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Séparation #2 : quand un enfant perd son beau-parent

Comment survivre à une deuxième séparation ?

Par
Elodie Parthenay
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Se séparer lorsqu’on est parent, ce n’est jamais facile. La culpabilité qu’on peut ressentir vis-à-vis de nos enfants est si forte que, pour nombre d’entre nous, elle peut suffire à nous persuader de rester dans une dynamique de couple qui, pour différentes raisons, ne nous convient plus. Mais lorsque les enfants n’en sont pas à leur première séparation, comment peut-on alléger la situation?

Avoir peur

Pour Sandrine*, la fin abrupte de sa relation n’a pas été un aussi gros choc que la peur de traumatiser son enfant. « Je choisis d’être en couple, avec les risques émotionnels que ça peut impliquer pour moi », explique la Montréalaise, qui, après son divorce, n’a présenté qu’une seule personne à son enfant. « Mon fils, lui, n’a pas de pouvoir dans l’histoire. Donc, c’est notre responsabilité, à moi principalement, mais aussi à mon partenaire, d’en être conscients et d’agir de façon responsable. »

L’expérience de Sandrine, qui a elle-même vécu le divorce de ses parents lorsqu’elle était enfant, fait écho à une peur latente chez les parents séparés : est-ce que je peux faire vivre une nouvelle séparation à mon enfant sans le traumatiser?

« Il peut y avoir un sentiment d’abandon », confirme Nathalie Parent, psychologue.

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« Mais ce n’est pas en cherchant à l’éviter qu’on va aider l’enfant : c’est plutôt en l’accompagnant dans la résolution de ses émotions qui sont plus difficiles. Dans notre société, on veut éviter tout ce qui a trait au deuil — on veut que la personne ait de la peine le moins longtemps possible — mais il faut s’ajuster au rythme de l’enfant, à son deuil à lui. »

La peur, c’est la perte de repères, voire de reproduire un sentiment d’abandon déjà trop familier. C’est une situation que Florence* a vécu, lorsque son premier conjoint important après son divorce a décidé, après une période tumultueuse, de mettre un terme à leur relation.

« On s’était dit que si on se séparait, qu’il garderait une relation avec mes enfants, et à la place, il a complètement disparu. »

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Devant la détresse et l’incompréhension ressenties par ses trois garçons, la trentenaire, qui vit actuellement à l’étranger, a pris les choses en main. « Je leur ai envoyé une lettre, comme si elle venait de lui, pour leur expliquer pourquoi les choses s’arrêtaient. Puis des cartes pour leurs anniversaires, pour qu’ils se sentent toujours appréciés. »

Rester ou disparaître ?

Pour le parent comme pour le beau-parent, il peut être difficile de déterminer la bonne chose à faire. « Le père de mon fils est resté super proche de sa dernière conjointe, explique Sandrine. Ils font des activités ensemble avec mon fils, et je suis contente que mon coco puisse garder ce lien avec elle, au lieu qu’elle disparaisse de sa vie. » Pourtant, elle-même récemment séparée, elle a plutôt pris la décision inverse.

«Je ne voulais pas rester en contact avec mon ex, et que mon fils continue à vivre dans la même dynamique, tout en sachant que les choses étaient différentes. Je voulais un clean break. »

Est-ce qu’il y a de bonnes pratiques? Selon Nathalie Parent, « ça dépend du lien d’attachement qui a été créé avec l’enfant eti du moment. Si, par exemple, on est apparu dans la vie de l’enfant dès son plus jeune âge, et qu’on a été là pour trois, quatre, cinq ans, et que le lien est bon, je recommande de maintenir des relations. Surtout si le partenaire fait office de figure d’attachement solide pour l’enfant. »

Ainsi, on peut mettre en place une transition qui va permettre à l’enfant de vivre la situation de façon plus douce, sans perdre ses repères.

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Un point important à noter, c’est que ce conseil s’applique à des relations saines, et non conflictuelles. Mais, si la rupture ne permet pas que le contact soit maintenu, tout n’est pas perdu.

« À ce moment-là, il faut accompagner l’enfant dans le processus de deuil, explique la psychologue. On peut expliquer que parfois, on n’a pas les raisons, on ne sait pas pourquoi c’est arrivé, pourquoi cette personne-là est partie comme ça. Mais ce qu’on sait, c’est que ça arrive, malheureusement, et qu’on va accompagner l’enfant à vivre l’émotion. Et qu’il n’y aura personne qui remplacera cette personne-là, mais qu’on pourra développer d’autres liens d’attachement. »

Beaucoup de travail

Conjuguer un échec amoureux et l’impact émotionnel sur nos enfants peut mener à un immense sentiment de culpabilité. Pour éviter ces difficultés, certains parents peuvent être tentés de rester dans une relation qui ne fonctionne plus, ou bien simplement d’arrêter de dater.

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Selon Nathalie Parent, pour composer avec cette culpabilité, il faut commencer par faire la part des choses. « On est deux dans la relation, on n’en porte pas la responsabilité toute seule. Et je pense que c’est plus facile de se pardonner quand on a le sentiment d’avoir fait tout notre possible dans cette relation-là. Si on arrive à la séparation, c’est parce qu’il n’y avait pas d’autres issues. Quand on constate ce qui nous a conduit là, c’est plus facile d’être indulgent envers soi-même, de se pardonner. Et surtout, ce n’est pas pour blesser l’enfant, c’est pour notre propre bien. »

Alors, comment naviguer nos relations amoureuses dans le but de créer l’environnement le plus sain possible pour nos enfants? Selon Nathalie Parent, la première chose à faire est de prendre notre temps, autant pour introduire un nouveau conjoint qu’au moment de se séparer.

« La distance peut s’établir de façon graduelle, un peu comme la présentation initiale. On se voit un petit peu, de temps en temps, puis plus ça avance, plus les rencontres s’espacent. »

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De la même façon, si les choses sont difficiles dans notre relation, et qu’on en vient à envisager de se séparer, on gagnerait à ne pas rusher, et à envisager de consulter un thérapeute de couple. Dans le meilleur des cas, on a une chance de sauver notre couple. Et, même si on finit par prendre des chemins différents, cela peut nous aider à aborder notre nouvelle dynamique sur des bases plus saines.

*: les noms ainsi que les détails permettant d’identifier les personnes interviewées ont été modifiés.