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3 nouveautés culturelles pour réfléchir aux droits des femmes

Et constater tout le chemin qui reste à parcourir.

Par
Constance Cazzaniga
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Selon le Conseil du statut de la femme du Québec, le 8 mars est une journée pour « saluer tout le travail accompli vers l’atteinte de l’égalité » et « rappeler la fragilité des acquis en matière de droits des femmes ». Justement, trois propositions culturelles fraîchement sorties invitent à réfléchir aux droits des femmes, à ce qui a évolué et à ce qu’il reste à faire.

Pour réfléchir en rigolant

La deuxième saison de la très aimée série C’est comme ça que je t’aime nous fait voyager en 1975, que les Nations unies avaient déclarée Année internationale de la femme. Loin d’être une simple trame de fond, ce fait historique prend une place centrale dans l’été de brigandages et de bains de minuit des tueurs de Sainte-Foy, comme Huguette (Marilyn Castonguay) décide de revendiquer ses droits.

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Maintenant qu’elle travaille à la tête d’une organisation criminelle, celle qu’on vante pour son « œil de lynx » rejette le titre de femme au foyer, laissant à son sot de mari les tâches alors associées aux mères de famille, comme cuisiner et s’occuper du bébé. En plus, en tant que caïd, elle réalise être victime de sexisme de la part d’hommes qui n’acceptent pas qu’une femme prenne un tel titre.

Et ça, c’est sans compter la féministe mao-stalinienne Marie-Josée (Sophie Desmarais), toujours aussi convaincue – bien que son lesbianisme politique batte de l’aile –, ni Micheline (Karine Gonthier-Hyndman), qui prend une décision encore très marginale pour une femme mariée à l’époque.

En voyant les six épisodes de la deuxième saison qui sont disponibles sur l’Extra d’ICI TOU.TV (les quatre suivants arrivent le 10 mars), c’est difficile de ne pas être frappé.e par le fait que le simple concept d’égalité des sexes levait son lot d’objections. C’est comme ça que je t’aime donne envie de tout savoir sur l’Année de la femme et sa conférence mondiale à Mexico, des événements qui ont contribué aux avancées des droits des femmes à une époque où, au Québec, on créait entre autres nos premières maisons d’hébergement, tandis que la France légiférait sur l’avortement avec la loi Veil.

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Pour réfléchir en se crispant

Parlant de la loi Veil, avant son existence, l’avortement en France était passible d’une peine d’emprisonnement. C’est dans ce contexte que l’écrivaine Annie Ernaux est tombée enceinte, alors qu’elle étudiait en lettres au début des années 60. Son livre autobiographique L’événement (2000), qui relate le chemin de croix qu’elle a dû traverser pour interrompre sa grossesse — un impératif si elle voulait continuer ses études —, a tout récemment été adapté au grand écran par la cinéaste Audrey Diwan.

Le film, qui a remporté le Lion d’or l’automne dernier et qui est toujours à l’affiche dans certaines salles, nous montre comment la honte que ressent la jeune femme laisse place à une angoisse grandissante au fil des semaines qui passent. Avec une bombe à retardement au ventre, Anne (Anamaria Vartolomei) n’a d’autres choix que de se défaire de son secret pour trouver de l’aide, ce que tout le monde lui refuse. Entre un médecin cruel et des amis qui n’osent pas intervenir de peur de finir en prison, elle se retrouve seule, impuissante devant un destin qu’elle refuse.

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Surtout, L’événement, qui est ponctué de scènes extrêmement difficiles à voir, met en images ce que des organismes tels qu’Amnistie internationale ne cessent de répéter : interdire l’avortement ne l’éradique pas, ça ne fait que le rendre dangereux. Anne, comme tant de femmes, est déterminée au point de mettre sa vie en jeu.

Au Canada, la Cour suprême a complètement décriminalisé l’avortement en 1988, mais l’idée que ce droit soit retiré ou limité continue d’inquiéter des femmes qui observent ce qui se passe ailleurs dans le monde. Si une quinzaine de pays interdisent encore en totalité les interruptions volontaires de grossesse, elles sont aussi inaccessibles dans bien d’autres territoires, chose que l’Organisation mondiale de la santé voit comme « un problème majeur de santé publique » et « une violation d’un éventail de droits humains ».

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Pour réfléchir en pleurant

Geneviève Morin, une des figures des vagues de dénonciations qui ont déferlé sur le Québec ces dernières années, a fait paraître chez Québec Amérique son premier roman, Traité de paix pour les femmes aliens. Cette autofiction parsemée d’une analyse féministe de la saga Alien, le sujet du mémoire de maîtrise de l’autrice, donne beaucoup dans la guérison… après les « pute » et les « conne » lancés aux petites heures du matin.

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Après la violence, qu’est-ce qu’il y a? On a souvent la réponse du côté de la personne dénoncée, qui s’exprime au travers des entrevues exclusives et quelques publications sur les réseaux sociaux, mais rarement a-t-on accès à la reconstruction de celle qui a dénoncé (ou, dans ce cas-ci, d’une de celles). Geneviève Morin nous invite dans des séances de thérapie, dans des réflexions intimes et dans le processus de guérison d’une personne codépendante qui ne sait plus qui elle est.

Au-delà de ce regard, le livre nous ramène inévitablement à la violence faite aux femmes. En 2021, au Québec, il y a eu 26 féminicides; un (tragique) record en 13 ans. Statistique Canada rapporte que les crimes violents ont de manière générale diminué au pays, à l’exception des crimes sexuels envers les femmes qui sont en augmentation. SOS violence conjugale a connu une hausse de son volume d’appel avec la pandémie et les confinements.

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Même si débattre de l’idée même d’égalité des sexes n’est plus très actuel, que l’avortement est légal et la contraception accessible au Canada, force est de constater que les luttes pour les droits des femmes sont encore nécessaires.