Il n’y a pas que des couvre-visages sur les crochets dans l’entrée chez Marie-Joëlle Parent, il y a aussi des masques à gaz.
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La journaliste, auteure et désormais éditrice de contenu chez Pinterest installée à San Francisco assiste de sa fenêtre à des scènes de fin du monde. Sous ses yeux, les feux de forêt qui ravagent depuis quelques semaines la côte ouest américaine.
Pour la nouvelle maman d’un bébé de trois mois, c’est la goutte qui fait déborder le vase après des mois de pandémie. « J’ai accouché avec un masque. Et là, j’ajoute un confinement par-dessus un confinement », résume Marie-Joëlle, coincée chez elle avec sa famille en raison de la qualité de l’air épouvantable. « Déjà qu’on avait un code de couleur pour le déconfinement, là on en a un pour la qualité de l’air », soupire la jeune femme, qui partage quelques pans de cette réalité difficile sur les réseaux sociaux.
Le pire, c’est que San Francisco se remettait à peine de la pandémie, en ouvrant timidement certains commerces comme les barbiers et les salons de coiffure cette semaine. « Le masque est obligatoire tout le temps dehors et pas n’importe lequel », souligne Marie-Joëlle, qui enfile même un masque à gaz pour ne pas respirer l’air vicié, un mélange de fumée, de brouillard et de smog stagnant.
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Un glow orange apocalyptique rappelant le film Blade Runner est même apparu dans le ciel la semaine dernière.
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« C’est comme si le soleil ne s’était jamais levé. Quand la fumée est redescendue, ma voiture était pleine de cendre », raconte Marie-Joëlle, également la conceptrice/directrice de la collection 300 raisons d’aimer.
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Avant de s’établir à San Francisco, la Québécoise avait passé dix ans à New York, où elle a notamment collaboré à plusieurs médias.
Pour ajouter une couche (de cendre) à ses malheurs, Marie-Joëlle est actuellement en plein déménagement, à cause de la COVID. « On a appris qu’on retourne pas travailler au bureau avant un an et ça ne sert plus à rien de vivre à San Francisco avec des loyers de 5000$ par mois. Ça force plusieurs personnes à revoir leur mode de vie », constate Marie-Joëlle, qui déménage pour sa part à l’ouest de la Ville dans quelque chose de plus grand, où « l’air sera meilleur j’espère ».
Comme la situation demeure difficile à New York, elle se demande à quel endroit il ferait bon vivre présentement aux États-Unis. Assez pour même considérer un retour au Québec parmi les options. « L’autre grosse étape, ce sont les élections. S’il est réélu (Trump), ce sera terrible pour le moral de la moitié du pays », ajoute Marie-Joëlle, à qui il ne manquerait qu’un tremblement de terre pour couronner le tout.
« J’ai l’impression qu’on vit un preview de ce qu’on vivra sur terre dans dix ans si on ne fait pas de gros changements. »
Elle se console toutefois avec l’arrivée de bébé Henri – seul point positif de 2020 – même si sa famille ne l’a pas encore rencontré et qu’elle ne peut pas le promener en poussette à cause de la fumée. « J’ai l’impression qu’on vit un preview de ce qu’on vivra sur terre dans dix ans si on ne fait pas de gros changements. J’ai l’impression d’avoir complètement perdu mon innocence », confie celle qui – dans le contexte actuel – bout de rage en voyant des anti-masques faire la révolution sur la perte de leurs droits et libertés. « J’essaye de relativiser. Tout le monde est en santé et San Francisco est entourée d’eau, donc il n’y aura pas de feux ici » se console-t-elle, sur une note d’espoir.
Vancouver prise dans la «grosse boucane»
À environ 1500 kilomètres au nord, le décor de Nicolas Chevrier ressemble beaucoup à celui de Marie-Joëlle Parent au moment d’écrire ces lignes. C’est difficile à imaginer, mais les feux américains ont des répercussions jusque là.
Le Gatinois établi à Vancouver depuis deux ans n’a jamais vu la ville de cette façon. «D’habitude, je profite des fins de semaine pour aller en camping avec ma blonde pour profiter de l’air pur des environs, mais la fin de semaine dernière, on voulait même pas s’aventurer dehors».
On le comprend, étant donné que la «Silicon Valley» du Canada a connu l’une des pires qualités de l’air au monde au cours des derniers jours en raison des immenses brasiers qui font rage de l’autre côté de la frontière.
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«Quand on traverse un pont, on dirait qu’on est entouré d’un épais brouillard comme on le voit des fois à San Francisco. Mais non. C’est de la grosse boucane dense, explique le grimpeur assidu dans la vingtaine. On ne voit pas le haut des buildings autour de nous non plus. C’est un peu l’enfer», renchérit-il à l’autre bout du fil, cloîtré dans son véhicule pour prendre l’appel.
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«On se comptait chanceux de pas avoir eu de gros feux dans la région depuis les deux dernières années. Mettons que le karma nous a rattrapés vite».
Malgré la situation alarmante, Nicolas indique qu’il est possible de sortir dehors quelques heures sans nécessairement être attriqué d’une combinaison digne de Tchernobyl. «J’ai passé une partie de la journée à l’extérieur samedi sans masque ni rien et j’ai commencé à avoir le nez sec et un peu de misère à respirer vers le milieu de l’après-midi. C’est désagréable, mais je ne suis pas mort non plus», dédramatise un brin l’adepte de plein air.
Cette «crise» environnementale ne remet d’ailleurs pas en question le choix de Nicolas de demeurer à Vancouver pour un bon bout. «Le BC, c’est la place que j’ai choisi», résume-t-il en fin d’entrevue, faisant du même coup un clin d’oeil à un certain passage de la célèbre chanson Pour mon pays de Sir Path.