienne Donna Strickland vient de remporter le prix Nobel de physique. Voici tout ce qu’il faut savoir sur ses recherches sur les lasers et sur « comment ça se fait qu’aucune femme ne l’a gagné depuis 55 ans ! »
La physicienne, originaire de Guelph, en Ontario, est récompensée pour ses travaux de recherche de doctorat, effectués dans les années 80, sous la supervision de Gérard Mourou. À l’époque, les impulsions émises par un laser étaient courtes ou intenses : jamais les deux en même temps. Comment les combiner alors que le rayonnement laser dure quelques femtosecondes, l’équivalent d’une seconde divisée par un billiard ?
Historiquement, peu de place était accordée aux femmes en physique et encore moins de reconnaissance, même pour les lauréates du Nobel. En 1903, Pierre Curie doit faire pression pour que sa femme l’obtienne avec lui.
Pour allier court et intense, Donna Strickland sort des sentiers battus. Alors qu’à l’époque, les physiciens cherchaient d’abord à amplifier l’impulsion laser, Strickland et Mourou ont eu le coup de génie d’affaiblir le laser avant de l’amplifier. De cette façon, l’impulsion peut être étirée ou compressée. Encore aujourd’hui, cette méthode — l’amplification par dérive de fréquence — est utilisée de façon industrielle et en médecine, notamment durant les chirurgies oculaires.
En tant que troisième femme à remporter le Nobel de physique, la nomination de Donna Strickland fait couler beaucoup d’encre. Historiquement, peu de place était accordée aux femmes en physique et encore moins de reconnaissance, même pour les lauréates du Nobel. En 1903, Pierre Curie doit faire pression pour que sa femme l’obtienne avec lui. Sans cela, la contribution de Marie serait restée sous silence. Soixante ans plus tard, Maria Goeppert-Mayer remporte le Nobel de physique. Malgré ses découvertes significatives sur la structure du noyau atomique, elle travaille gratuitement durant la majorité de sa carrière puisque les universités américaines refusaient d’engager une femme comme professeure.
Depuis l’époque de Maria Goeppert-Mayer, on pourrait penser que les physiciennes sont reconnues pour leurs travaux de recherche. Pourtant, jusqu’à une heure après la nomination de Donna Strickland, tous ceux qui voulaient en apprendre davantage sur la chercheuse faisaient chou blanc sur Wikipédia. En mars 2018, un modérateur de l’encyclopédie en ligne a rejeté une page biographique de la chercheuse sous prétexte que ses réalisations n’étaient pas assez marquantes. Surprenant ! Gérard Mourou, avec qui elle partage son Nobel, a sa propre page Wikipédia depuis 2005.
Suite à l’annonce des prix Nobel 2018, le comité de sélection a reçu de nombreuses critiques par rapport au sexisme durant le processus de nomination. Anne-Marie Imafido, directrice des Stemettes, une organisation anglaise qui encourage les jeunes filles à poursuivre une carrière en sciences et en ingénierie, expliquait en entrevue à CBC que : « le biais de genre qui pervertit le processus de nomination des Nobel vient des professeurs titulaires. Ils sont responsables des nominations et se sentent intouchables. Ils s’en sortent sans une égratignure pour tout, du harcèlement sexuel aux microagressions comme le fait de présumer que la femme présente à la réunion prendra les notes ou encore qu’elle devra quitter tôt pour s’occuper de ses enfants. »
Dorénavant, toutes les nominations considérées par le comité scientifique de la Fondation Nobel devront prendre en compte le biais de genre. Espérons que cela contribue à faire rayonner les recherches des femmes en sciences. Après tout, l’époque où les femmes n’étaient pas les bienvenues dans les laboratoires parce qu’elles risquaient de se brûler les cheveux est révolue, non ?