Pourquoi ça coûte aussi cher, jouer au golf?

Ah, le golf! Les matins calmes sur le green, à pratiquer son swing… Il y a une époque où c’était encore une activité commune, ou du moins, accessible à la plupart des gens. En fait, jusqu’à la récession (celle de 2008, pas celle qu’on vit en ce moment), ça restait un sport populaire, grâce à des stars comme Tiger Woods préadultère, ou des films comme Happy Gilmore.

Bien entendu, ce n’est pas d’hier que le golf est un sport de riches! Il est depuis longtemps privilégié par les politiciens, les PDG, avocats et autres stéréotypes de vieux dudes blancs riches qu’on peut se faire. Et il est vrai que certains clubs de golf et acteurs du milieu tentent de se défaire de cette image et de démocratiser le sport. Mais avec des tarifs d’adhésion annuels qui tournent au bas mot aux alentours des mille dollars, ce n’est évidemment pas le genre une activité à laquelle tout le monde peut s’adonner régulièrement.

Mais pourquoi est-ce que ça coûte aussi cher, un abonnement de golf, et pourquoi le golf est toujours vu comme un sport de riches?

Comme c’est un peu dans l’air du temps, on va commencer par une première explication qu’on peut tous et toutes comprendre : l’accès à la propriété est restreint, un terrain, ça coûte cher, et un golf, c’est essentiellement un ciboire de gros terrain qu’on ne peut pas monétiser en y mettant des habitations ou des commerces qui rapporteront un loyer.

Après tout, le golf nécessite du gazon bien entretenu. La taille moyenne d’un 18-trous se situant aux alentours de 30 hectares, et plus souvent près de 60 pour les golfs plus récents, on peut bien s’imaginer que ça finit par coûter cher de tondeuse!

Au-delà du gazon, il y a tout un écosystème à maintenir. Personne ne veut prendre son peu de temps libre pour payer et aller frapper des balles sur un vieux terrain vague. En fait, après la détente et le bien-être, être en nature est la raison qui revient le plus souvent chez les répondant.e.s à qui l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) de France a demandé pourquoi iels avaient choisi le golf. Les clubs les plus prisés sont donc naturellement ceux qui offrent les green les plus pittoresques, et donc les mieux entretenus, par conséquent plus chers.

Le rapport de l’INSEE nous apprend, ou plutôt confirme, autre chose sur le golfeur moyen. Il a 48 ans, a 39 % de chance d’être un cadre et 33 % de pratiquer une profession libérale. Il dépense environ 600 euros (800 $) par année sur de l’équipement, en plus des milliers d’euros que peut lui coûter l’abonnement.

Les coûts connexes à la pratique du golf ne sont pas nécessairement les plus onéreux, mais ils peuvent l’être. Du vrai bon équipement vous coûtera certainement quelques milliers de dollars. Si l’étendue du terrain est assez grande, il vous faudra probablement louer un cart de golf (ou acheter le vôtre, si vous êtes motivé.e).

Vous voulez être un réel big shot et avoir un kid qui vous suit pour trimballer et entretenir votre équipement tout au long de la partie? Il faudra le payer aussi. Et là, on n’a pas encore parlé des vêtements de golf, sans lesquels vous vous ferez sévèrement juger par les autres membres du club. Ou encore de vos lunchs au Chablis au restaurant du club (où la bouffe sera, elle aussi, chère). Si vous voulez optimiser votre plaisir, être bon.ne au jeu aide aussi. Comptez donc quelques centaines de dollars pour des leçons privées.

Bref, jouer au golf entraîne certaines dépenses ponctuelles qui doivent fitter avec votre mode de vie si vous voulez vraiment vous y mettre. C’est pourquoi, si vous êtes le genre de personne pour qui l’argent n’est pas un problème, le golf est un sport de choix.

Je ne m’éterniserai pas là-dessus, mais évidemment, vous pouvez très bien payer par journée et louer de l’équipement, que certains endroits vous prêteront même gratuitement. Mais si vous voulez aller jouer souvent, ça finira par vous coûter plus cher qu’un abonnement annuel.

Vous connaissez l’adage, et vous êtes au courant de sa véracité : le temps est de l’argent. Avoir des loisirs, dispendieux ou pas, nécessite soit du temps, soit de l’argent. Et notre génération est, malgré elle, passée experte à devoir choisir entre les deux.

Le stéréotype n’est pas totalement faux : une proportion non négligeable des gens qui pratiquent le golf sont à la retraite. Autrement dit, ils ont accumulé assez d’argent pour se donner du temps. Shouts out à eux; on parlera un jour, dans un autre article, de comment ils ont subséquemment assez fuck up les choses pour que cela ne devienne jamais une réalité pour nous.

Faisons un petit calcul. Disons que la météo est assez clémente pour jouer environ une quinzaine de semaines par année. Votre adhésion au club de golf vous coûte 1 500 $ pour l’année. Rajoutez 500 $ d’équipement et de vêtements. Avant même avoir pris en compte le cart de golf et votre club sandwich pour le lunch, vous en êtes déjà à plus de 130 $ par visite, si vous y allez une fois par semaine. Ce qui est, si vous avez un 9 à 5 et une vie sociale et familiale active, déjà pas pire!

Bien entendu, si vous avez le temps et l’argent, ça vous prendra pas mal moins de temps de rentabiliser votre abonnement. Sinon, c’est un peu comme continuer de payer un abonnement mensuel pour un service de streaming que l’on n’utilise qu’une fois chaque cinq semaines. Et ça, personne ne fait ça. Right?

Parlant de rentabiliser son temps, cela nous amène au point le plus crucial pour comprendre pourquoi le golf est un sport de riches.

Je n’oublierai jamais la fois où je jouais au golf avec un monsieur d’un certain âge et aux finances bien assises et qu’il me confia que le club de golf sélect où l’on se trouvait n’était pas son premier choix. Celui où il aurait voulu être membre avait refusé sa candidature. La raison : son salaire annuel était sous le minimum exigé par le club. Bien entendu, j’avais un million de questions, mais il lui paraissait tout à fait normal d’avoir envoyé des preuves de ses avoirs et de son salaire pour avoir le droit de jouer au golf avec ses amis et collègues.

Les clubs de golf sont souvent d’abord précisément ça : des clubs. Beaucoup fonctionnent sur invitation ou parrainage seulement. Une tonne de gens aisés achètent donc des adhésions dans des clubs de golf pour profiter de l’aspect club plus que l’aspect golf. Puisque c’est un sport qui nécessite un portefeuille garni et du temps libre, on sait que l’on sera en compagnie d’autres gens du même statut social, ou de celui auquel on souhaite accéder. C’est un symbole de son statut social.

Mais au-delà de ça, c’est surtout un excellent endroit pour faire plus d’argent! La vérité est que plusieurs entreprises paient les frais d’adhésion à ces clubs pour leurs employé.e.s, car cela facilite les relations d’affaires. Si, par exemple, on travaille pour une firme de construction et de rénovation, débourser quelques milliers de dollars par année, ce n’est rien si ça nous donne une proximité avec des client.e.s actuel.le.s et potentiel.le.s qui peut mener à des contrats lucratifs.

Non, vous ne conclurez pas de deal de plusieurs millions entre le 11e et 12e trou. Mais vous pourriez poser la bonne question, avoir le mot juste, pour que la connexion se fasse et qu’une date soit fixée pour une rencontre entre les deux partis. C’est une question de bien placer ses pions!

Alors, en prenant en compte tout ça, est-ce que c’est vrai que le golf est un sport de riches? Pas nécessairement plus que le ski ou le tennis. Mais, comme ces derniers, il peut servir de marqueur social, et surtout, de lieu d’échange et de réseautage qui se doit de rester exclusif pour garder son prestige. Il n’appartient pas aux riches, mais il leur convient bien!