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On pose les vraies questions… à une orthopédagogue

Mon enfant n'aime pas l'école. C'est grave ?

Par
Gabrielle Tremblay-Baillargeon
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Dans la série Les vraies questions, on rencontre un.e spécialiste afin de lui poser toutes les questions qu’on se pose dans nos group chats de parents, mais qu’on n’ose pas demander au médecin pendant nos rendez-vous.

Ce mois-ci, on a rencontré Marie-Philippe, orthopédagogue et conseillère pédagogique et gestionnaire de contenus à l’Institut des troubles d’apprentissage, pour parler d’aimer l’école (ou pas), d’anxiété de performance et de parents poule.

Comment savoir si mon enfant a un trouble d’apprentissage scolaire avant d’avoir un diagnostic professionnel? Est-ce qu’il y a des signes avant-coureurs?

D’abord, il faut savoir qu’il y a une différence entre une difficulté d’apprentissage et un trouble d’apprentissage. Les difficultés d’apprentissage sont souvent temporaires et circonstancielles. Elles peuvent être liées à des facteurs comme un déménagement, une séparation des parents, ou une période de stress. Ces difficultés peuvent affecter les performances scolaires dans des domaines spécifiques comme la lecture ou les mathématiques, mais elles sont généralement passagères et disparaissent lorsque la situation sous-jacente s’améliore.

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Par contre, un trouble d’apprentissage est plus persistant et souvent lié à des origines neurologiques. Par exemple, des troubles comme la dyslexie ou la dysorthographie affectent durablement les capacités de lecture et d’écriture, malgré des interventions continues.

Les troubles d’apprentissage ne sont pas liés au potentiel intellectuel de l’enfant, qui peut être très intelligent, mais ils persistent malgré les efforts et les interventions éducatives.

Si un enfant continue à éprouver des difficultés malgré une aide soutenue, il est probable que l’école recommandera un dépistage professionnel.

Est-ce que c’est grave si mon enfant dit ne pas aimer l’école, mais que ses résultats sont bons (ou corrects)?

Je trouve que oui, c’est préoccupant! La motivation, c’est un facteur super important pour la réussite scolaire à long terme. Si un enfant n’aime pas l’école, même si ses résultats sont bons, ça peut indiquer des problèmes sous-jacents qui pourraient affecter sa réussite future.

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Il est donc important de comprendre pourquoi l’enfant n’aime pas l’école : ça peut être lié à des difficultés sociales, comme des problèmes à se faire des amis, ou à des aspects affectifs, comme une anxiété de performance.

Comme parent, il faut aussi faire attention à ce qu’on dit. Si on parle toujours du fait que nous, on n’aimait pas l’école ou la lecture, ça peut nuire à la perception de l’enfant. Rappelez-vous, ils apprennent beaucoup par observation!

Est-ce qu’on peut consulter un orthopédagogue directement ou est-ce qu’on doit attendre une référence?

À l’école, ce sont généralement les enseignants qui réfèrent les élèves à l’orthopédagogue en fonction de leurs observations et des besoins de l’enfant. Les orthopédagogues effectuent souvent des évaluations en début d’année pour dépister les élèves qui pourraient avoir besoin d’une aide supplémentaire.

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Cependant, tous les élèves n’auront pas nécessairement accès à ces services en continu, tout dépendamment des ressources disponibles dans chaque école.

Si vous souhaitez consulter un orthopédagogue en dehors du système scolaire, donc au privé, vous pouvez le faire, mais il y aura des frais à payer.

Si vous le faites, c’est important d’assurer une bonne collaboration entre l’orthopédagogue et l’école pour que les interventions soient cohérentes et bénéfiques pour l’enfant, et que le parent ne paie pas pour rien.

À quoi s’attendre lors d’un premier rendez-vous d’orthopédagogie?

Durant la première rencontre, l’orthopédagogue évalue les difficultés de l’enfant pour mieux cibler les interventions futures. L’évaluation n’a pas pour but de poser un diagnostic, mais de déterminer les domaines où l’enfant rencontre des défis spécifiques. Le parent peut être présent lors de ce premier rendez-vous. Pour moi, en tout cas, c’est important.

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L’orthopédagogue peut ensuite mettre en place des stratégies pour rééduquer certains processus, comme la lecture ou l’écriture, ou enseigner des stratégies de compensation si les troubles sont permanents. Par exemple, un élève avec des difficultés de lecture pourrait utiliser un logiciel de synthèse vocale.

Si mon enfant a des difficultés d’apprentissage ou un trouble, est-ce que ça veut dire qu’il aura de la misère à l’école toute sa vie ?

Non! Un trouble d’apprentissage affecte certaines compétences spécifiques, comme les mathématiques ou la lecture, mais pas toutes les sphères de la vie. On parle de matières scolaires, mais il y a tellement de compétences dans la vie qui sont plus que juste académiques!

Aujourd’hui, les jeunes ont plusieurs façons de démontrer leurs compétences au travail par projet, par exemple.

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Aussi, les élèves qui font face à des défis à l’école sont souvent super persévérants et peuvent développer une foule de stratégies pour mieux réussir. Il existe aussi de nombreuses mesures d’adaptation qui sont permises du primaire à l’université. Par exemple, du temps supplémentaire pour les examens ou la possibilité de répondre à des questions à l’oral plutôt qu’à l’écrit.

Quels sont les erreurs ou les comportements que les parents font qui peuvent nuire à l’apprentissage des enfants?

Mon top trois des erreurs, ce serait :

Transmettre ses propres préjugés et perceptions négatives de l’école. Les enfants apprennent par observation et peuvent adopter les attitudes négatives de leurs parents envers l’école ou l’apprentissage.

Accorder trop d’importance aux notes au lieu de l’effort et de la stratégie. On pense parfois bien faire en disant : « Wow! 81%, t’es un champion! », mais ça envoie le message que la note est importante alors que ce qu’on veut renforcer, c’est l’étude, l’effort stratégique, et la démarche. Sinon, on peut mettre une pression inutile sur l’enfant.

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Ne pas laisser de place à l’erreur. On veut que notre enfant développe ce qu’on appelle « une mentalité de croissance » : il faut qu’il comprenne que son cerveau est toujours en évolution, mais aussi qu’on peut faire des erreurs, qu’on a le droit de se tromper, et qu’on apprend beaucoup de ces expériences-là.

Comment savoir si mon enfant vit de l’anxiété scolaire?

L’anxiété scolaire peut se manifester par des symptômes physiologiques comme des maux de ventre ou des pensées irrationnelles de dévalorisation, comme : « Je ne vais jamais y arriver ». Les comportements d’évitement, comme vouloir rester à la maison ou éviter les examens, sont également des signes.

Si notre enfant vit de l’anxiété scolaire, il faut essayer de lui faire vivre des réussites le plus possible, et lui donner des rétroactions positives, par exemple en visant les efforts plus que la note.

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Il faut aussi lui donner des moments pour qu’il puisse exprimer ses émotions sans les banaliser.

Évidemment, si le problème grandit, ça peut être utile de consulter un professionnel pour un soutien supplémentaire.

Comment savoir si je suis trop « parent poule » avec les devoirs de mon enfant, si je l’accompagne trop? Ou au contraire, que je ne l’accompagne pas assez?

C’est vrai que c’est important de trouver un équilibre entre accompagner l’enfant et faire les devoirs à sa place. L’important, c’est de soutenir l’enfant, tout en lui permettant de développer son autonomie et sa confiance en ses capacités.

Structurer l’environnement d’apprentissage (avoir un endroit calme et dédié aux devoirs), instaurer des routines, et utiliser des stratégies pour rendre les devoirs agréables, comme lire ensemble ou faire des jeux, peut aider. On peut aussi montrer à l’enfant comment faire une liste de tâches pour organiser ses devoirs.

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Surtout, il faut garder ça le fun. On peut, par exemple, utiliser une minuterie pour des périodes de concentration de 15 minutes avant de prendre une pause. Il ne faut pas passer trop de temps sur les devoirs ou s’acharner sur les tables de multiplication. Parfois, l’enfant a besoin d’un break! Le lendemain, il retourne à l’école. Il faut qu’il soit disponible et décompressé pour ce moment-là.