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Partir en congé de maternité sans compter revenir 

Partir en congé de maternité sans compter revenir 

Plusieurs raisons peuvent motiver ce choix.

Par
Marie-Ève Martel
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Elles partent en congé parental avec un bébé dans le ventre et reviennent, un an plus tard, avec une tout autre vision de la vie. Après tout, accueillir un enfant, c’est aussi se poser des questions fondamentales. Suis-je heureuse dans mon travail? Est-ce que je me sens respectée? Est-ce que je veux vraiment y retourner?

Le congé de maternité devient alors un sas de décompression. Une bulle. Et pour certaines, une porte de sortie.

Livia, Sophie et Annie ont vécu leur congé parental ainsi. Pour elles, ce fut une pause légitime dans leur vie professionnelle qui s’est transformée, sans qu’elles ne l’aient planifié, un tremplin vers autre chose. Pas juste une nouvelle job : une nouvelle façon de vivre.

Pour quitter un milieu toxique

Avant même de tomber enceinte, Livia (nom fictif) savait qu’elle devait quitter son milieu de travail, qu’elle jugeait toxique.

« C’était un milieu où on avait de la difficulté à se parler. Il y avait du contrôle extrême, de la paranoïa, décrit Livia. Je sentais qu’on me gaslightait, qu’on était en train d’achever mon estime de moi. La pandémie avait exacerbé cette atmosphère-là, et ça faisait plus d’un an que ça n’allait plus du tout. »

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Quand elle est tombée enceinte, Livia a vu son congé de maternité comme une libération. « Ça me donnait une année de pause pour penser à la suite, explique-t-elle. Je savais déjà, quand je suis partie en congé de maternité, que mon objectif était de ne jamais revenir. »

Quelques semaines de travail à la maison, suivi d’un retrait préventif et une année de congé parental ont été un véritable « répit » pour Livia, qui s’est mise à la recherche d’un nouvel emploi peu avant la date prévue de son retour.

« C’était quand même insécurisant de devoir me trouver autre chose, relate-t-elle, surtout en même moment où je cherchais une garderie. Mon congé devait finir à telle date, mais si j’avais trouvé un emploi qui commençait avant l’entrée en garderie de mon enfant, ça aurait tout compliqué. »

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Tout s’est finalement bien déroulé. Ayant trouvé un emploi de transition – pas assez stimulant pour cette professionnelle aguerrie des communications –, Livia a annoncé à son employeur qu’elle ne reviendrait pas en poste, comme une autre collègue avant elle l’avait fait à son propre retour de congé de maternité.

« Ça s’est fait sur Zoom. C’est moi qui avais demandé la rencontre, alors il devait se douter de mes intentions, surtout que j’avais été malmenée l’année précédente », raconte Livia.

« Ça m’a un peu fait chier que ça n’avait pas l’air de les décevoir plus que ça que je parte », ajoute-t-elle.

Néanmoins, elle ne regrette pas du tout son choix, elle qui a fini par trouver un emploi où elle s’épanouit et où elle se sent respectée.

Pour des raisons familiales et économiques

Sophie (aussi un nom fictif) était elle aussi malheureuse dans son travail. Après une restructuration, elle a hérité de la charge de travail de trois employés, ce qui l’a menée à un épuisement professionnel au début de la pandémie.

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Au retour de son congé maladie, elle a découvert qu’elle était enceinte, alors que de graves tensions nuisaient au climat de travail. Avec la connivence de son médecin, la jeune femme a été placée en retrait préventif.

Un accouchement, une dépression post-partum et une deuxième grossesse plus tard, son médecin lui pose une question déterminante : « Veux-tu vraiment y retourner? ».

« Il se doutait que je n’étais plus heureuse là-bas, relève Sophie. On a convenu que j’allais rester à la maison. »

Le fait qu’elle n’avait pas réussi à trouver une garderie pour accueillir ses deux enfants a aussi pesé dans la balance. « On a fait nos calculs, et ça devenait vraiment coûteux d’envoyer deux enfants, dit-elle. En fait, c’était plus avantageux économiquement que je reste à la maison. »

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C’est ainsi que Sophie est devenue maman à la maison, gagnant un revenu d’appoint en étant conseillère pour des produits corporels.

Ses enfants sont aujourd’hui âgés de trois ans et demi et deux ans. Si aucune décision n’a encore été prise, Sophie jongle avec l’idée de réintégrer pleinement le marché du travail quand ils ont auront débuté l’école.

En attendant la job de ses rêves

Pour Annie (toujours un nom fictif), la vie fait drôlement bien les choses. Remerciée en 2017 d’un emploi qu’elle appréciait, elle peinait à se replacer dans son domaine.

« Ça faisait un bon six mois que je cherchais, j’étais même prête à faire des remplacements », témoigne-t-elle.

L’employeur industriel de son conjoint lui a alors offert un poste temporaire afin qu’elle gagne un revenu le temps qu’elle retrouve un emploi correspondant à ses qualifications.

Entre-temps, le projet bébé s’est mis en branle au sein du couple, ouvert à ce que l’avenir lui réserverait.

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« Je suis tombée enceinte au début de 2019 et j’ai quitté au moment de mon accouchement, à l’automne », indique Annie, qui est rapidement retombée enceinte par la suite.

« Moi, je voulais surtout retourner travailler dans mon domaine, dit-elle. J’étais appréciée dans mon nouveau travail, mais je n’aimais pas la job. »

Le couple a alors fait ses calculs : en réaménageant un peu leur budget familial, il serait possible pour Annie de demeurer mère au foyer, bénéficiant de prestations du RQAP pour son deuxième enfant.

Puis, au moment-même où son second congé de maternité prenait fin, Annie a enfin reçu une offre d’emploi qui lui a permis de réintégrer son domaine. « La vie a bien fait les choses », note Annie, qui se dit désormais comblée.

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Ce que dit la loi

La loi est claire : l’emploi et les conditions de travail d’une personne en congé parental doivent être maintenus en vue de son retour. Les augmentations salariales consenties, par exemple dans le cadre d’une convention collective, doivent aussi s’appliquer.

Selon le site de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST), l’avis écrit de retour (ou de non-retour) devrait être envoyé à l’employeur trois semaines avant la date souhaitée.

Si le travailleur ne se présente pas au travail à la date convenue, il est réputé avoir démissionné.

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La date en question doit cependant avoir été convenue et communiquée par écrit, autrement, l’employeur ne peut pas présumer d’une démission. Il doit plutôt vérifier l’intention du travailleur quant à son retour éventuel.

Faire le point

Selon les trois mamans, le plus important, c’est de s’écouter.

« Une grossesse et un accouchement, ça chamboule une vie, qu’on en soit à notre premier, deuxième ou troisième enfant, rappelle Livia. C’est une bonne occasion de faire le point sur le reste. »

Commencer à neuf ailleurs présente plusieurs avantages, soutient-elle. « On ne compare pas nos performances avec celles d’avant, quand on n’était pas maman, illustre-t-elle. On n’a pas le sentiment d’être jugée parce qu’on est moins disponible. »