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5 fuites qui ont marqué l’histoire de la musique
Les fans finis de Radiohead autant que les fans médium saignants ont eu, la semaine dernière, un cadeau de Noël vraiment d’avance (et gros comme à peu près 3 poches du père Noël). Environ 16 heures de matériel inédit ont été mises en ligne par le groupe lui-même, datant de l’âge d’or circa Ok Computer. La raison de cette généreuse offrande : un hacker menaçait de diffuser le contenu en ligne, en demandant un prix exorbitant.
La fuite est majeure, à la fois pour l’histoire du band et pour celle de la musique populaire (pis de celle d’internet) : un record en termes de quantité, une gestion de crise tout à fait inusitée, mais quand même pas mal moins étrange quand tu t’appelles Radiohead et que t’as toujours fait les trucs à ta manière.
Cette apothéose du trafic musicale est la dernière d’une longue série d’albums téléchargés avant leur sortie officielle, de chansons pas finies diffusées sur les radios étudiantes, de démos et de brouillons disséminés entre des mains avides en quête de musique inédite de leur artiste préféré… contre le gré de leur artiste préféré. Vous voulez d’autres exemples de fuites époustouflantes? En voilà cinq.
Radiohead (sauf qu’on est en 2000 et que c’est KID A l’objet du leak)
Ce mémo n’est que pour vous rappeler que les membres Radiohead sont des doctorants en fuites musicales. Déjà en 2000, le band avait été victime d’un gros leak sans scrupule de leur album Kid A. J’écris « victime », mais en fait, cet incident est un exemple vibrant du pouvoir des fuites. Radiohead était en froid avec son label de l’époque, Capitol, et rien de rien, pas même un single ou un vidéoclip, n’était offert par le groupe pour faire mousser les ventes de son album à paraître. Résultat : Capitol a cautionné une fuite de Kid A dans les méandres de Napster. Oups. Sauf que pas oups. Le buzz a été sans précédent : l’album a toppé les palmarès britanniques le jour même de sa sortie. Bref, un leak qui aura fait plus de ventes que de mal.
Bob Dylan a.k.a le premier fuité
On décrit souvent les Basement Tapes de Bob Dylan comme étant les premières tracks de l’histoire à avoir fui. Les chansons des Tapes n’étaient pas destinées à être commercialisées un jour. En 1968, Dylan et son backing band de l’époque, judicieusement nommé The Band, s’étaient préparé un petit set de chansons à partager à des amis musiciens à la recherche de croustillants covers. Next thing you know, les chansons se retrouvent sur l’album illicite Great White Wonder, caché derrière les comptoirs des disquaires dès 1969. Les fans capotent : Bob retourne à un son folk dépouillé, enraciné dans la tradition américaine. Grosse déception quand, l’année d’après, le « vrai » prochain album du Tambourine Man sort. Self Portrait sonne un peu comme une joke pas honnête à côté d’un album leaké qui sonnait tout croche, mais qui respirait l’authenticité.
Depeche Mode et le méchant internet
Le premier cas de leak sur les internets remonte quant à lui à… 1993. À côté des faxes et des bonnes vieilles lignes téléphoniques traditionnelles, les ordinateurs commencent tranquillement pas vite à s’immiscer dans nos salons et nos bureaux. Dans les chat rooms des premiers chanceux à avoir accès au worldwide web, les chansons de l’album Songs of Faith and Devotion de Depeche Mode se passent à la vitesse d’un escargot sur le cbd. Déjà à l’époque, les dérives de l’internet sèment la panique, le désordre et du gros synth pop.
Frank Ocean
S’auto-leaker. C’est ce qu’a fait le prodige du R&B Frank Ocean pas trop longtemps avant la sortie de son classique Channel Orange. En 2011, sur son Tumblr, une Thinking Bout You encore embryonnaire fait fureur. Coudonc, Ocean est-il en train de nous faire un coming out semi-voilé? Puis la chanteuse Bridget Kelly fait une sortie publique du genre « Nenon, c’est que la chanson a été écrite pour moi ». Puis Frank Ocean fait une sortie publique du genre « un print screen d’une note super émotive laissée ouverte sur l’écran d’accueil de son Mac ». La toune est bel sienne et le boy de la chanson est son premier amour avec un autre homme. L’auto-leak, au final, redéfinit à jamais l’identité d’Ocean.
Et au Québec? Le dégât de Nicola Ciccone
Oui, on a eu des artistes d’ici qui se sont fait sauvagement piller leur musique présortie officielle. On pense à Céline, évidemment, mais aussi à Wilfred LeBouthiller, du temps où Star Académie faisait la pluie est le beau temps. Le cas de Nicola Ciccone est tout autre : sa toune profanée n’est pas vraiment un leak en même temps d’en être un.
Trip de bouffe connaît une sortie officielle sur Noctambule en 2006. L’hymne au munchies post-puf passe relativement inaperçue, noyée parmi des ballades émouvantes dans la tradition cicconienne. La chanson devient pourtant culte au début des années 2010. Un montage vidéo à se crever les yeux attire les clics sur YouTube. La toune fait l’objet d’un cover psych-bad-trip. Nicola renie vraisemblablement son délit musical. Le clip non officiel est supprimé de la toile, on semble essayer de nous faire oublier l’existence de la chanson. À moins d’avoir la copie physique du disque, il était presque impossible, jusqu’à tout récemment, d’écouter Trippe de Bouffe sur le web. Est-ce la légalisation du pot qui nous a graciés d’un retour de l’enfant prodige? J’pense que oui!