LogoSponsor

Pourquoi les Québécois donnent moins que les autres?

Est-ce qu'on est un peuple de cheaps?

Publicité

C’est le mois de décembre, on est en pleine préparation de la période des Fêtes, ce qui signifie que depuis plusieurs semaines, vous vous faites agiter une boîte de dons sous le nez dès que vous sortez de chez vous. Voulez-vous laisser des denrées non périssables à l’épicerie ? Un peu de monnaie dans cette boîte de conserve ? Pourquoi ne pas offrir un don à un organisme pour Noël ? Peux-tu me faire un lift ?

Or, un constat s’impose chaque année quand on compare les dons au Québec et ailleurs au Canada et aux États-Unis : les Québécois sont en queue de peloton en matière de générosité.

Est-ce qu’on est cheap ? Ou d’autres facteurs entrent-ils en compte ?

On regarde ça (si vous me donnez cinq minutes).

Les Québécois, moins généreux ?

Selon un sondage partagé en novembre dernier par CanaDon, un quart des Québécois n’a pas fait de don à un organisme de bienfaisance depuis la pandémie, pourcentage qui augmente à 36 % si on se concentre sur la dernière année seulement. Ces chiffres nous placent au dernier rang au pays.

Ces chiffres n’ont toutefois rien de nouveau.

Publicité

En 2020, une enquête de la firme d’experts-conseils en philanthropie Épisode démontrait que les Québécois donnent environ 30 sous par tranche de 100 $ gagnés, alors que la moyenne à l’échelle du Canada est de 50 sous.

Chaque année, l’Institut Fraser, un think tank de droite, publie son index de générosité et pas mal chaque année, cet index révèle qu’au pays, ce sont les Québécois qui donnent la plus faible part de leurs revenus (en 2024 : 0,26 % contre 0,56 % pour l’Ontario et 0,71 % pour les meneurs, le Manitoba). Aux États-Unis, la moyenne serait de 1,22 %.

Peu importe de quel côté on regarde, il semblerait que les Québécois donnent effectivement moins. Mais pourquoi ?

Est-on cheap ?

On pourrait regarder ces chiffres et tout de suite penser que les Québécois se soucient moins de leur prochain, mais ça serait faire une lecture trop simpliste de ces chiffres.

Tout d’abord, il faut se demander qui donne, et à quel organisme. Ici comme dans les autres provinces, ce sont évidemment les plus fortunés qui donnent davantage. En tout, 22 % de la population canadienne serait responsable de pratiquement tous les dons, selon CanaDon.

Publicité

Au Québec, les grandes fortunes sont moins grandes et moins nombreuses que dans des provinces comme l’Ontario, ce qui explique en partie la différence.

Évidemment, les gens qui vivent près du seuil de la pauvreté font moins de dons pour les plus démunis… parce qu’ils SONT les plus démunis.

Il faut aussi prendre en compte le rôle de la religion dans tout ça : les Québécois sont majoritairement d’héritage catholique, et une grande partie de la population a rejeté la religion au complet (nous avons la plus grande proportion d’athées au pays, 49 % versus 39 % au Manitoba et 38 % en Ontario).

Le reste du Canada est à dominance protestante. Or, c’est bien connu : les protestants sont les champions des dons planifiés, alors que les catholiques donnent de façon plus sporadique (une forme de dons qui n’est d’ailleurs pas prise en compte par l’Index de l’Institut Fraser).

Publicité

Au Canada anglais, beaucoup de dons sont faits par les fidèles. Il n’est pas rare que l’Église locale amasse des fonds pour aider la communauté, que ça soit en achetant des vêtements ou de la nourriture aux plus nécessiteux, ou en investissant dans les infrastructures locales.

Or, au Québec, les Églises ne peuvent émettre des reçus pour crédit d’impôt pour ce genre d’action ; elles ne peuvent que promouvoir la religion. Les Québécois fréquentant peu les églises, celles-ci récoltent moins de dons.

La place de l’État

Mais toutes ces raisons négligent sans doute le facteur le plus important dans le rapport des Québécois à la charité : l’État québécois.

On le dit souvent, les Québécois sont les champions des taxes et des impôts… et c’est pas totalement faux. Selon une étude de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques (CFFP) de l’Université de Sherbrooke, l’État québécois est celui qui récolte le plus de recettes en impôts, taxes et autres transferts. En 2021, c’était 34,7 % de notre PIB qui était partagé entre nos administrations publiques, alors que la moyenne est de 27,3 % au Canada.

Publicité

On peut donc croire que les Québécois, vu ces impôts plus élevés, se sentent moins obligés de donner à la charité. Elle a son utilité, certes, mais on considère généralement que c’est le rôle de l’État de s’assurer que les besoins soient comblés.

Je caricature, mais on ne s’attend pas à ce que les organismes de charité nourrissent tout le monde avec nos denrées non périssables ; on s’attend à ce que le gouvernement s’arrange pour que tout le monde ait assez de moyens pour aller à l’épicerie.

Le gouvernement ne réussit pas toujours (genre, vraiment pas), mais ça reste malheureusement mieux qu’ailleurs : quand on compare le coefficient de Gini, qui mesure les inégalités de revenus dans un État, le Québec est au 7e rang de l’OCDE, alors que le Canada est en 15e place (malgré notre apport !).

Publicité

L’espérance de vie est également plus élevée au Québec (82,7 ans) qu’au Canada (81,7 ans)… et on ne parle par des États-Unis (78,4 ans) qui nous prouvent encore une fois que, comme le veut le meme, les États-Unis sont un pays du tiers-monde avec une ceinture Gucci.

Alors, peut-être que les Québécois ne sont pas cheaps ; peut-être ont-ils simplement compris que l’État est mieux placé que les œuvres de charité pour rehausser le niveau de vie pour tous… ce qui ne devrait toutefois pas nous empêcher d’exiger davantage de notre gouvernement ET de donner davantage si on est en mesure de le faire.

Commentaires
Aucun commentaire pour le moment.
Soyez le premier à commenter!

À consulter aussi