Humoriste, comédien, collaborateur au podcast Des si et des rais tous les samedis, figurant à temps partiel, BIG MAX : disons que Maxime Gervais porte plusieurs chapeaux. Au cours des dernières années lui et son duo Pic-Bois ont évolué, passant de participants à En route vers mon premier gala à headliners du festival Zoofest l’an dernier (pour leur dernière fois d’ailleurs). Depuis, ils ont décidé de sortir des sentiers battus pour autoproduire leurs propres spectacles tous les mois dans un Théâtre Ste-Catherine toujours sold out.
En parallèle, Maxime travaille en plus sur son projet personnel musical. Ses trois dernières créations, sorties entre 2016 et 2019, présentent un triptyque assez varié de sa personnalité. Sur Artiste raté, l’auditeur a droit à une grande remise en question de l’artiste tandis que sur La Plage, il est plutôt plongé dans un univers sombre de réflexion sur la maladie. Sorti le 18 janvier dernier, son nouvel album La Magie vient boucler cette trilogie en abordant à la fois des thématiques dark, le tout tempéré par un souffle d’humour.
Nous avons discuté avec lui pour en apprendre plus sur son projet.
5 questions
Joël Martel est une sorte de narrateur au courant de l’album, et il te répète de croire en la magie. Pourquoi avoir demandé à lui en particulier d’incarner cette présence positive là?
Joël et moi, on se ressemble énormément dans notre démarche créatrice. On partage des visions très semblables sur la musique, le cinéma, le web et l’humour. Au bout du compte, on se ressemble aussi pas mal en tant qu’homme. On a des angoisses similaires pis on se les partage souvent en inbox!
Je savais que les gens allaient reconnaître sa voix chaleureuse qui réussit toujours à être à mi-chemin entre le ridicule et le réconfortant. « Dans les coulisses de l’album », on appelait son personnage Le Magicien. Une espèce de non-personne bienveillante qu’on pourrait retrouver dans Twin Peaks.
Difficile de ne pas voir le parallèle entre Underdogs et les Pic-Bois. Dans la chanson, tu dis que vous avez été jaloux à vous en rendre fou. À quel moment vous avez décidé de vous foutre du paquebot et de juste vous concentrer sur votre chaloupe?
Après plusieurs années à bûcher, on a compris que nos plus gros succès venaient des moments où on agissait sans compromis. On a compris que les gens nous suivaient de plus en plus et qu’ils aimaient l’absence de limite qu’on avait dans notre univers. Surtout, on a remarqué que c’est là qu’on avait le plus de fun! On aime ça jouer proche du monde! On aime ça aller au fond de nos niaiseries! On aime ça entendre du monde crier « TABARNAK! » dans la salle!
Je pense qu’on a arrêté de se voir comme des humoristes de la relève pour enfin se voir comme des humoristes professionnels qui évoluent dans un nouveau milieu underground qui n’était pas forcément là quand on a commencé.
Les temps ayant changé, on remarque que « la grosse machine » est de plus en plus ouverte à notre style. On entend de moins en moins des phrases comme « Ouin, mais notre public n’est pas prêt pour ça… »
Accessoirement, j’adore les histoires d’underdogs comme celle des Ramones ou de Daniel Bryan (YES YES YES YES).
Qu’est-ce que la musique t’amène de différent par rapport à l’humour?
En humour, on essaie toujours d’être le plus épais possible. C’est la mission qu’on s’est donnée pis je pense qu’on y arrive quand même bien! Dans tout ça, nos personnages finissent par exister par eux-mêmes. Ils ont leur propre vie qui évolue en s’éloignant de plus en plus des nôtres. Même si on s’inspire de notre entourage et de nous-mêmes, c’est leur journal intime à eux qu’on écrit.
En musique, c’est tout le contraire. J’ai besoin d’attendre qu’il se passe quelque chose dans ma vie pour ressentir le besoin d’écrire. J’ai besoin d’être transformé d’un album à l’autre pour ne pas avoir l’impression de me répéter. Ça se passe souvent par des événements malheureux.
Slacker avait un moment où je me suis fait sacrer là comme toile de fond. Sur Artiste Raté, c’était l’angoisse d’avoir 30 ans et de courir dans le vide. La Plage était ma réponse au fait qu’un de mes meilleurs amis était condamné par un cancer du cerveau. De son côté, La Magie s’est présenté comme le portrait de ce deuil que je vivais.
L’album commence en disant qu’il n’y a plus de magie, puis il finit avec toi qui la retrouves. Qu’est-ce qui s’est passé durant la composition pour que ta vision change?
Comme j’ai écrit plus tôt, l’album traite du deuil que j’ai dû faire de mon ami Julien. Dans les semaines qui ont suivi son départ, je me sentais complètement absent de ce qui se déroulait devant moi. Je me sentais comme dans un rêve dans lequel je n’avais pas envie de m’investir. C’est là qu’est arrivé La magie n’existe pas. La chanson a l’air bien heureuse, mais elle cache pourtant un malaise de vivre. La ballade du figurant et Buffy et Spike sont aussi arrivées dans cet esprit-là.
Une nuit, Julien, ou du moins le souvenir que j’en ai, est venu me visiter dans un rêve. On était dans la maison de mes parents pis on jasait en regardant dehors. Il était toujours aussi baveux pis ça me faisait rire! Le rêve s’est termin é pis la journée qui a suivi portait une nouvelle sérénité. C’est là qu’a commencé Le retour de la magie.
Les chansons qui sont venues après étaient beaucoup plus lumineuses. L’humour revenait tranquillement (Nacho ou Con Queso?). Je m’amusais à nouveau. Je ne pense pas avoir trouvé de réponses à tout ça, mais j’ai découvert que je trouverais la paix à travers l’amour, l’amitié, le rire et le désir de créer. C’est terriblement quétaine, mais… c’est ça!
Peux-tu nous parler de la pochette : qui l’a fait et quel est le concept derrière?
Depuis mon album La Plage, j’ai décidé de m’associer à des amis et amies de mon entourage qui sont artistes visuels. Pour La Plage, j’avais demandé à mon loup gris, Jeik Dion, d’illustrer la souffrance qui chargeait l’album.
Pour La Magie, qui se présente comme la suite directe de La Plage, je voulais qu’on ressente que l’album aborde des sujets très sombres tout en étant lumineux. J’ai contacté mon amie Laurence Lemieux dont j’admirais beaucoup les collages. Je lui ai envoyé l’album pis on est allés prendre un café. J’ai tripé parce qu’elle a vraiment compris ce que je cherchais à exprimer avec l’album. Elle a vu ce que les chansons essayaient de crier malgré leur touche souvent humoristique. On a jasé des symboles et des personnages qui peuplaient l’album. On voulait une image qui inspirerait un rêve dans lequel les angoisses et l’espoir se côtoieraient. Très Twin Peaks. Je capote sur sa pochette!
.jpg)
5 chansons
5 chansons que tu ne voudrais jamais voir disparaître?
The Ramones – I don’t care
Encore aujourd’hui, je joue de la guite comme un pied et je ne serais jamais monté sur une scène si ces gars ne m’avaient pas montré que c’était correct de le faire.
Jean Leloup – Le Dôme
On voyage tellement avec cette toune-là. Le paysage est plus grand que nous… pis ça se présente avec tellement de simplicité que tu comprends que c’est une chanson parfaite.
Acid Mothers Temple – Pink Lady Lemonade
C’est ma toune pour planer. Le décollage se fait en douceur pis le reste appartient à la personne qui l’écoute.
Ils seront d’ailleurs à Montréal le 17 avril au Ritz.
The Stooges – No Fun
C’est ma toune pour les balades nocturnes. Ça me donne l’impression de chercher le trouble!
Weezer – Say it ain’t so
Esti qu’a rentre ben, cette toune-là!
Pour suivre Maxime Gervais, c’est ici.
Pour suivre les Pic-Bois, c’est ici.
Ils seront d’ailleurs en tournée dans le prochain mois avec Le Sexe-Tôt des Pic-Bois. Pour plus d’infos, c’est ici.