Une chaîne de courriels de l’UQAM qui dégénère, vue de l’intérieur

Par où commencer? Je pensais que l’UQAM avait tout donné après le retour du LIP DUB en 2019 … C’était bien mal la connaître. Parce qu’hier, sans avertissement, mes collègues ont su, une fois de plus, créer un moment inoubliable, autant pour nos yeux que pour le déodorant des techniciens en informatique de l’université.

Compte rendu d’un incident web qui a secoué le « monde » étudiant (du métro Berri-UQAM).

Tout a commencé par un beau mardi midi sans histoire. Hamid, un étudiant, voulait partager son mécontentement à l’administration en répondant à un courriel en provenance d’une adresse générique du Registrariat. Motif de la plainte? Son refus à un programme de deuxième cycle, attribuable selon lui à une «abrupte incidence» du système d’inscriptions à distance.

Peut-être guidé par une pointe de frustration (il s’agit d’une hypothèse, vu la teneur du courriel), le doigt de notre homme a alors malencontreusement glissé sur le bouton « REPLY ALL », propulsant ses doléances à l’administration, mais aussi à une liste de diffusion préprogrammée contenant les adresses courriel de l’ensemble des étudiants préautorisés à être admis au deuxième cycle, tous programmes confondus.

Des centaines d’uquamien.ne.s ont ainsi reçu le message de notre potentiel doctorant éconduit, des centaines d’uquamien.ne.s ont décidé de répondre à leur tour (j’ai arrêté le compte à 420 réponses, quel hasard). Pas étonnant venant des étudiant.e.s de l’UQAM toujours en quête d’attention, comme on le sait.

Tout de même, ce qu’on a pu apercevoir dans cette chaîne de courriel, c’est le summum de la répartie et de la créativité rédactionnelle du corps étudiant, à quelques exceptions près. Les membres de subreddits qui manipulent les marchés boursiers ont de quoi s’inquiéter.

Des quatre coins du campus (à distance), nous avons été témoin d’échanges de recettes de muffins (sans ingrédients spécifiques), de conseils d’horticulture pour sauver une pauvre plante (RIP) et de blagues (certaines moins bonnes que d’autres). Un jeune audacieux en a même profité pour se lancer dans le réseautage en partageant son compte Instagram… franchement.

(Oups c’est moi)

Cela dit, mon étoile du match va à celles et ceux qui ont tenté le tout pour le tout en saisissant la plateforme qui leur a été donnée pour trouver l’amour. Je ne leur souhaite que du succès, et un match.

Évidemment, ce grand sketch numérique n’a pas plu à tout le monde. Plusieurs ont demandé à être retirés de la chaîne, la trouvant dérangeante et peu pertinente. Si on peut aisément leur donner raison (après tout, l’opération a engendré des centaines de notifications non désirées), on notera au passage que celles et ceux qui ont réclamé la sainte paix l’ont souvent fait à l’aide d’un « répondre à tous », contribuant ainsi à alimenter la bête.

Par souci de transparence, je dois avouer que j’ai participé avec beaucoup d’enthousiasme à ce «dérangement numérique improvisé». Entre deux cours sur Zoom qui bogue la moitié du temps, je n’ai pas pu m’empêcher de saisir l’occasion d’un divertissement, ce qui m’a fait un bien fou.

D’ailleurs, certains étudiant.e.s ont remercié, à même la chaîne de courriels, les rédacteurs comiques pour ce beau numéro qui, en ces temps sombres et sinistres, ont mis un brin de soleil dans la journée. Ce semblant de vie étudiante aura permis à plusieurs de décrocher de leur routine habituelle : Lever, ordi, manger, ordi, toilettes, ordi, CHAÎNE DE COURRIELS QUI DÉGÉNÈRE, manger, dodo…. On le souhaite à tous.

Un groupe Facebook de soutien à l’instigateur involontaire de ce mouvement a aussi vu le jour dans l’espoir qu’il soit accepté au doctorat. Au moment d’écrire ces lignes, il cumulait déjà 848 membres et beaucoup de memes. Plusieurs ont même commencé à utiliser le hashtag #jesuishamid afin de dénoncer l’erreur bureaucratique qui aurait mené à son refus au doctorat. C’est peut-être pousser le gag un peu trop loin (j’aurais souhaité avoir le point de vue du principal intéressé, je n’ai toujours pas réussi à le joindre, j’espère sincèrement que sa soudaine popularité n’est pas trop lourde à porter) , mais bon, qu’est-ce qu’on a de mieux à faire au cégep des adultes?

Bref, même à distance, les étudiant.e.s de l’UQAM auront trouvé un moyen, encore une fois, de faire parler d’eux, en mal ou en bien… mais pour une bonne cause!

J’adore l’UQAM.