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Pourquoi ça coûte aussi cher, un cadre?
Comme moi, vous avez fort probablement à la maison un bel imprimé trouvé dans une boutique instagrammable qui attend toujours d’être encadré. (Vous savez, ces boutiques « art de vivre » qui vendent également des chandelles de soya à 50$? Oui, elles font mal à mon portefeuille.) Cette affiche, vous l’avez achetée sur un coup de tête, car vous vouliez donner un peu de pep à votre salle de bain.
En apprenant le prix pour la faire encadrer, vous avez toutefois vite revu vos grands plans de décoration. Qu’est-ce qui justifie ce prix ? J’ai rencontré deux encadreurs à ce sujet.
Les formats « standards »
Je sais que c’est cliché de dire que « tout est une question de choix », mais c’est vraiment le cas, ici! Avant tout chose, quand vient le temps de faire encadrer une œuvre, deux options s’offrent généralement à vous. Le modèle préfabriqué et le sur-mesure. J’vous explique.
Les modèles préfabriqués coûteront généralement moins cher et conviendront parfaitement pour une pièce aux dimensions standards, comme une affiche de cinéma, par exemple! (le fameux format qu’on achetait au HMV, à l’époque!)
Selon Mathieu Raymond, encadreur depuis 13 ans chez Affiche en Tête, il est possible de s’en tirer avec un prix débutant aux alentours de 90 à 100 $ dans le « pré-fait ».
Les commerces offrant de l’encadrement reçoivent habituellement ces modèles déjà assemblés, ce qui leur permet d’éviter des coûts. On me martèle tout de même qu’il s’agit d’un produit de qualité!
Les cadres « sur-mesure »
Attention! Si vous avez horreur de prendre une décision, éviter le sur-mesure. Je dis attention, car les possibilités sont presque aussi nombreuses qu’au Buffet des Continents.
Au départ, il faut savoir quel type d’oeuvre on veut exposer et ce qu’on veut en faire.
Comme l’encadreur Mario Beaupré, dans le métier depuis 40 ans, m’explique sans détour : « C’est sûr que si vous arrivez avec une affiche, style papier magazine, versus une œuvre de Riopelle, on ne fera pas le même traitement! ».
« Est-ce qu’on parle d’une pièce d’investissement ? », me demande quant à lui, Mathieu Raymond, en guise de réflexion.
Qu’est-ce que ça signifie, exactement? Il me précise que certaines pièces peuvent être achetées non seulement pour l’aspect esthétique, mais aussi dans une optique éventuelle de revente. « Ça devient comme une action », ajoute-t-il. Il faut alors préserver l’œuvre et (vous me voyez venir), ça nécessitera des matériaux de conservation plus dispendieux.
Tanné.e.s de vous poser des questions ? Ça ne fait que commencer.
La qualité, ça se paie!
Pour celles et ceux qui trouveraient ça trop dispendieux, oui, dans un magazine grande surface, il est possible de s’en tirer pour une vingtaine de dollars. Mais il faut penser à la qualité.
Pour les cadres sur-mesure, avec l’aide de l’encadreur, il faudra déterminer le type de vitre qu’on souhaite faire installer. M. Raymond m’explique alors que, chez lui, il y a la régulière (comme une fenêtre, mais en plus fin), l’anti-UV, la dépolie, l’anti-reflet (comme des lunettes) et la vitre musée (les avantages de l’anti-UV et de l’anti-reflet combinés). Si vous êtes des p’tits vites, vous comprendrez que la vitre musée coûtera beaucoup plus cher que la régulière!
Pour le bois, les moulures régulières seront faites d’ayous (bois africain) ou de pin. Pour des produits de plus grande qualité, on ira vers le noyer, le chêne ou l’érable.
Donc, on doit s’attendre à payer combien? L’encadreur de chez Affiche en tête m’explique qu’un cadre, ça commence à 100$. (Mario Beaupré, qui fait dans le haut de gamme, me parle plutôt de 150 à 200$).
Dépendamment de tous les choix énumérés précédemment, ça peut monter jusqu’à 600 ou 700$ pour quelque chose de « standard ».
« Et là, je ne parle pas d’un jersey de hockey signé par le Démon Blond en personne, avec une vitre de conservation! », m’avertit M. Raymond. En effet, quand il est question d’œuvres « muséales », on peut alors parler de quelques milliers de dollars. Ça devient comme une action en bourse, on se rappelle!
En plus, nos deux encadreurs possèdent des fournisseurs aux États-Unis et en Italie! Le coût des matériaux et le transport qui feront grimper le prix de la facture.
Pour ce qui est des moulures, elles sont commandées en « baguette » et même si vous n’avez pas besoin de la longueur entière, il faudra généralement vous la faire payer en entier. Pourquoi? Parce qu’ainsi, les encadreurs pourront peut-être refaire un plus petit cadre avec les « restants ». Mais dans combien de temps? Six, huit mois? Pendant ce temps, il faut qu’ils essuient ces pertes monétaires.
Un luxe
Selon Mario Beaupré, l’encadrement a toujours été un service réputé pour être cher.
« J’appelle ça un “sport de luxe”. Ce n’est pas “bon marché”, l’encadrement et ça ne l’a jamais été! », me lance celui qui, avec ses 40 ans d’expérience, peut assurément être identifié comme « une source fiable ».
En d’autres mots, c’est une forme de coquetterie qu’on se permet. On s’entend que l’esthétisme intérieur d’une résidence ou encore la préservation d’une œuvre n’apparaissent pas dans la pyramide des besoins de Maslow.
L’inflation, encore l’inflation
Avec l’inflation (qui n’épargne d’ailleurs pas des produits comme le bois et la vitre), l’encadrement fait partie de ces petits « luxes » qu’on coupe rapidement lorsqu’on doit se serrer davantage la ceinture. Et ce phénomène, M. Beaupré, est aux premières loges pour l’observer. Les clients qui rebroussent chemin après être entrés en magasin, les walks-outs, sont de plus en plus fréquents. « Quand tu dis qu’avant t’avais une personne sur dix qui ne le faisait pas faire […] là maintenant c’est le contraire, c’est comme dix personnes qui ne le font pas faire et une qui le fait », me dresse-t-il comme portrait approximatif.
Mathieu Raymond, de chez Affiche en Tête, tarde pour sa part à observer un impact de l’inflation sur son achalandage. « Ça reste à peu près le même pourcentage de gens. Ça fait deux ans qu’on s’attend à voir ça, davantage de refus », mais ce n’est pas le cas à l’heure actuelle, me précise-t-il. Comme quoi la situation peut différer, tout dépendamment des produits offerts.
Bon. J’vous résume tout ça en une phrase? Quand vous vous intéressez au prix d’un cadre, intéressez-vous aussi à l’utilisation que vous allez en faire, au type d’œuvre, à la qualité des matériaux et au temps de fabrication qui y sera consacré. Le prix va ainsi peut-être se rapprocher de celui que vous aviez en tête!