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Pourquoi un jeu vidéo, ça coûte si cher?
Si vous êtes entré.e dans une boutique de jeux vidéo récemment, vous avez peut-être fait le saut : après des années à 79,99 $, les nouveautés commencent à afficher un prix de 89,99 $.
On a beau être passionné.e de jeux vidéo, ça commence à faire cher pour un divertissement.
Mais pourquoi c’est si cher, un jeu vidéo? Est-ce une simple question d’avarice, ou le développement de jeux est-il réellement si coûteux?
Déconstruisons le prix d’un jeu vidéo.
Est-ce vraiment si cher un jeu vidéo?
Oui, le prix de 90 $ a de quoi faire sursauter.
Mais quand on remet en contexte le prix des jeux vidéo à travers l’histoire, il y a de quoi relativiser. Regardez cette publicité de Toys R Us Canada datant de 1995 :
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On y retrouve plusieurs jeux à 89,99 $ (même Batman Forever à 94,99 $, un navet monumental au passage).
C’est donc dire qu’avec l’inflation, le prix des jeux a finalement diminué au fil des ans. 90 $ en 1995, c’est 151 $ aujourd’hui.
Et sans dénigrer Judge Dredd (soyons honnête : je n’y ai jamais joué), on parle d’un jeu qui durait de 3 à 4 h, et qui avait l’air de ça :
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Aujourd’hui, vos 90 $ pourront vous offrir Horizon Forbidden West, un jeu qui offre une quarantaine d’heures de jeu, et qui a l’air de ça :
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C’est comme comparer des pommes et des oranges en 4K.
Mais où va l’argent?
Bon, c’est peut-être pas plus cher qu’avant, au fond, mais ça ne veut pas dire que c’est pas cher. Quatre-vingt-dix dollars, ça reste beaucoup de sous pour plusieurs d’entre nous. Pourquoi un montant si élevé?
Le coût du développement
Le principal poste de dépense, c’est évidemment le développement. Environ la moitié du prix payé pour un jeu neuf revient à l’éditeur du jeu, par exemple Ubisoft. En gros, disons que ça prend trois ans développer un jeu d’Assassin’s Creed. Pendant ces trois années, Ubisoft paiera le salaire des employé.e.s du studio, mais aussi leur équipement (ordinateurs, bureaux, logiciels, etc.) ainsi que les licences pour les divers outils utilisés.
Leur pari, c’est qu’ils récupèreront les sommes investies, en plus d’un profit, quand le jeu sera lancé sur le marché.
Le commerçant ramasse environ le quart du montant, parfois un peu moins.
Mais c’est un pari de plus en plus coûteux, puisque les coûts de développement sont de plus en plus élevés. La plupart des compagnies ne dévoilent pas leurs budgets, mais CD Projekt Red a dévoilé le coût de développement de sa trilogie The Witcher. Le premier titre de la série, sorti en 2007, a coûté 5 millions $ US à développer. Le troisième volet, sorti en 2015, a coûté 26 millions.
Et ces chiffres sont anormalement bas : CD Projekt Red est situé en Pologne, où les salaires et les coûts sont bien plus bas qu’en Amérique du Nord. Vous pouvez multiplier ces chiffres pour un budget de jeu développé à Montréal sans trop vous tromper.
Le commerçant (en voie de disparition)
Ensuite, le commerçant ramasse environ le quart du montant, parfois un peu moins. Vous vous demandez pourquoi les Gamestop de ce monde insistent tant pour acheter des jeux usagés? Parce que la marge de profit sur un jeu neuf est finalement plutôt mince.
Mais de toute façon, les boutiques physiques sont en voie de disparition : la plupart des joueurs et joueuses achètent maintenant leurs jeux en format numérique. Et même les irréductibles Gaulois qui insistent pour avoir des copies physiques se tournent souvent vers Amazon pour les acheter (je ne sais pas si vous connaissez ce site?).
Sur les plateformes numériques, c’est environ 30 % du prix de vente qui est retenu par la compagnie qui héberge la plateforme (Sony, Microsoft ou Valve pour Steam, par exemple), donc un petit peu plus que les 25 % d’une boutique physique.
Les autres coûts
Ce n’est pas tout.
Tout d’abord, pour publier un jeu sur une console, vous devez payer une licence à la compagnie propriétaire de la console. C’est là que les Xbox et PlayStation de ce monde font la plus grande part de leurs profits. Ces frais sont variables (un titre qui vend des dizaines de millions de copies comme GTA, ou un titre qui accepte d’être exclusif à une console pendant une certaine durée comme Rise of the Tomb Raider se fera sans doute offrir un meilleur deal), mais il faudra en général verser jusqu’à 10 % du prix de vente à Microsoft, Sony ou Nintendo pour publier sur leurs consoles.
Les éditeurs ont réalisé que 80 $ CA (60 $ US), c’est le prix maximum que les joueurs et joueuses étaient prêts à payer.
Une partie du montant que vous payez à la caisse sert également à amortir la perte engendrée par les copies de jeux qui resteront invendues et qui devront être retournées à l’éditeur.
Finalement, il y a les coûts de fabrication et manutention pour les copies physiques. Si vous vous demandez pourquoi les éditeurs de jeux aiment tant nous vendre des copies numériques, c’est qu’ils peuvent garder ce montant dans leurs poches.
Pourquoi un prix si stable?
Pendant pratiquement 15 ans (de 2006 à 2021), les jeux sont restés sensiblement au même prix : 79,99 $. Ce n’est qu’avec cette nouvelle génération de console que les éditeurs ont tenté d’augmenter le prix des jeux neufs à 89,99 $.
Comment expliquer que le prix n’ait pas augmenté durant cette période?
Les éditeurs ont réalisé que 80 $ CA (60 $ US), c’est le prix maximum que les joueurs et joueuses étaient prêts à payer. En augmentant davantage, les ventes commençaient à en souffrir.
Heureusement, en même temps que les coûts de développement explosaient avec l’ère HD, le nombre de joueurs et de joueuses augmentait. Juste depuis 2015, on estime qu’un milliard de personnes supplémentaires se sont mises à jouer.
Il est donc devenu de plus en plus commun de franchir le cap du million de copies vendues.
Les éditeurs ont également trouvé d’autres moyens de faire plus d’argent avec leurs jeux : on s’est mis à offrir des contenus téléchargeables additionnels.
Mais les éditeurs ont également trouvé d’autres moyens de faire plus d’argent avec leurs jeux : on s’est mis à offrir des contenus téléchargeables additionnels, par exemple de nouveaux chapitres de l’histoire d’un jeu, développés à moindres coûts et vendus pour une dizaine de dollars.
Puis, on s’est rendu compte que les joueurs et joueuses étaient prêts à payer pour des microtransactions, que ce soit de nouveaux costumes vendus pour quelques dollars, ou des points d’expérience pour progresser plus rapidement dans le jeu.
Ajoutez à ça les différentes éditions de collectionneurs qui se sont mis à apparaître, et on réalise que les éditeurs ont trouvé de nouvelles façons de nous faire dépenser plus… sans vraiment augmenter le prix des jeux.
Mais il semble qu’alors que les coûts de développement continuent d’augmenter, les DLC (downloadable content) et autres microtransactions ne suffisent plus à garder le prix des jeux « bas »… surtout quand il faut payer 155 millions de dollars annuellement à notre PDG.