Au Québec, on est habitué de servir de repas aux moustiques et aux mouches noires. Ils bourdonnent autour de notre tête, on tente de les éloigner avec du chasse-moustique et mille et un mouvements de bras dignes des Grands Ballets Canadiens, mais ils réussissent quand même à arriver à leur fin (ou, dans ce cas-ci, à leur faim).
Malgré ce qu’on peut croire, ces insectes sont loin d’être les seuls capables de perforer notre peau tendre avec leurs dards et de créer une vilaine bosse. Comment savoir, en se réveillant un matin en plein milieu de la forêt, si ce monticule qui démange sur votre mollet est une piqûre de tique, d’araignée ou de frelon équatorial!?
Et puis après avoir identifié de quelle bête provient cette horrible entaille, on fait quoi avec?
Méfiance et prévention
«Faut se dire en partant que tous les insectes peuvent être dangereux pour l’humain. On ne sait jamais si vous pouvez être allergique à telle ou telle piqûre d’insecte. Donc il vaut mieux être vigilant», explique Sylvie Santerre, experte-conseil en prévention et sécurité à la Croix-Rouge. Cette vétérante du scoutisme connaît bien les traitements pour les piqûres d’insectes canadiens.
«Faut se dire en partant que tous les insectes peuvent être dangereux pour l’humain. On ne sait jamais si vous pouvez être allergique à telle ou telle piqûre d’insecte.»
«Une fois, je me suis fait piquer par une microscopique araignée rouge: mon doigt a tellement enflé que je n’ai plus été capable de le plier pendant 48 heures. C’est pas parce que c’est petit que ça ne peut pas avoir de gros impacts», raconte-t-elle.
Selon Sylvie, si on part pour une expédition ou une randonnée de quelques jours, c’est toujours une bonne idée d’avoir sur soi du chasse-moustique (évidemment), une crème qui calme les démangeaisons, des antihistaminiques (Benadryl et autres), et peut-être même un EpiPen.
On a tous et toutes un.e ami.e qui se vante de ne s’être jamais fait piquer par une abeille. Ce serait plate que le baptême de cette personne se fasse à 50 kilomètres du prochain refuge, et que sa gorge enfle soudainement à vue d’œil.
Pour prévenir les piqûres, la Croix-Rouge recommande aussi de porter des vêtements longs, clairs et serrés dans nos sorties extérieures. «Il y a des puristes qui disent de faire attention à ce qu’on mange, parce que semble-t-il qu’on goûte différent pour les moustiques selon notre alimentation… Mais ce n’est pas prouvé, donc nous, on n’en parle pas!», me dit-elle en riant.
Qui pique? qui mord ?
Si on exclut les réactions allergiques ou chocs anaphylactiques, les piqûres ou morsures d’insectes normales ne sont pas très dangereuses au Québec et au Canada en général.
Voici celles qui sont les plus à risque de vous faire du tort, et comment les traiter si jamais vous êtes loin d’une clinique ou d’un hôpital pendant quelques jours.
L’abeille
Cet insecte, dont la présence est souvent à l’origine de cris aigus n’est pourtant pas tellement dangereux (si on n’y est pas allergique, évidemment).
«Si le dard est encore là, vous allez le voir! Dans ce cas-ci, ce qu’il ne faut pas faire est d’essayer de le retirer avec une pince à épiler.»
Il n’y a pas grand-chose à faire pour une piqûre d’abeille, à part essayer de calmer l’enflure avec une crème anti-démangeaison. Selon Sylvie Santerre, les gens ont tendance à chercher furieusement le dard dans leur peau, après une piqûre d’abeille.
«Je vous le dis: si le dard est encore là, vous allez le voir! Dans ce cas-ci, ce qu’il ne faut pas faire est d’essayer de le retirer avec une pince à épiler. De cette façon, vous écrasez une petite poche sur le dard, qui contient le venin, et il se propagera encore plus dans votre corps. Il faudrait plutôt frotter le dard avec une carte de crédit pour essayer de le retirer doucement, par exemple.»
On s’entend que la quantité de venin que possède un dard d’abeille est microscopique, soit entre 50 et 100 microgrammes. Juste au cas où ça peut faire baisser de quelques décibels les hurlements que vous pousserez en voyant la bête en question sur la terrasse parsemée de fleurs que vous visiterez cette semaine.
La tique
Au Québec, c’est pas mal l’insecte qui doit vous faire faire le plus de cauchemars.
Une tique vous mord, elle ne vous pique pas. Ça ne fait pas mal, et vous pourriez très bien ne jamais voir que vous avez été mordu.e par cet insecte.
Premièrement, une tique vous mord, elle ne vous pique pas. Ça ne fait pas mal, et vous pourriez très bien ne jamais voir que vous avez été mordu.e par cet insecte. C’est ce que m’a confirmé Carl Dubois, porte-parole de l’Association québécoise de la maladie de Lyme.
Vous avez compris que la raison pour laquelle on n’a surtout pas envie de se faire rentrer une petite tête microscopique sous la peau, c’est par peur de contracter cette fameuse maladie qui entraîne une dysfonction corporelle et cognitive généralisée, entre autres.
«Ce ne sont pas les tiques qui sont dangereuses: c’est la bactérie qu’elles transportent, la Borrelia burgdorferi. On estime que 30 à 35% des tiques en sont porteuses au Québec», explique M. Dubois.
La raison pour laquelle vous pourriez ne jamais être mis au courant qu’une tique a profité de votre sang pour souper, c’est qu’elles peuvent être minuscules. La tique à pattes noires, par exemple, n’est pas plus grosse qu’une tête d’épingle. En plus, leurs morsures ne laissent parfois aucune trace.
«La tique peut rester facilement de 24 à 72 heures accrochée à vous. Lorsqu’elle sera gorgée de sang, elle se détachera, et c’est à ce moment-là qu’on verra parfois une rougeur sur la peau», explique Carl, provoquant instantanément des frissons tout le long de mon dos.
«Ce ne sont pas les tiques qui sont dangereuses : c’est la bactérie qu’elles transportent»
Sylvie Santerre, elle, fait du «copain-copain» en sortant des forêts ou des régions éloignées avec ses coéquipier.ère.s d’expédition. «Si on voit une tique sur un.e de nos partenaires, il ne faut pas essayer de l’enlever à tout prix. Si on écrase son corps, il y a encore plus de chances que la bactérie pénètre dans le corps de la personne», me dit Sylvie.
Il faudrait donc retirer la tique avec des pinces… à tiques. On peut en trouver pour une dizaine de dollars dans plusieurs magasins de détail. Il faut toutefois faire vite pour retirer l’insecte: plus elle reste longtemps agrippée au derme, plus il y a de chances de transmettre la maladie de Lyme.
Éviter de sortir des sentiers, de marcher dans des herbes hautes et de laisser votre peau à découvert vous aidera à ne pas vous faire mordre par ces petites pestes. Sylvie Santerre et Carl Dubois s’entendent pour dire qu’il serait mieux d’essayer de recueillir la tique et de l’apporter à l’hôpital pour faire une analyse.
Mais doit-on absolument consulter un médecin si on constate qu’une tique nous a mordus? Le porte-parole de l’Association québécoise de la maladie de Lyme penche pour un oui. «Étant le papa d’un petit garçon qui est atteint de cette maladie, je ne jouerais pas à la roulette russe si j’étais vous. Au pire, vous serez allés pour rien.»
Les araignées
Avant toute chose, il faut dire que les morsures d’araignées ne sont pas courantes au Québec, puisque les arachnides n’ont pas de crochets assez longs et pointus pour percer notre peau (ew). Une morsure d’araignée bénigne se caractérise par un gonflement, une inflammation et parfois des démangeaisons.
Toutefois, il existe deux espèces d’araignées venimeuses au Canada qui demandent une attention médicale plus sérieuse: la veuve noire du nord et la recluse brune.
Selon Sylvie Santerre, la morsure de la veuve noire provoque une marque rouge ronde et surélevée. Il peut aussi se former deux petits trous sur la peau qui ne mentent pas: c’est là que la bestiole a inséré ses crocs. En ce qui concerne la morsure de la recluse brune, on la reconnaît par une bosse remplie de sang, qui peut prendre la forme d’un œil de bœuf. Cela engendrerait de légers picotements, nous dit l’experte de la Croix-Rouge.
«La seule chose qu’on peut faire en attendant de consulter un professionnel de la santé, c’est de laver la piqûre à l’eau froide et d’y appliquer une crème antibiotique pour essayer de calmer l’enflure. D’habitude, ce n’est pas nécessaire d’appeler le 911 pour ça. En cas de morsure d’araignée, on appelle les secours quand l’enflure est tellement grosse que ça crée des problèmes respiratoires», affirme Sylvie.
Les hypocondriaques seront averti.e.s.
Les serpents
Ce message s’adresse à celles et ceux qui ont décidé d’aller découvrir le reste du pays en vacances cet été, faute de ne pouvoir s’évader à Bali ou à Barcelone.
Sylvie Santerre conseille de vous renseigner sur les serpents qui pourraient être présents dans les régions que vous visitez. «C’est plus commun d’avoir appris à adopter un comportement sécuritaire par rapport aux mammifères qu’on peut croiser en forêt, comme les ours. Si on se rend sur un territoire où il y a des serpents venimeux, il faut tout autant savoir comment éviter une rencontre avec eux», explique Mme Santerre. Surtout parce qu’un baiser de leur part serait un petit peu plus dramatique qu’une morsure d’araignée.
«Dans l’ouest du pays, on retrouve le crotale de l’Ouest. Il y a aussi le crotale des prairies en Alberta et en Saskatchewan. Et pour finir, le massasauga en Ontario. Si vous vous faites mordre par un serpent, vous le saurez automatiquement. Ça fait assez mal, et la perforation vient avec deux trous bien nets dans la peau,» dit l’experte de la Croix-Rouge.
Là, c’est le temps d’avoir du réseau cellulaire et d’appeler les secours, parce que le venin de ces trois serpents demande une assistance médicale rapide.
Là, c’est le temps d’avoir du réseau cellulaire et d’appeler les secours, parce que le venin de ces trois serpents demande une assistance médicale rapide. «Il y a rien qu’on puisse faire en premiers soins, à part garder le membre mordu à la hauteur du coeur (pour que le venin se propage le moins possible dans le corps) et retirer tous les bijoux, pour faire en sorte qu’ils n’aggravent pas une possible enflure.»
Juste pour votre information: pour prévenir les morsures de massasauga, le centre antipoison de l’Ontario suggère, entre autres, de ne pas plonger la main dans un trou dans la forêt. En même temps, si ce n’est pas pour aller y chercher une pile de lampe frontale que vous avez malencontreusement échappé, on se demande pourquoi vous auriez eu cette brillante idée.
Et finalement, Sylvie nous a donné un dernier conseil très sage: «Si c’est la première fois que vous vous faites piquer ou mordre par n’importe quel insecte, restez calme quelques minutes après. C’est pas le temps d’aller jouer une partie de soccer ou d’aller courir un marathon: le venin que l’insecte vous a injecté, aussi microscopique soit-il, se propagera plus rapidement dans votre système cardio-vasculaire si vous êtes actifs et actives tout de suite après.»
En plus, si vous êtes allergique sans le savoir, vous serez beaucoup plus facile à traiter en étant déjà assis.e quelque part qu’en étant évanoui.e.s dans les buissons.
Sur ce, faites attention à vous et ne lésinez pas sur les couches de bon vieux Watkins!