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Aujourd’hui, j’aimerais écrire une lettre à l’industrie de la mode, mais je ne saurais à qui l’adresser (Armani ? Calvin Klein? Véronique Cloutier?). Comme mes photos peuvent en témoigner, je ne connais ni l’industrie, ni le monde, ni même la mode en tant que telle, en fait.
Bien sûr, j’ai peut-être regardé un épisode ou deux d’America’s Next Top Model, mais seulement pour tout le drame humain qui s’en dégage et certainement pas pour les compétitions de maillots, oh non! Moi pis la mode, on a bel et bien des amis en communs (surtout sur Facebook), mais à moins que le fait d’acheter ses bobettes en paquet de 14 chez Rossy soit « trendy » ou « second degré » (un peu comme la moustache, genre), on ne se connaît vraiment pas.
Mais comme j’ai tout de même un problème grandissant avec elle depuis quelques jours, j’ai décidé de parler dans son dos sur le blogue d’Urbania. Bref, je ne connais pas l’industrie de la mode et j’ai les réflexes de défense d’un gamin de 8 ans. Génial!
Y’a tout d’abord eu le cas de Lizzie Miller qui a captivé quelques médias en 2009.
Tout près d’un article sur « Le corps et l’image » publié dans une édition du magazine Glamour, on retrouvait cette photo de cette mannequin de 20 ans qui – horreur! – a des vergetures et une ‘tite bedaine. Le mensuel est inondé de courriels de lecteurs épatés et de journalistes désirant interviewer la belle blonde.
Bien que cette photo a lancé la carrière de Miller, celle-ci a confiait par la suite au Guardian qu’elle se disait « déçue » – et avec raison! – d’être cataloguée comme un « mannequin de taille forte» alors qu’elle fait 5’11″ et un peu moins de 80 kilos. Est-ce encore un coup de la nouvelle grammaire française? Après « oignon » qui devient « ognon », est-ce que le terme « mannequin de grande taille » a remplacé le terme hautement scientifique « belle madame aux courbes d’une lectrice moyenne d’un magazine de mode »? Sacrée grammaire, va!
C’est quand même délirant qu’en 2011, des magazines mode s’enorgueillissent à outrance de « célébrer la femme sous toutes ses courbes » (ou autres formules vaseuses du genre échappé dans une séance de remue-méninge de trois secondes) en donnant de telles étiquettes à des femmes aux mensurations « plus près de la réalité » ou, pire encore, en les affichant cantonnée que dans des numéros « spéciaux » comme le « spécial : formes » d’avril de l’édition états-unienne de Vogue.
Bordel! De la belle dame, y’en a de toutes les tailles et de toutes les couleurs et on les trouve autant dans les bars que dans les bibliothèques, les autobus ou… euh… le bureau d’un(e) député(e) de l’ADQ, tiens. Bien que notre gouvernement veut nous ramener d’un siècle ou deux en arrière en brûlant des millions dans le Jubilé de la Reine, est-ce que l’industrie de la mode et les médias qui en découlent peuvent être « dans le vent » et finalement faire cohabiter tous les « formats » de femme dans leur magazine sans s’autocongratuler ou se vautrer dans le fétichisme? On parle de mode, bordel! Pas des Olympiques spéciaux!
Mais non, tout ce que l’industrie de la mode semble avoir retenu de l’ère moderne, c’est des tactiques pour obtenir du contenu à faibles coûts et les nouvelles fonctions de Photoshop.
Oui, oui, après la retouche à outrance rapportée notamment par Valérie Borde de L’Actualité, on rapporte que H&M utilise maintenant des modèles entièrement créés par ordinateur dans leur catalogue en ligne.
OK, les temps sont durs, mais si H&M ne peut plus s’offrir de véritables séances photo pour fourguer sa guenille (NDLR : j’y achète mes chemises, je sais donc de quoi je parle), qui peut se le permettre?!
Le plus navrant demeure le fait que même dans un « laboratoire » comme Photoshop, les bonzes de H&M optent pour une image, voire une icône, de la femme qui est souvent inatteignable par la clientèle visée (la surdose de fignolage sur les photos des magazines rapportée par le billet de madame Borde en témoigne).
Ainsi, le premier réflexe du « nerd » aux commandes de la souris est de recréer le monstre de Frankenstein (dans le sens qu’on appose des têtes de véritables mannequins sur ces corps numériques) en s’inspirant du cliché de la femme filiforme très Kate Moss. Tant qu’à insérer les nouvelles technologies dans une industrie qu’on dit souvent « tendance », le choix d’H&M est incroyablement navrant.
Pire encore, cet acharnement de la mode sur ce « canevas » n’est pas vide de conséquences.
Il y a la boulimie et l’anorexie qui pourraient en découler(de près ou de très, très, très loin), bien sûr, mais cette obsession pour la maigreur et les courbes en vient aussi à corrompre le cerveau de personnes, qui à leur tour, imposeront cette image trafiquée par ordinateur à leurs enfants.
La preuve? L’Huffington Post rapportait récemment qu’une dame mi-folle, mi-plastique a offert un coupon d’une valeur de 10 000$ échangeable contre une augmentation mammaire à sa fille de sept ans pour son anniversaire.
Sept ans, sacrament!
…
Bref, chères lectrices d’Urbania, rassurez-vous. Même si vous vous trouvez trop grandes, trop petites, trop grosses, trop maigres, trop « nichonnées » ou pas assez, vous dégagez plus qu’une page de catalogue. Si vous fréquentez une salle de musculation ou la piste de course du parc du coin pour des raisons de santé, tant mieux; mais si c’est pour plaire à l’autre, rappelez-vous qu’il y aura toujours quelqu’un pour se masturber furieusement en pensant à vous quoiqu’il vous arrive. Mieux encore, il le fait en écoutant ça…