Méchant sujet, hein? C’est difficile de passer à côté de la politique, mais en même temps, comme parent, on n’est pas toujours à l’aise de se mettre à expliquer le concept de démocratie constitutionnelle parlementaire à nos enfants.
En même temps, on a envie d’en faire des citoyen.ne.s allumé.e.s et impliqué.e.s. Mais à quel âge peut-on commencer à avoir des discussions sur le sujet? Et surtout, comment faire pour que ce soit efficace (et pas super lourd)?
J’ai appelé Stéphanie Gaudet, professeure à la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa et spécialiste de la citoyenneté des enfants et des jeunes, pour avoir son input sur l’épineuse question.
Voici six conseils pratiques qui devraient vous éclairer un peu.
Reconnaître la capacité politique des enfants
Apparemment, les enfants peuvent comprendre certains concepts politiques dès l’âge de 3 ans. Ça vous étonne?
Le problème avec l’éducation politique des enfants de niveau préscolaire et primaire, justement, c’est un peu ça : cette idée que les enfants sont trop jeunes pour comprendre.
« Les adultes voient les jeunes comme des citoyens en devenir plutôt que comme des citoyens à part entière, souligne Stéphanie Gaudet. Les jeunes ont une capacité de participer politiquement, mais il faut que les adultes reconnaissent qu’ils et elles sont capables de faire de la participation sociale dans leur cour d’école, dans l’espace public ou dans leur voisinage, par exemple. »
Tenir un conseil de famille
Pas besoin de concevoir la politique comme la grosse machine parlementaire pour initier nos enfants aux concepts de démocratie, de participation citoyenne et de collectivité! « La politique en général, c’est prendre des décisions pour le collectif », résume Stéphanie Gaudet.
Pour introduire les enfants à ce concept somme toute assez simple, on peut leur expliquer que dans une famille, on prend parfois des décisions de type démocratique, c’est-à-dire pour le bien de tou.te.s, comme celle de laisser le Xbox une heure à chaque enfant pour éviter la chicane, mettons.
Répondre à leurs questions sur l’actualité
Votre fille vous demande ce qui se passe en Palestine ou encore pourquoi il y a de la chicane au sujet de l’immigration chez les élu.e.s? Stéphanie Gaudet croit que notre rôle, en tant que parent, est d’abord de rassurer nos enfants. « Quand ils ou elles arrivent avec des questions, ça veut dire qu’ils sont prêts à en discuter », résume-t-elle.
Un peu comme pour les questions liées à la sexualité, la professeure ne suggère pas de nous lancer dans la présentation de concepts compliqués, mais plutôt d’adapter notre discours en fonction de leur âge. « Il faut comprendre que les enfants sont dans notre monde et qu’on ne peut pas les protéger de ce qui s’y passe », poursuit la professeure.
Faire attention au langage qu’on utilise
On peut ne pas être d’accord avec les politicien.ne.s, mais personnaliser les attaques, idéalement, on éviterait ça. « On ne critique pas des personnes, on critique des décisions », résume Stéphanie Gaudet.
Ce faisant, on montre à nos enfants qu’on peut vivre avec des gens qui ne pensent pas comme nous, mais aussi qu’on peut, comme citoyen.ne, contester leurs décisions.
Poser des actions collectives
Ramasser les déchets dans la rue, formuler une plainte à la municipalité, écrire une lettre ouverte dans le journal : tout ça, ce sont des formes d’action politique à petite échelle que les enfants peuvent comprendre — et appliquer.
Aller au-delà du concept de vote
Des simulations de vote et des élections de classe, les enfants connaissent bien ça. Ces activités ont un rôle important à jouer dans l’éducation politique de nos cocos, mais il faut se rappeler que pour des jeunes qui ne passeront pas à l’urne avant leurs 18 ans, le vote n’est pas nécessairement le point névralgique de leur engagement politique.
« Il faut qu’on intègre les jeunes dans des prises de décisions collectives, comme les prochaines activités à organiser dans la cour d’école, ou encore la manière de gérer la ruelle entre voisins et voisines », souligne Stéphanie Gaudet.
Ces processus permettent d’ouvrir des discussions nécessaires sur les valeurs. « Ce qui est important pour nous individuellement, ce n’est pas toujours ce qui est important collectivement, poursuit la professeure. On apprend à faire des compromis, qu’on n’a pas tous et toutes le même point de vue et qu’on vient de familles avec des valeurs différentes. »