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Il faut bien commencer quelque part. En ce qui concerne votre carrière, c’était peut-être dans un Ardène ou une piscine municipale: vous aviez tout juste 16 ans, envie d’impressionner votre patron, et déjà une bonne idée de ce que vous alliez faire avec votre premier chèque.
Et puis en quelques jours, vous avez découvert que le monde du travail était très différent de ce que vous imaginiez.
Qu’avez-vous retenu de votre premier emploi? Y avez-vous acquis une éthique de travail qui vous suivra jusqu’à la mort? Ou bien gardez-vous le souvenir douloureux d’un été passé à se faire ramasser par des Karen? C’est ce que j’ai demandé à sept personnes, qui ont toutes spontanément eu le même sourire nostalgique quand je leur ai posé la question.
Aden, apprenti électricien à 19 ans
«ce qui est primordial, c’est de bien s’entendre avec ses collègues.»
«Honnêtement, j’ai appris qu’au travail, le plus important, ce n’est pas forcément de bien faire son travail! Personne ne vous apprend ça à l’école, mais ce qui est primordial, c’est de bien s’entendre avec ses collègues. Il faut travailler à peu près aussi fort qu’eux. Pas plus, pas moins. Si tu en fais trop par rapport aux autres, ça va finir par se retourner contre toi.
Ceux qui montent dans les échelons, ce sont ceux qui ont développé des amitiés avec des collègues mieux placés. Ça n’a jamais menti. J’ai retrouvé ce phénomène dans toutes les jobs que j’ai eues après.»
Josette, secrétaire à 18 ans
«Je croyais naïvement que tous les professionnels savent exactement ce qu’ils font. Or, moi, j’étais vraiment nulle pour taper rapidement à l’ordinateur, et cette compétence ne m’est pas apparue comme par magie!
Je suis restée là à peine un mois, mais j’ai quand même retenu une chose toute bête: quand on travaille loin, il faut bien prévoir son moyen de transport d’avance. 15 ans plus tard, certains matins, je ressens encore le stress d’arriver en retard au travail, car mon frère prenait trop son temps pour me lifter en scooter.»
Olivier, emballeur de savons à… 7 ans?!
«J’habitais vraiment dans le fond de l’Estrie. Mes parents cherchaient de quoi m’occuper pour les vacances. Mes voisins cherchaient quelqu’un pour emballer les savons. Et c’est comme ça qu’a commencé mon CV!
Franchement, je n’ai pas retenu grand-chose, à part que «travailler, c’est looooong!» Et puis, si tu me demandes d’emballer un savon aujourd’hui, je suis encore capable de te faire ça rapido.»
Agnès, préposée au courrier à 16 ans
«C’était avant l’avènement d’internet, quand il fallait livrer les messages internes d’un bureau à l’autre à longueur de journée. C’est plate à dire, mais ce que j’ai retenu, c’est que je voulais étudier longtemps pour ne pas faire ce métier-là toute ma vie! Je détestais vraiment ça.
«ce que j’ai retenu, c’est que je voulais étudier longtemps pour ne pas faire ce métier-là toute ma vie!»
Ma deuxième job était plus intéressante. J’accompagnais des enfants qui voyagent seuls pour qu’ils se rendent bien à destination. Par exemple, j’allais les chercher à la descente de l’avion, et je faisais en sorte qu’ils prennent le bon bus ou le bon train. C’est surprenant, mais en été, il y avait BEAUCOUP d’enfants à gérer. Et comme les cellulaires n’existaient pas, il fallait toujours trouver une cabine téléphonique pour mettre à jour la coordonnatrice. Je me souviens encore à quel point cette dame-là était calme et parlait clairement.
Depuis, tout au long de ma carrière, j’ai toujours aspiré à être une aussi bonne communicatrice qu’elle. Pour que ça fonctionne, il faut transmettre toutes les informations à ses collègues, et le faire le plus efficacement possible à chaque fois.»
Colin, vendeur de glaces au Festival international de jazz à 16 ans
«J’ai découvert que si on travaille de très longues heures, on se met à rêver de son travail et on n’en sort plus jamais! Je crois que ça a orienté la suite de ma carrière: éviter les jobs répétitives avec des shifts interminables, pour ne plus jamais rêver de glaces Häagen-Dazs et d’avalanches d’argent rangé en pagaille dans mon tablier.
Ah oui! Et j’ai aussi retenu que les gars tippent beaucoup plus quand ils sont dans une date. Tout seuls, ils sont un peu radins. Mais pour impressionner leur partenaire, ils vont t’en mettre plein les poches.»
Camille, préposée à l’inventaire à 19 ans
«On ne travaille pas pour faire plaisir aux autres, mais pour se donner les moyens d’accomplir nos propres projets.»
«Je ne sais pas à quoi je m’attendais, mais j’ai retenu que travailler, c’est très différent de l’école! D’un côté, tu réfléchis intensément pour passer des examens super difficiles, pour avoir des bonnes notes, pour faire plaisir à tes parents. De l’autre, tu scannes des codes barres pendant des heures. T’as pas vraiment le choix, il faut que ce soit bien fait sinon tu perds ton travail.
Je crois que ça m’a donné le sens des responsabilités. On ne travaille pas pour faire plaisir aux autres, mais pour se donner les moyens d’accomplir nos propres projets.»
Flore, monitrice de camp de jour à 15 ans
«Tu penses qu’au travail, quelqu’un va te dire quoi faire et être responsable de toi. Mais non! À ce camp de jour sous-financé dans un petit village, le plus vieux de nous trois avait 17 ans, et on s’est débrouillés nous-même sans trop savoir ce qu’on faisait.
Heureusement, je n’ai jamais eu d’autre emploi aussi sketch par la suite. N’empêche, peu importe où tu en es dans ta carrière, il demeure toujours une part d’improvisation. Même en vieillissant, on reste toujours un peu l’ado qui n’a aucune idée de ce qu’elle fait!»
Qui a dit que les ados n’ont pas de sagesse? En réalité, tout ce qui leur manque, c’est un peu plus d’expérience. Pensez-y, la prochaine fois que vous croiserez un petit jeune dont c’est clairement la première journée. Et vous, qu’avez-vous retenu de votre premier emploi?