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Pourquoi le train coûte-t-il aussi cher?

Voyager par les rails : rentable ou perte de temps?

Par
Léopold Picot
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Est-ce que vous aussi, quand on vous parle de train, vous avez en tête le Poudlard Express direction l’école de sorcellerie la plus puissante au monde? Les paysages enneigés, la locomotive fumante – pas très écolo, tout ça – qui passe sur le viaduc, le chariot plein de sucre, la féérie de l’aventure, la buée des détraqueurs sur la vitre

Nécessairement, quand on a cet imaginaire en tête, le train au Canada peut faire rêver de nombreux voyageurs en quête d’aventure. Paysages enneigés? Check. Sucreries à l’érable posées sur son siège? Check. Aventure féérique dans un wagon vitré? Check.

Bruno Maltor, créateur de contenu slow travel (ou « voyage lent »), l’a d’ailleurs fait : il a traversé une partie du Canada en train, de Toronto à Vancouver, et son blogue vidéo donne des étoiles aux yeux. « Les voitures panoramiques sont vraiment des endroits extraordinaires, c’est agréable aussi de pouvoir prendre le temps sur un tel périple », explique-t-il en entrevue avec URBANIA. Son passage préféré? Les Rocheuses, que l’on voit défiler à travers les fenêtres.

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Bon, ça, c’est pour le rêve. Personnellement, quand je suis arrivé à Montréal, le Poudlard Express et le voyage de Bruno étaient bien loin de mes préoccupations quotidiennes. Je voulais juste pouvoir me déplacer d’une ville à l’autre, sans être obligé de prendre la voiture…

Sauf qu’au Québec, comme dans tout le Canada, le train a la réputation d’être cher et pas très pratique. Mais bien que le rail soit plein de signaux contradictoires qui peuvent vous rendre réticents à monter dans la loco’, il vaut la peine d’être pris en compte dans vos prévisions de déplacements.

Un plus pour l’environnement

Déjà, le train est un allié écologique, ne serait-ce que pour le transport des marchandises. On a tous vu ces dizaines et dizaines de conteneurs passer à Montréal, au niveau de la voie verte. C’est un peu comme le bateau : on n’aime pas trop ces gros porte-conteneurs qui remontent le beau fleuve Saint-Laurent, mais pour la planète, il vaut bien mieux que ces marchandises soient transportées par l’eau que par les airs.

Dans le pays, c’est près de 43 000 km de rails qui sont posés, soit plus que le tour de la Terre!

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Quand on est maintenant passager, il faut prendre en compte autre chose : la tête de la locomotive. Si elle est électrique, c’est plus soutenable, pour peu que l’électricité soit produite de manière durable. Mais si elle fonctionne au diesel, comme sur les trajets longs de Montréal vers Halifax et de Toronto vers Vancouver, c’est plus compliqué. D’après une étude publiée par un chercheur de la faculté des sciences sociales d’Ottawa, ces trajets-là seraient, pour l’instant, plus polluants que l’avion.

Un potentiel sous-estimé

Le train au Canada est plus développé qu’on ne le pense. Dans le pays, c’est près de 43 000 km de rails qui sont posés, soit plus que le tour de la Terre! Nécessairement, elles servent autant pour passer de province en province que pour relier les grandes villes ou développer le train de banlieue.

le train, c’est sexy, c’est un allié de taille pour la lutte écologique et ça peut améliorer votre quotidien.

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À Montréal par exemple, le train urbain peut être super pratique pour partir en week-end sans utiliser sa voiture. Vous pouvez aller vers Hudson faire du ski de fond, descendre à Saint-Jérôme pour visiter le parc régional de la Rivière-du-Nord ou même prendre la direction de Mont-Saint-Hilaire pour vous balader dans la réserve naturelle Gault. Bonus : vous pouvez même monter avec votre vélo à bord pour relier les points d’intérêts autour!

Le rail, c’est aussi une autre manière de voyager. Pas d’embouteillages, pas de galère pour se garer, pas de plein à 70 $… Bref, le train, c’est sexy, c’est un allié de taille pour la lutte écologique et ça peut améliorer votre quotidien en laissant votre voiture dans le garage.

Coût dur

Mais il a aussi quelques désavantages. Déjà, le réseau de train est très inégal selon l’endroit où vous habitez et il faut accepter de se contraindre aux horaires.

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Autre point noir : le train peut vite coûter cher. Autant pour les trains de banlieue de Montréal, vous pouvez vous en tirer avec un ticket à 15 $ en illimité la fin de semaine, autant pour partir à Toronto de Montréal, il faut compter 140 $ l’aller-retour en week-end, contre 120 $ pour un trajet égal en bus ou 80 $ en covoiturage.

« Les gens disent que c’est très cher, mais quand tu prends du recul, quand tu te dis que tu traverses le deuxième plus grand pays du monde, un pays riche, ils ne peuvent pas le faire beaucoup moins cher. »

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Et si vous partez à Halifax, là, le déplacement en train vous coûtera 350 $, contre 220 $ en avion. Pour un Toronto-Montréal, le voyage peut encore valoir le coup : vous vous évitez un plein. Pour Halifax ou Vancouver… par rapport au temps de transport et au prix, c’est toujours plus rentable de prendre l’avion. Bien sûr, il faut aussi prendre en compte le bus du voyage. Si le trajet est pour des vacances, cela peut aussi valoir le coup.

Mystère élucidé

Pour Bruno, qui avait payé son Toronto-Vancouver environ 1 300 $ pour quatre jours, repas compris, l’expérience lui a semblé rentable. « Je trouve que c’est assez honnête. Les gens disent que c’est très cher, mais quand tu prends du recul, quand tu te dis que tu traverses le deuxième plus grand pays du monde, un pays riche, ils ne peuvent pas le faire beaucoup moins cher », relativise le créateur de contenu.

Mais comment expliquer de tels coûts? ViaRail avance le prix du diesel pour les longs trajets, le vieillissement des infrastructures, l’entretien des voies et la faible fréquentation.

Connecter la région la plus densément peuplée du Canada pourrait vraiment changer les choses.

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Pour tenter d’y remédier, certains demandent un doublement des rails entre les grandes villes : un pour les marchandises, un autre pour les voyageurs. Cela permettrait de rendre le train plus attractif, donc plus fréquenté et moins cher. Le projet de train à grande fréquence, voire grande vitesse, pour relier Windsor à Québec en passant par Toronto, Ottawa et Montréal va dans ce sens. Connecter la région la plus densément peuplée du Canada pourrait vraiment changer les choses.

Sauf que là, on parle de projets sur cinq, dix, quinze ans. En attendant, il faudra peut-être accepter de prendre le temps, de payer plus cher pour aller moins loin et de se contraindre. Ce n’est pas toujours facile, mais la saveur du paysage qui défile à travers les vitres, l’absence d’embouteillages et le confort d’un voyage en train valent bien quelques heures et dollars de plus.

Et puis, une locomotive, ce n’est pas à vous de l’amener au garage!