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Seriez-vous capable de vivre sans être complice des paradis fiscaux?
Pas besoin d’avoir vu de grands schémas qui relient des multinationales à leurs subsidiaires enregistrés dans des paradis fiscaux pour comprendre que le concept est complexe.
Et quand on suit les péripéties du protagoniste de la bédé Comment les paradis fiscaux ont ruiné mon petit-déjeuner, on comprend qu’il faut se lever de bonne heure si on veut se lancer dans le boycott de toutes les entreprises qui ont recours aux paradis fiscaux.
Pour être conséquent, le personnage créé par François Samson-Dunlop doit dire adieu à sa table Ikea, son iPhone, ses rides pourtant si pratique de Uber, ses jolis Converse – et même son yogourt Liberté – après avoir découvert que ces entreprises (ou leur compagnie mère) ont recours aux paradis fiscaux.
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Pour chaque multinationale exposée dans le livre illustré, l’auteur nous explique la mécanique derrière l’utilisation des paradis fiscaux. Des schémas qui semblent complexes, mais qui prennent tous leur sens une fois qu’on découvre les montants astronomiques qui ont pu être dissimulés.
Question d’être concept, j’ai pris un moment de mon petit-déjeuner pour discuter avec le bédéiste François Samson-Dunlop. Lui durant sa pause dîner en France, moi pas douché et en bobettes, nous avons exploré l’univers pas si complexe des paradis fiscaux.
«On ne peut pas s’extraire du système, parce qu’il est partout. C’est pourquoi on doit l’affronter.» – François Samson-Dunlop
C’est donc assis sur ma chaise et ma table IKEA, que j’ai discuté avec le bédéiste sur mon iPhone, entre deux bouchées de mon yogourt Liberté, qu’on s’est lancé dans cet entretien.
Qui es-tu, que fais-tu dans la vie?
Je suis François Samson-Dunlop, je n’aime pas particulièrement les étiquettes, mais on peut me qualifier de bédéiste.
Comment as-tu fait pour démêler cette bibitte que sont les paradis fiscaux?
En fait, mon personnage, c’est n’importe qui, ce n’est pas un spécialiste, ce n’est pas un journaliste, c’est tout le monde. Lui, il passe à travers ça, de la même manière que n’importe qui peut le faire. Réfléchir consciemment aux produits et services qui nous entourent. Ce personnage est un peu comme tout le monde, plus il rentre dans le sujet, plus il réalise qu’il y a quelque chose qui se passe. Et au fur et à mesure que son aventure avance, il se rend de plus en plus compte du système. Et de c’est de cette façon que les paradis fiscaux peuvent devenir très concret.
Les paradis fiscaux sont-ils difficiles à comprendre?
L’évasion fiscale, ce n’est pas si complexe que ça, ce n’est pas difficile à comprendre. Bon effectivement, les schémas utilisés pour contourner le fisc sont complexes, mais les résultats, eux sont concrets. Il suffit juste de creuser un peu pour susciter des débats, pour engager des discussions qui permettront de réaliser certaines choses. Et il n’est pas question de prendre un cours universitaire de trente crédits sur le sujet. Les 128 milliards de dollars d’Apple qui ont été dissimulés au fisc sont assez concrets et faciles à comprendre.
Considères-tu que malgré tous les scandales exposés depuis les dernières années, il y a une espèce d’indifférence face aux paradis fiscaux?
Il faut combattre cette indifférence justement. On considère souvent qu’on est noyé dans un surplus d’informations et on attend que les gens se lassent. Mais je crois profondément que peu importe d’où on vient, de quelle classe sociale on est, on est capable de se dire: là, ça suffit.
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Crois-tu que cette nouvelle génération de jeunes qui prend les choses en main avec des rassemblements pour la cause environnementale sera celle qui pourra mener à la conscientisation collective?
Assurément, et cette prise de conscience pour l’environnement n’y est pas exclusivement rattachée. Elle est rattachée à tout le système. C’est complètement lié justement. Et c’est très motivant. Reste que je n’ai pas le goût d’opposer les générations. Je crois qu’une peut nourrir l’autre. Le fait qu’on ait une jeunesse qui se lève, c’est bien, je crois que ça peut réveiller les gens d’autres générations.
Qu’est-ce qu’on peut faire pour éviter de participer à l’évasion fiscale dans notre quotidien?
D’abord, on ne peut pas changer nos habitudes de vie drastiquement. Il faut le faire progressivement et plus on le fait, plus c’est facile. Il ne faut pas que la tâche semble insurmontable. Une fois qu’on s’en rend compte, tout devient logique. Par exemple, si t’achètes un fruit bio, mais qu’il est suremballé, immédiatement, tu te dis que ce n’est pas logique avec mon intention de consommer bio pour réduire mon empreinte écologique. Ensuite, ce fruit n’est pas suremballé, mais il vient du Pérou. Encore là, c’est pas logique puisque l’empreinte carbone est trop élevée. Ce réflexe vient naturellement. La même logique devrait s’appliquer graduellement pour l’évasion fiscale et les paradis fiscaux.
En raccrochant, j’ai fermé mon Macbook et je suis allé prendre ma douche. Je me suis habillé et j’ai enfilé mes Converse avant de mettre mon sac à dos commandé sur Amazon sur mes épaules. Y a définitivement de quoi devenir fou à comptabiliser toutes les multinationales enregistrées dans les paradis fiscaux.