Murdochville : Faire renaître l’Eldorado gaspésien
Murdochville, c’est une histoire de hauts et de bas fondée sur l’attractivité de son emplacement pour des raisons qui varient : les adeptes de plein air y viennent pour accéder au terrain de jeu des Chic-Chocs, et l’industrie minière convoite son sol riche en cuivre. Murdochville, cette petite ville de la Gaspésie autrefois pleine de vie, vit un paradoxe. On l’a déjà appelée la « ville de l’hospitalité », et pour les anciens du coin, c’est encore un endroit où « tout le monde se connaît, tout le monde s’aide ». Mais le cœur de la ville, qui battait autrefois au rythme des foreuses et des pelles de la mine de cuivre, a pris un coup avec la fermeture de celle-ci. La prospérité des années 60 est bien loin derrière.
À l’époque, Murdochville c’était 5200 personnes, une vie sociale intense, et une ambiance digne des plus belles cartes postales. « La ville la plus riche en Gaspésie », tout simplement. La Noranda, la compagnie minière, prenait soin de ses employés. Elle avait construit l’aréna, un centre de ski, les écoles, bref, elle assurait une qualité de vie qui aujourd’hui fait partie des légendes racontées aux plus jeunes. À l’époque, on comptait trois équipes de hockey dans la ville. Aujourd’hui, on peine à en former une seule. Les écoles autrefois bondées voient leurs salles de classe à moitié vides.
Puis, en 2002, le coup de grâce : la mine ferme, et la population chute dramatiquement. La décision divise. Certains partent pour les grandes villes, d’autres restent, déterminés à faire perdurer leur ville coûte que coûte. « La fermeture de la mine a divisé la population », raconte un ancien. Ceux qui sont restés sont restés par amour pour leur ville, une sorte de fidélité teintée de nostalgie, bien décidés à ne pas laisser tomber ce qui fut un Eldorado.
Malgré tout, Murdochville refuse de se laisser enterrer. Guillaume, un entrepreneur visionnaire, débarque avec des idées pleines de promesses : revitaliser la ville par le plein air, notamment grâce au ski. Il faut dire que les montagnes de Murdochville offrent des pentes parfaites pour les amateurs de glisse. Guillaume voit en ces montagnes un potentiel touristique inexploité, une opportunité de faire revivre l’économie locale avec des activités sportives et un tourisme axé sur la nature.
Et ça marche! Peu à peu, le ski attire du monde, et Murdochville se refait une réputation, loin du domaine minier, comme une destination de plein air. Mais même avec cet élan positif, un retour de la mine plane encore dans les esprits.
En effet, un nouveau projet de réouverture de la mine de cuivre commence à germer. Certains habitants sont emballés : ils voient là une chance de raviver le passé glorieux de Murdochville, avec des emplois bien payés et une possible croissance économique. Mais tout le monde n’est pas de cet avis. La réouverture divise de nouveau, non pas cette fois pour des raisons de survie, mais pour des raisons environnementales. L’opposition grandit, notamment chez ceux qui redoutent les impacts écologiques de la mine sur la région, les risques pour les ressources en eau, et la destruction des paysages.
Cette dualité entre l’héritage minier et la transition écologique résume parfaitement le dilemme moderne de Murdochville. D’un côté, l’histoire de la ville est profondément liée au cuivre; de l’autre, la population change, et certains voient en Murdochville un nouveau havre de tranquillité et de nature. Ils ne veulent pas voir cette renaissance compromise par les camions de minerai et les foreuses.
La vidéo ci-haut capture cette réalité complexe, où l’ancien et le nouveau coexistent tant bien que mal.
Elle montre la résilience des habitants, qui se battent pour ne pas voir leur ville disparaître. Chacun y va de son anecdote : les partys qui s’étiraient du vendredi au dimanche sans se coucher, le parc de la 5e rue rempli de jeunes, les maisons où les portes restaient déverrouillées, symbole d’une confiance révolue.
Le retour d’une possible exploitation minière laisse présager un débat enflammé au sein de cette petite communauté de 1000 âmes. Mais Murdochville a l’habitude de relever des défis. Reste à savoir si elle continuera dans sa lancée vers le plein air et l’écotourisme, ou si elle reprendra son casque de mineur pour redescendre dans les entrailles de la terre.
Dans tous les cas, la ville garde une place bien spéciale dans le cœur de ses habitants et de ceux qui ont un jour arpenté ses rues ou ses montagnes. Et peut-être que, grâce à un équilibre entre tradition et modernité, Murdochville réussira son pari : prouver que même loin des grands centres, une communauté peut renaître.
C’est une histoire de vitalité retrouvée, de cohabitation entre la couleur des vêtements de sport des skieurs et la lueur des métaux qui nourrissent l’idée d’une nouvelle mine, sur le fond blanc de la neige qui traverse les époques.