Le pro 1600 : Redorer les petits épiciers
« Il faut passer dans les épiceries de quartier. Le monde s’habitue trop à la grande surface, à faire un one-stop shop. » C’est comme ça que Youssef, propriétaire de l’épicerie Le Pro 1600 dans Villeray, à Montréal, n’hésite pas à faire son pitch pour les petites épiceries.
Il sait que, derrière les supermarchés géants où tout est à portée de main, il y a un besoin pour des produits frais et de qualité qu ’on trouve plus difficilement ailleurs. Oui, chez Youssef, c’est de la papaye et des mangoustans bien juteux qu’on déniche, pas juste une palette de pommes génériques.
Un acheteur dans le sang
Youssef, 34 ans, n’a pas toujours été propriétaire d’un commerce de détail. Avant, il faisait de la vente en gros de fruits et légumes pour des restaurants, développant des relations avec les importateurs-exportateurs.
Il en connaît donc un rayon sur ce qui fait un bon produit : la couleur du raisin qui indique qu’il est bien croquant ou la racine d’une laitue qui ne doit pas être rouge – des détails qui font toute la différence.
Après quelques années dans la distribution, il décide de se lancer dans la vente directe avec un but en tête : « faire du haut de gamme à bas prix ». Et pour lui, tout est dans la qualité du produit. « Je peux me vanter que j’ai les meilleures papayes à Montréal. On les paye plus cher, mais vraiment, un délice. »
Le one-man-show de l’achat
Le quotidien de Youssef, c’est un marathon constant entre les palettes de patates, les caisses d’oranges, et les importateurs qui l’appellent dès que de nouvelles bananes Manzano sont disponibles. « Amigo, bring me this pallet down, please », lance-t-il, entre deux courses au Marché Central. C’est un peu le DJ des fruits et légumes : il choisit ses produits avec la précision d’un collectionneur, compare les types de raisins, examine les laitues avec minutie. Bref, c’est du sérieux.
Il sait que la réussite de son commerce tient dans ses choix d’achats : « On fait l’argent quand on achète, pas quand on vend. » C’est pourquoi il est toujours sur le qui-vive pour avoir les meilleures aubaines.
Pour lui, chaque journée commence par une chasse aux bons deals, et ça demande des contacts, du marchandage, et un amour des relations humaines. « Ce que j’aime, c’est marchander. J’aime l’achat, j’aime les relations humaines. »
Quand les réseaux sociaux s’en mêlent
Quand Youssef s’est mis à vendre des fruits exotiques, il n’y avait pas encore la folie Instagram autour du pitaya et autres douceurs tropicales. « Il y a six, sept ans, personne ne ramenait de mangoustans. J’ai encore des vidéos de ce temps-là, personne ne savait c’était quoi à Montréal. » Aujourd’hui, grâce à Instagram et TikTok, son petit commerce a explosé. Youssef le dit sans détour : les réseaux sociaux ont aidé son commerce de quartier à se faire connaître bien au-delà de son coin de rue.
Sa stratégie est simple : garder les prix compétitifs pour attirer ceux qui, autrement, fonceraient dans les grandes surfaces. « Mon objectif : être agressif dans les prix. Pouvoir compétitionner avec les grands noms dans une petite surface. »
Le défi est de taille, car la plupart du temps, les petites épiceries peinent à suivre les prix des grandes bannières. Mais Youssef persiste et réussit à fidéliser ses clients, qui reviennent pour ses bons prix et ses produits de qualité.
La passion de la proximité
Quand on parle à Youssef, on comprend vite qu’il ne fait pas ça uniquement pour les profits. Il souhaite bâtir une relation avec ses clients, une proximité qui va au-delà de la transaction. Il ne vend pas juste des patates ou des oranges, il vend un rapport humain, un savoir-faire de quartier. Il veut que Le Pro 1600 devienne une référence, un endroit où on sait qu’on trouvera ce qui est bon et ne nous coûtera pas un bras ni une jambe.
En gros, quand Youssef nous recommande de passer dans les épiceries de quartier, il sait de quoi il parle. À force de composer avec des palettes de fruits et de verdure, il a bâti un petit empire de fraîcheur au cœur de Montréal, prouvant qu’un commerce de proximité peut offrir la qualité et les prix sans compromis.