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Qu’est-ce que je fais si… je tombe dans un cours d’eau gelé?
La semaine dernière, le mercure avoisinait les -15 °C pendant quelques jours. Mais hier, dame Nature a encore fait son indécise et on se serait cru au beau milieu du printemps tellement il faisait chaud. Qu’à cela ne tienne, vos ami.e.s et vous avez décidé de faire votre game d’hockey annuelle sur le lac aujourd’hui.
Alors que votre équipe marque des buts coup sur coup, un événement semi-tragique se produit : la glace craque sous Jo, qui se ramasse immergé jusqu’au cou dans une eau frigorifiante. « Qu’est-ce qu’on fait?!! », capote vos coéquipiers. Vous savez déjà comment réagir si vous croisez un ours, donc une petite chute dans l’eau glacée, il y a rien là, puisque vous avez retenu assidûment les conseils qui suivent.
De rien à l’avance, Jo.
1-10-1 : la combinaison gagnante pour finir au sec et en sécurité
Avant même de poser le pied sur un plan d’eau gelé, il faut savoir que la couleur de la glace indique s’il est sécuritaire de s’y aventurer ou non. « Si elle est translucide, elle sera plus solide qu’une glace grisâtre. Même si on croit que la glace est assez épaisse parce qu’on l’a mesurée, ça peut être trompeur, car ça peut être plusieurs couches de petite glace mince accumulées au fil du temps, qui sont plus facilement friables et risquent de se briser » explique d’emblée Raynald Hawkins au bout du fil, le Wayne Gretzky de la prévention à la noyade qui occupe le poste de directeur de la Société de sauvetage depuis 31 ans.
Après avoir fait plusieurs recherches sur l’hypothermie, l’Université du Manitoba a établi la règle du 1-10-1 afin d’indiquer comment agir en cas d’immersion en eau glaciale. « Quand on tombe involontairement dans de l’eau aussi froide, on devient en état de choc, qui est souvent accompagné d’hyperventilation, explique l’expert. Selon cette technique, on a une minute [d’où le chiffre 1 de la combinaison] pour prendre le contrôle de sa respiration avant de perdre conscience. Il faut donc se concentrer le plus possible et ramener sa respiration à une cadence normale. »
Le 10 de la règle 1-10-1 représente le temps moyen où le corps bénéficie de 100 % de sa force musculaire. Dépassé ce seuil, il devient de plus en plus difficile d’utiliser ses bras et ses jambes pour s’extirper de l’eau en rejoignant le bord, se hisser sur une embarcation ou ramper sur la glace (on y reviendra), par exemple. « Si on n’arrive pas à se sortir du pétrin dans ces dix minutes, ça deviendra beaucoup plus difficile de le faire par la suite puisque le corps tombera en dépense énergétique majeure et que l’hypothermie suivra peu de temps après », prévient Raynald Hawkins.
Et finalement, le dernier chiffre de la combinaison indique l’heure, en moyenne, que ça prend pour perdre connaissance en raison du froid. « Ça dépend toujours du métabolisme, de l’état de santé de la personne et des vêtements qu’elle porte, mais si on reste trop longtemps dans l’eau, c’est sûr qu’on va tomber en hypothermie éventuellement », indique l’expert.
Le plus important, selon Raynald Hawkins, est de conserver la chaleur de ses organes vitaux le plus longtemps possible. Pour ce faire, le directeur de la Société de sauvetage suggère de se mettre dans une sorte de position foetale afin de « protéger les poumons et le cœur ». Si on est plusieurs à être dans l’embarras, l’expert conseille de prendre la position « caucus », afin que tout un chacun puisse jouir de la chaleur d’autrui.
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Différent plan d’eau, différentes façons de s’en sortir
Que l’on soit victime d’une bad luck sur un lac ou une rivière où il y a du courant, les marches à suivre diffèrent, explique Raynald Hawkins. « Lorsqu’on tombe dans un cours d’eau comme un lac, l’impact que crée le trou laissé par la glace va entraîner une petite vague qui brisera de la petite glace moins solide. Si on est capable d’avoir un point d’appui et de garder la tête hors de l’eau, il faut s’assurer d’avancer vers le bord tout en brisant cette mince couche de glace jusqu’à qu’on ne soit plus capable. Ensuite, lorsque la glace est assez solide, on sort ses deux avant-bras de l’eau et on fait aller ses jambes comme si on nageait le crawl afin de nous positionner à l’horizontale. On rampe avec ses bras et ses jambes sur la surface plus solide jusqu’à ce qu’on soit en sécurité. »
Dans un cours d’eau avec du courant comme une rivière par exemple, la stratégie varie un peu. « Il faut travailler en quelque sorte avec le courant, explique Raynald Hawkins. Il va pousser notre corps vers une certaine direction et venir briser la petite glace mince, ce qui peut aider à s’extirper de l’eau plus facilement. »
Si vous vous retrouvez malencontreusement sous la glace, priez pour que le courant vous emmène vers des rapides le plus vite possible. « En gros, il faut essayer de trouver une porte de sortie où la glace se brise », mentionne le spécialiste.
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Dans les deux cas, si on est témoin d’un incident de la sorte, il faut d’abord appeler le 911 et faire usage d’une « extension de portée », comme un bâton d’hockey, un foulard ou une rame, afin d’aider la personne à s’extirper de l’eau en lui offrant un appui. « On n’enlève pas tous les vêtements d’un coup, on emmène plutôt la personne à l’intérieur afin de la réchauffer graduellement avec des couvertures, insiste Raynald Hawkins. On ne donne pas de boisson chaude ni d’alcool, seulement un breuvage tiède pour la réhydrater tranquillement. »
En espérant que vous penserez à cet article à votre prochaine game de hockey annuelle et que votre ami Jo s’en remettra rapidement!