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Une visite à la Biosphère pour l’exposition Zér0
Il y a quelques semaines, je suis allée visiter l’exposition Zér0 : les arts au cœur de la transformation écologique, présentée à la Biosphère jusqu’au 1ᵉʳ avril 2024. J’ai aussi eu la chance de discuter avec Virginie Francoeur, la commissaire chargée de l’exposition.
Laissez-moi vous retracer l’histoire de ce projet audacieux et engagé, alliant sciences et arts dans une optique de sensibilisation environnementale.
Immersion dans un projet hors du commun
Avant même d’avoir passé la porte de l’exposition, je suis accueillie par Symbiose résiduelle, une œuvre de l’artiste et chercheur Martin Beauregard. Cette dernière combine des matériaux et objets trouvés, des impressions 3D et des semences de sapins baumiers. Une première proposition qui laisse présager une exposition à la fois atypique et haute en couleur.
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L’oeuvre Symbiose résiduelle, par Martin Beauregard
Mais alors, l’exposition Zér0, qu’est-ce que c’est?
Comme l’indique son sous-titre : « Les arts au cœur de la transformation écologique », ce projet réunit dix artistes autour de la production d’œuvres faites à partir de matériaux recyclés et récupérés. Pour Virginie Francoeur et sa collègue Sophie Bernard, l’objectif est de mettre l’art au service d’un objectif : le zéro déchet.
Pour y arriver, l’équipe a décidé de créer une exposition immersive. Dans une ambiance tamisée, j’ai découvert une mosaïque d’œuvres singulières et étonnantes.
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L’oeuvre (C2H4)n, par Alexis Vaillancourt, Olivier Bonnard et Olivier Heaps-Drolet du studio Ascète
En entrant dans la pièce, impossible de passer à côté de l’immense arbre qui l’habite. Un arbre dans une salle d’exposition? Eh oui! Alexis Vaillancourt, Olivier Bonnard et Olivier Heaps-Drolet, du studio Ascète, ont donné vie à une sculpture d’arbre grandeur nature. Fabriqué à partir de rejets de plastiques impropres au recyclage conventionnel, cet arbre est « le signe de la vie, l’idée selon laquelle la nature peut aussi reprendre le dessus » pour la commissaire Virginie Francoeur.
Une fois la surprise de cette première œuvre passée, il m’en reste une dizaine d’autres à découvrir. Tous les médiums sont au rendez-vous : vidéo, peinture, photographie, poésie, sculpture et bande dessinée. Ainsi, l’équipe Zér0 a souhaité « éveiller différents sens », m’explique la commissaire.
L’ambition du projet réside dans cet alliage d’artistes et d’œuvres issus d’univers différents, un peu comme les fils multicolores du sombrero tressé de Jason Gillingham. Cette œuvre, placée au centre de la pièce, se présente comme une métaphore du mariage des différentes pratiques présentées ici. Malgré la grande variété de projets artistiques, tous s’assemblent de manière harmonieuse, unis par ce même fil conducteur de la sensibilité environnementale.
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L’oeuvre Dynamique non-linéaire, par Jason Gillingham
Une rencontre inattendue : celle des arts et de la science
Un visiteur attentif comprendra que derrière ce projet artistique engagé se cache un important dossier de recherche scientifique.
Lors de notre discussion, Virginie Francoeur me révèle que la genèse de cette exposition « s’inspire d’une recherche Équiterre menée avec ma collègue et professeure à Polytechnique, Sophie Bernard. L’objectif était de rompre avec la manière classique de communiquer des résultats de recherches. »
Cette recherche, qui portait notamment sur la réduction des emballages et des déchets alimentaires, recèle des données quantitatives et qualitatives précieuses sur le sujet. Cependant, l’équipe derrière cette recherche craignait que ces résultats soient perçus comme une surabondance statistique, peu lisible et ne proposant pas d’actions concrètes à l’échelle individuelle.
La posture rare de Virginie Francoeur, à la fois chercheuse et artiste, fait émerger l’idée d’allier science et art pour avoir une « vision plus large des enjeux climatiques » et révéler la complémentarité des deux disciplines.
Grâce à l’art, la démarche scientifique devient plus facile à comprendre pour les visiteurs de l’exposition. D’après la commissaire, il permet de « démocratiser les résultats de la recherche et de mieux sensibiliser la population. »
La dimension artistique ne camoufle toutefois pas le volet scientifique et éducatif du projet. On retrouve au cœur de l’exposition une réplique physique du bureau de recherche ainsi qu’un diaporama présentant les chiffres clés d’Équiterre.
Le fait d’allier ces deux forces incarne pour l’équipe de l’exposition une manière d’ouvrir le dialogue avec un public plus large, parfois mis à l’écart.
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L’oeuvre Décloisonner le dialogue, par Marie-Chloé Duval
Et après l’exposition?
Le projet Équiterre se veut tripartite : une recherche scientifique qui se déroule depuis 2021, une exposition artistique et, finalement, un impact citoyen sur les comportements et les habitudes des visiteurs.
Virginie Francoeur et ses collègues partagent une conviction selon laquelle « les arts sont un vecteur de changement écologique. » C’est ainsi qu’intervient la troisième partie du projet dans lequel se sont lancés les commissaires et leur équipe : sonder l’impact de l’exposition.
Cette professeure de Polytechnique me détaille ainsi ses objectifs : « On veut mesurer les émotions qui sont vécues pendant l’exposition et suivre les participants sur deux temps de mesure pour voir s’il y a un changement de comportement, suite à la visite. »
Pour ce faire, à la fin de l’exposition, chaque visiteur est invité à répondre à un court sondage sur ses habitudes de consommations, son rapport à la question environnementale et ses impressions sur la visite. Ces données quantitatives seront ensuite complétées par des vox pop, réalisées sur place par des étudiants participant au projet.
Les visiteurs sondés ayant accepté de fournir leur adresse courriel seront ensuite contactés pour que les chercheurs suivent leur évolution et l’impact de l’exposition sur le long terme. Les résultats de cette enquête seront présentés au public à l’automne prochain.
Mais quelle sera la finalité de cette démarche? Quelles sont ses motivations?
« Notre objectif, c’est de permettre à d’autres personnes de s’inspirer de cette démarche lorsqu’on parle de questions environnementales », répond Virginie Francoeur.
La volonté de la chercheuse serait ainsi d’ouvrir la voie à ce type de démarches pour d’autres sciences, mais aussi de continuer à rendre accessibles les recherches sur la question environnementale.
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Une partie de l’oeuvre Vers un nouveau dialogue, par Bernard Voyer
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Au-delà d’une belle expérience deux en un, l’exposition Zér0 est un projet riche de sens sur un sujet qui nous concerne tous. Alors, que vous soyez un scientifique chevronné ou un artiste dans l’âme, vous trouverez votre bonheur à la Biosphère jusqu’à la fin du mois de mars!