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Votre côté perfectionniste vous pousse-t-il à procrastiner?

Parfois, on veut tellement bien faire les choses qu'on finit par ne rien faire du tout.

Par
Malia Kounkou
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Je me suis longtemps crue paresseuse.

Après tout, par quel autre adjectif désigner le fait de commencer à 22h30 un projet dont le deadline est à minuit? Ou encore, repousser au lendemain, puis au surlendemain, puis au siècle suivant une tâche minuscule qui aurait pu être effectuée en trois minutes? Ou même devenir l’experte internationale des excuses vaseuses pour travaux non remis à temps (à date, ma grand-mère en est à son dix-septième enterrement)?

La paresse et le dernière minute ont toujours fait partie intégrante de mon ADN. Du moins, c’est ce que je pensais.

De la paresse à la frénésie

Et puis quelque chose m’a mis la puce à l’oreille: j’ai parfois un blocage pour commencer, mais quand j’arrive enfin à me plonger dans le boulot, je parviens difficilement à m’arrêter.

Se faire violence pour commencer le travail fait réaliser deux choses. Premièrement, ce qui semblait être une montagne n’est finalement qu’un simple dos d’âne. Deuxièmement, dès lors que le danger est apprivoisé, les idées se mettent à fuser par milliers.

Comment pouvait-on être à la fois paresseuse les jours pairs et minutieuse les jours impairs?

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Mais je ne suis pas au bout de mes peines. Car même à fond dans le travail, de nouveaux obstacles se dressent sur ma route. Avez-vous déjà écrit, corrigé puis réécrit (puis recorrigé) la même phrase pendant deux heures? Si oui, alors vous connaissez la frustration de relire un texte qui ne semble jamais assez bon, intelligent, poétique, percutant, fluide…

Parfait, quoi.

Et tant que cet état de pureté n’est pas atteint — newsflash, il ne le sera probablement jamais – nos neurones ne nous laissent aucun répit.

En quête d’une perfection parfaite

Arrivée à ce stade, j’étais confuse. Comment pouvait-on être à la fois paresseuse les jours pairs et minutieuse les jours impairs? Y avait-il une science derrière ce comportement contradictoire? Apparemment, oui. Et quelques séances bienfaitrices de thérapie m’ont même permis d’y mettre un mot: le perfectionnisme.

Pourquoi refaire… lorsqu’on peut tout simplement ne pas faire?

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Tout comme son nom l’indique, le perfectionnisme est la quête de la perfection en toute chose. Dans cet état d’esprit, rien n’est jamais définitif et tout est améliorable. Chaque acte doit aspirer vers un idéal le plus souvent inatteignable, mais vers lequel on tend quand même le bras, dans l’espoir futile de l’effleurer.

De cette quête naît un esprit critique incapable de satisfaction ou d’autojugement positif. Pour une personne qui en souffre — mine de rien, c’est une plaie au quotidien — peu importe les commentaires extérieurs positifs que recevront leurs travaux, tout leur semblera constamment mauvais et à refaire.

Vient alors la question à un million de dollars! Celle que les serial procrastinateurs-slash-perfectionnistes en chef se répètent: pourquoi refaire… lorsqu’on peut tout simplement ne pas faire? Dans cette interrogation réside toute la mécanique de ce comportement. Après tout, si on a peur d’être médiocre, pourquoi s’en donner l’occasion ?

Et ainsi vient l’immobilité.

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La paralysie incontrôlable

Nombreux pensent que les personnes agissant de la sorte le font par simple caprice. On les imagine chaque matin devant leur miroir faire le serment de ne pas bouger d’un seul orteil pour le restant de la journée. La réalité est tout autre.

On se dévalorise en se comparant aux autres qui, eux, réussissent en un claquement de doigts là où un effort presque surhumain nous est nécessaire.

Dans ce raisonnement se cache une peur intériorisée. Dans cette immobilité, une paralysie incontrôlable qui se déclenche dès lors qu’une tâche nous paraît plus immense qu’elle ne l’est en réalité. En effet, si la tâche nous paraît colossale, comment pourrons-nous y exceller? C’est alors que le cerveau panique et se braque. Toutes techniques de distraction sont ensuite bienvenues pour repousser cette échéance à l’infini (comme réécouter The Office pour la sixième fois de l’année au point d’en connaître chaque scène de Jim et Pam par cœur).

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Puisqu’un malheur ne vient jamais seul, cette paralysie s’accompagne toujours de dommages collatéraux. Le premier répond au nom de l’anxiété. Ignorer ses responsabilités ne les rend pas invisibles et leur ombre nous pèse souvent sur la conscience. On réfléchit à tout ce que cette prise de retard implique pour les autres: colère, impatience, incompréhension, dose de travail croissante… puis on entame la saison trois de The Office pour éviter toute autre activité cérébrale.

Le second dommage collatéral est une culpabilité terrible. Où qu’on aille et quoi qu’on fasse, elle nous suit et nous ronge. On pense à ceux qui ont cru en nous pour un travail que cette paralysie nous pousse à saboter. On pense à tout ce qui dépend de notre boulot et qui ne pourra pas être fait tant que notre esprit ne sortira pas de cet état. On se dévalorise en se comparant aux autres qui, eux, réussissent en un claquement de doigts là où un effort presque surhumain nous est nécessaire.

Et puis on se dit: est-ce que je vais être comme ça toute la vie?

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Contourner ce mal

La réponse honnête serait: oui. Celle optimiste? Peut-être que non. C’est vers celle-ci que nous allons pencher, car face à ce mal qui pétrifie, quelques hacks existent pour regagner une certaine productivité. Voici trois d’entre eux qui, jusqu’à ce jour, continuent de m’aider.

«Chaque obstacle est à la hauteur de notre force.»

Tout d’abord, les listes. Je ne saurais dire à quel point ce procédé si simple m’a sauvée. Lorsque je me retrouve confrontée à une tâche aux abords insurpassable, je prends une feuille et un stylo, puis j’énumère tout ce qu’il me faudra faire pour en venir à bout. N’ayez pas peur d’aller tout au bout des choses quand vous vous livrez à cet exercice.

Si se lever d’une chaise comprend de se redresser, s’appuyer à l’accoudoir, se tenir sur un pied et puis sur l’autre, alors l’action «se lever d’une chaise» est constituée de quatre étapes. Aussi simple que ça. Disséquer ainsi les choses à faire rendra non seulement la route moins monstrueuse, ainsi que la ligne d’arrivée plus proche.

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Vient ensuite ce que j’appelle «les petites célébrations». Vous avez parfaitement cuit votre bacon ce matin? Félicitez-vous! Vous avez monté les longues marches de métro jusqu’au bout au lieu de prendre l’escalier roulant? Faites-vous une ronde d’applaudissements!

Le but de cette démarche est de reconnaître les petits exploits que nous faisons au quotidien et que notre jugement catégorique minimise constamment. À terme, cela nous apprend à nous satisfaire des petites choses pour mieux apprécier ensuite les grandes, aussi imparfaites soient-elles.

Enfin, il est crucial de vaincre son syndrome de l’imposteur. Plus facile à dire qu’à faire, c’est bien vrai. Sauf que cette étape n’en reste pas moins une des plus importantes.

La source même du blocage réside dans la certitude absolue que nous ne sommes pas à la hauteur de ce qui se présente à nous. Et là, je citerai ma grand-mère (qui est toujours en vie, d’ailleurs) en disant: «Chaque obstacle est à la hauteur de notre force». Partant de cette logique, nous comprenons alors qu’aussi haute la montagne puisse-t-elle sembler, elle reste sur mesure et donc à la hauteur de nos capacités. Puis, même avec tous nos efforts, si nous n’arrivions toujours pas à la surpasser, c’est qu’elle était porteuse d’une précieuse leçon.

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