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Où est passée la tolérance ?

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En tant qu’homme blanc, hétérosexuel, athée, il y a bien des choses que je ne comprends pas dans mon Québec moderne.

Histoire de vous choquer, tiens : l’avortement. A priori, je suis contre. Et ne me parlez même pas de me faire caresser par un autre homme : je ne comprends pas le plaisir qu’un homme peut avoir de se faire toucher par un autre. De même que je ne comprends pas trop non plus les histoires de vierge engrossée et de réincarnation …

En revanche, quand on me parle de valeur québécoise, moi, il y en a une qui les surpasse toutes : la primauté des droits et libertés individuels et fondamentaux. Cette valeur-là, on l’a choisie à travers des siècles d’allers-retours idéologiques au coût élevé que l’histoire nous a imposé. Des droits que l’on tente de limiter uniquement à partir du moment où ils empiètent sur les droits de l’autre. Tant que ce n’est pas le cas, ils demeurent sacro-saints.

Donc je n’ai pas le droit de tuer mon voisin, mais j’ai le droit d’épouser un autre homme si le cœur m’en dit, voyez le genre ? Je ne comprends pas toujours ce qui pousse ceux qui le désirent, mais j’ai toujours lutté pour le droit des gays de se marier… comme pour celui des femmes d’avorter. Donc pour ce qui a trait à la magie dont s’abreuvent les religions… je ne comprends pas trop, mais je comprends encore moins pourquoi on interdirait, même à des fonctionnaires, le droit d’en porter des signes ostentatoires.

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En voulant s’en prendre aux symboles, ce sont leurs droits qu’on brime. Et ça, non seulement c’est symboliquement fort, mais surtout beaucoup trop concret. En quoi le voile de mon éducatrice de CPE brime-t-il mon droit ? Je risque la conversion ? Pourtant des années de catéchisme n’ont pas empêché quantité de Québécois de verser dans l’athéisme… Le voile est un symbole d’oppression de la femme ? Et donc la société va désormais lui en interdire le port ? Tout un respect pour sa capacité à décider par elle-même !

Avec une société qui se voulait défenderesse des droits et libertés individuels et fondamentaux, je croyais que le Québec moderne avait abandonné l’ère des inquisitions et des poursuites de la vérité vraie. Que cette société moderne reconnaissait aux individus leur propre vérité comme plus importante que celle de l’État. Que l’État n’est plus celui qui ordonne les individus, supérieur qu’il est, mais plutôt celui qui facilite l’épanouissement de ces individus au service desquels il se place. Par et pour les citoyens… Tous les citoyens…

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Pourtant j’entends encore ceux qui se choquent de leurs collègues qui « prennent 5 pauses par jour pour prier !» À combien de fois faudrait-il aller limiter leurs pauses cigarettes aux fumeurs ? Évidemment, on pourrait demander aux collègues musulmans d’aller prier dehors par -30C et ça calmerait sans doute l’ardeur religieuse de plusieurs, mais en sommes-nous rendus là en santé religieuse publique ?

Je me sens au vestiaire en train de débattre : « ma valeur est plus grosse que la tienne ! »

En vérité, je vous le dis : je ne comprends pas ce débat quant à nos valeurs. Je ne comprends pas les athées de se sentir menacés par des fonctionnaires religieux. Pas un État religieux, une infirmière. Qui d’ailleurs, voilée ou pas, ne sera pas moins religieuse. On aurait traité de fanatique le musulman qui aurait voulu interdire la kippa aux juifs. Donc l’athée, lui, a plus raison de vouloir interdire tous les signes à toutes les religions ? Je ne comprends pas plus le xénophobe pas méchant, qui s’imagine encore qu’un vrai Québécois est blanc, francophone et catholique, au mieux; blanc, anglophone, protestant, au pire. En fait, je le plains. Car ce Québec-là, s’il a peut-être déjà existé, il n’existera plus…

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Avec les droits viennent des responsabilités, entend-on souvent. 100 % d’accord : j’ai le droit à mes opinions et mes convictions religieuses, ce qui implique la responsabilité de tolérer les opinions et convictions religieuses des autres qui ont droit aux leurs. Qu’ils soient fonctionnaires, ou non. La seule valeur que je croyais universelle au Québec, c’était donc la primauté de ces droits… et la tolérance qui leur est sous-jacente. Pas de quoi en faire une charte !

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