Quand j’étais plus jeune, ça m’a pris longtemps pour comprendre que ce que j’appelais « la » religion chrétienne était en fait une foule de branches réunies autour de la croyance en Jésus, mais avec une foule de différences. Bon, pour le petit Pier-Luc qui faisait ses cours de catéchèse, les différences se limitaient à « les prêtres catholiques ont de cool robes de sorciers, mais les protestants ont le droit de faire l’amour, fa’que je sais pas si ça vaut la peine, pour vrai ».
Finalement, les différences entre les nombreuses confessions chrétiennes sont un peu plus profondes que ça.
Mais parmi les nombreuses branches du christianisme, il y en a une qui est méconnue, mais qui a une ÉNORME influence sur le monde actuel (en fait, tellement énorme que j’ai écrit le mot en majuscules, imaginez!) : le gospel de la prospérité.
C’est quoi le gospel de la prospérité? Et surtout, pourquoi Donald Trump aime autant ça?
Bienvenue dans une vision du christianisme où Jésus aurait investi dans les statues en or.
Le gospel de la prospérité, c’est quoi?
Le gospel de la prospérité est né des mouvances charismatiques et pentecôtistes du christianisme. En passant, les charismatiques ne s’appellent pas comme ça parce que tous leurs prêtres ont une énergie bizarrement captivante et sexuelle à la Walton Goggins. Dans la bible, un charisme, c’est un don surnaturel accordé par le Saint-Esprit, genre Dieu qui te permet soudainement de parler l’espagnol ou de guérir la lèpre.
Certains prêtres se sont mis à croire qu’être très, très riches, ça pourrait aussi être un charisme offert par Dieu, et ça tombait plutôt bien, parce qu’ils avaient comme idée de demander à leurs dévots de faire des dons pour qu’ils deviennent très, très riches. Tsé, quand l’inspiration divine frappe.
Plus précisément, le gospel de la prospérité suppose que la richesse est un indice envoyé par Dieu pour confirmer que vous êtes sur le bon chemin, au même titre que la guérison et la bonne santé. Ainsi, Dieu récompense les bons chrétiens en les rendant très riches et pétants de santé.
Mieux encore ; si vous donnez à l’église et à votre pasteur, Dieu vous récompensera en retour. Dans plusieurs églises, on appelle ça « semer une graine » ; si vous êtes malade et/ou pauvre, donnez autant que vous pouvez, et Dieu vous le rendra au quintuple.
La doctrine de la prospérité enseigne aussi qu’il ne faut pas se contenter de mener une bonne vie ; il faut activement repousser les assauts de Satan, qui tente d’influencer la société avec ses idées perverses. D’ailleurs, si vous vous demandez pourquoi beaucoup de chrétiens anti-homosexualité ou antiavortement ne se contentent pas de vivre leur vie tranquillement, ben voilà une partie de la réponse : plusieurs d’entre eux croient qu’il est de leur devoir de combattre activement les « forces du mal ».
Comment c’est devenu populaire?
Le mouvement est devenu populaire dans les années 1970 et 1980, soit quand des prêtres ont saisi les nouvelles opportunités offertes par le pouvoir du câble, devenant les premiers télévangélistes.
Si vous avez vu, à la télé américaine, des extraits de prêtres qui crient des niaiseries, la face plus rouge que le vin de messe, devant un auditorium plein à craquer de croyants qui se roulent par terre comme un enfant qui vient de se faire refuser une carte Fortnite par sa mère, c’est ça.
Parmi les fondateurs de ce mouvement, on retrouve Kenneth E. Hagin, Gloria et Kenneth Copeland et Paula White.
(D’ailleurs, vous devez absolument regarder ce reportage incroyable où Kenneth Copeland engueule une journaliste qui lui demande pourquoi il arrête pas d’acheter des jets privés.)
Même si la doctrine de la prospérité est l’affaire la plus américaine de tous les temps, elle s’est quand même répandue dans de nombreux autres pays, notamment au Brésil.
Soyons clair : ce n’est pas l’ensemble des chrétiens qui appuient cette doctrine, loin de là. De nombreuses confessions religieuses ont dénoncé la théologie de la prospérité, soulignant qu’elle allait directement à l’encontre des écrits de la Bible où Jésus dénonce l’idolâtrie et assure que le Paradis est réservé aux pauvres.
Mais il n’en demeure pas moins que le mouvement a su s’implanter assez solidement, notamment parce que quand tu dis que ce sont les riches et puissants qui sont les favoris de Dieu… ben, les riches et puissants ont tendance à t’aimer.
D’ailleurs, parlant de riches et puissants…
Donald Trump et le gospel de la prospérité
À la surprise d’absolument personne, Donald Trump est un grand fan du gospel de la prospérité.
Paula White est d’ailleurs son amie proche ainsi que sa pasteure personnelle. Elle a notamment récité la prière lors de la première inauguration de Trump, en plus de rejoindre officiellement le cabinet Trump en 2019 comme conseillère sur les questions religieuses (ouin, la séparation de l’Église et de l’État, aux États-Unis, c’est lousse). En 2025, elle a été nommée à la tête du nouvellement créé White House Faith Office.
Qui est Paula White? Elle a été la cible d’une enquête du comité sénatorial des finances de 2007 à 2011, et le rapport final a conclu que son église avait dépensé les fonds récoltés auprès des fidèles de façon inappropriée, notamment pour acheter des jets privés et un condo de 3,5 millions USD dans la Trump Tower à New York (tiens, tiens!)
Et elle enseigne exactement ce que vous croyez : qu’en donnant à son église, vous vous attirerez les faveurs de Dieu, et que la richesse est un signe des faveurs que Dieu, ce qui ferait d’elle-même et de Donald Trump des individus très, très appréciés par Dieu.
Pas trop dur de comprendre pourquoi Trump l’aime autant, hein?
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