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Pourquoi ça coûte aussi cher, les camps de jour?
Tout coûte cher. Ça, on le sait. Du panier d’épicerie à la facture au resto, l’inflation fait son chemin dans les moindres recoins de notre compte en banque. Et pour les parents qui ont dû inscrire leurs enfants au camp de jour cette année (c’est-à-dire pas mal), là aussi, la facture augmente.
À Trois-Rivières, la municipalité a augmenté ses prix de 40 % l’an dernier. À Gatineau, l’augmentation est de 30 %. La ville de Québec, elle, a fait le choix d’assumer elle-même l’augmentation des tarifs pour ne pas pénaliser les familles. Quand on sait qu’un séjour au camp peut coûter entre 200 et 500 $ la semaine, la facture grimpe assez vite, merci.
L’inflation des ballons
« On a fait une enquête au début du mois de mai pour savoir si les camps certifiés et municipaux avaient augmenté leurs tarifs et ce qui ressort, c’est que l’augmentation n’est même pas aussi élevée que l’inflation », déclare Valérie Desrosiers, coordonnatrice aux communications à l’Association des camps du Québec.
Une chose est sûre, par contre : gérer un camp en 2023, ça coûte plus cher qu’avant. Eric Beaudoin, président-directeur général de Loisirs 3000, qui opère les Camps Yopi, une entreprise privée qui compte des dizaines de camps de jour thématiques à travers le Québec, n’est pas gêné de m’en parler. « En 6 ans, j’arrive à une moyenne d’augmentation de 6,2 % du salaire minimum. À ce moment-là, c’est sûr que je dois augmenter mes tarifs », explique-t-il.
La masse salariale représente environ 60 % du budget d’exploitation total d’un camp de jour. Ça, c’est sans compter les frais d’achat du matériel (environ 15 % du budget), qui, depuis la pandémie, ont eux aussi augmenté de manière substantielle.
Le camp Yopi demande environ 200 $ la semaine par enfant. « Pour arriver [à faire balancer mon] budget, j’aurai pas le choix pour 2024 d’augmenter les tarifs de 50 $ par semaine », explique Eric Beaudoin. Bref, ça monte vite.
Loisirs 3000, qui accueillait il n’y a pas si longtemps les enfants pour une moyenne de 3,5 semaines dans l’été, évalue maintenant la durée de leur séjour à 2 semaines. Pourquoi ? Parce que les familles ne peuvent plus assumer les frais.
« Comme camp spécialisé, je suis rendu un bien de luxe », poursuit le PDG, qui indique aussi avoir dû couper les places disponibles dans ses groupes en raison de la pénurie de main-d’œuvre.
Les camps, un service essentiel ?
Quand on y pense, 8 semaines de vacances d’école, c’est super pour les enfants, mais assez compliqué pour les parents qui travaillent. Les camps de jour, rendu là, c’est un peu un service essentiel, non?
Magalie, maman solo de Montréal, l’a eue dure cette année. « Quand la saison des camps arrive, c’est très stressant. Il n’y a pas beaucoup de places disponibles. On veut offrir un beau camp, mais les frais encourus font en sorte qu’on se doit souvent de se tourner vers des options moins dispendieuses et plus générales », m’explique-t-elle.
Pour assurer une place à sa fille de 7 ans, Magalie a dû prendre une demi-journée de congé pour se rendre à l’organisme communautaire de son quartier le jour de l’inscription.
« Cette année, les frais ont augmenté de presque 100 $ la semaine, et ça, ça ne comprend pas les frais de service de garde. C’est beaucoup d’argent à payer d’un coup », raconte-t-elle.
Heureusement, le camp de jour de Magalie lui a permis d’échelonner son paiement sur plusieurs semaines : autrement, elle n’y serait pas arrivée.
Eric Beaudoin conteste cette façon de fonctionner. « Un parent qui paye 300 $ par semaine un camp, il a un relevé d’impôt à la fin de l’année, mais il doit quand même payer les frais totaux dès l’inscription. Deux personnes qui travaillent au salaire minimum ou pas loin, est-ce qu’ils peuvent se permettre ça? », se questionne Eric Beaudoin.
Aux Camps Yopi, on propose aux parents un mode de paiement de janvier à juin pour contrer le problème. L’idée, poursuit le PDG, c’est de minimiser l’impact sur les familles. Valérie Desrosiers, de l’Association des camps du Québec, abonde dans le même sens. « Personne ne veut faire une fortune en ouvrant un camp de jour », explique-t-elle. « Souvent, les camps font des aménagements budgétaires pour ne pas transférer la hausse des frais d’exploitation directement sur les parents, comme privilégier des sorties en transport en commun plutôt que de louer un autobus », poursuit Valérie.
Ouin. C’est gentil, mais en même temps, on dirait que cette situation-là pèse sur tout le monde. Pour Magalie comme pour beaucoup de familles, le camp est nécessaire pour pouvoir travailler. Pourquoi alors faut-il se battre pour avoir une place et stresser avec la facture ? « Bientôt, ça va prendre des mesures sociales pour une accessibilité aux camps », croit Eric Beaudoin. Il a probablement raison.