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Avec les chroniques d’un (pas si vieux) « camper van », Mélanie Leblanc vous emmène sur la route, la vraie. Des chemins sans filtre Instagram, pas toujours glam, souvent bordéliques, mais ô combien divertissants. À bord de John Mel & Camper, son truck de 21 ans (pas de rouille, pas de trou), c’est un départ vers la liberté… et le chaos.
En partant du Montana, nous nous sommes dirigés vers l’Alberta par les douanes les plus faciles de toute la vie. Tellement petites qu’il faut sonner pour avertir le douanier qu’on veut aller dans son pays.
On est rendus là. Une des étapes que je redoutais le plus. La barrière psychologique du grand retour qui s’apprête à me frapper en plein milieu du front. Le grand déni qui n’en sera bientôt plus un. En partant du Montana, nous nous sommes dirigés vers l’Alberta par les douanes les plus faciles de toute la vie. Tellement petites qu’il faut sonner pour avertir le douanier qu’on veut aller dans son pays. Et après avoir sonné, faut attendre dix minutes avant qu’il arrive « bon, c’est qui les fatigants qui me dérangent pendant que je mange ma soupe noce italienne » ? C’était d’ailleurs le sujet préféré des Étatsuniens rencontrés les jours suivants, au Canada « est-ce qu’ils ont inspecté votre véhicule? NON! Nous non plus. On aurait pu fuller la valise d’alcool et ils n’auraient rien vu ». Après les échanges d’usage avec le gentil douanier « vous êtes partis combien de temps, jeu parleu oune pétit pou la français, parlez-vous oune pétit pou l’English? Welcome home. »
On y était. Welcome home. Ça fesse. Belle petite phrase anodine répétée à longueur de journée. Welcome home. Premièrement ça fesse parce qu’on feel pas vraiment « home » quand on se fait dire « welcome home ». D’ailleurs ça nous a pris quelques jours avant d’arrêter de faire mentalement la conversion pour tous nos achats. On a rencontré un couple de vaners autour de notre feu (on fait beaucoup de rencontres autour de notre feu ces temps-ci) qui partait pour le même genre de voyage que nous. Cette conversation a eu l’effet d’un gros hameçon que j’aurais avalé et qui voulait m’arracher un petit bout de mes organes vitaux au passage. « C’est comment de revenir chez vous? »
On s’est mis à chercher, avec eux, ce qui nous faisait nous sentir à la maison. Certainement pas la langue, certainement pas la musique et la culture… La reine sur nos billets, ok, mais elle se retrouvait aussi sur notre argent au Bélize. « Moi ce que je trouve le plus difficile quand je viens au Canada, c’est les limites de vitesse » POW, tu l’as trouvé Jayden. C’est probablement LA seule chose qui nous fait feeler « home ». Yé. Les limites de vitesse.
Banff, j’imagine que t’es toujours aussi belle, mais tes Rocheuses sont moins imposantes lorsque coincées dans d’énormes nuages.
2003-04, comme toute bonne Québécoise qui n’essaie pas de faire dans l’originalité, j’ai habité quelques mois à Banff, où je faisais du room service dans un hôtel-château. Évidemment que je souhaitais y revenir « juste pour voir ». Disons que ça n’a pas été le bout le plus facile du voyage. Banff, j’imagine que t’es toujours aussi belle, mais tes Rocheuses sont moins imposantes lorsque coincées dans d’énormes nuages. De pluie. À 6 fuckin’ degrés. L’été, t’es pas supposé mettre une tuque, un foulard, des bottes de marche, des bas de laine, un polar et une laine mérinos en dessous.
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Welcome home. Merci, mais non merci. C’est aussi l’endroit où on a eu le plus de difficulté à se stationner, en 5 pays. Après une heure à tourner en rond, on décide de se stationner dans une zone « free parking ». Il n’y a pas d’heures indiquées, pas de « no overnight parking », ça sent bon. Jusqu’au TOC TOC TOC peu discret du lendemain matin. La police. Première fois que ça nous arrive depuis décembre. On peut pas dire que c’est la meilleure des sensations de se faire réveiller le coeur qui débat, la couette grasse dans le front. « You can park, but you can’t sleep ». « Yes Yes seur, we no sleep, we quiet, we cool tranquille ». « Maintenant que je ne dors plus, je peux rester ici? » « Oui. » . Bon. Welcome home.
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La nuit suivante, on s’est dit: ok, fâ frette, on se paie une chambre, fuck off les dépenses, à nous le gros luxe, le wifi, les douches chaudes. Welcome home criss ! Pis là, mon téléphone m’a indiqué les prix des chambres, durant mes recherches. La moins chère au château-hôtel où j’avais l’habitude de travailler était à 999$, quelle aubaine. Sinon, Airbnb m’attendait avec un beau 240$ rien d’inclu, à une heure de la « ville » et en « ville » absolument rien d’abordable ou qui rentre dans un budget de vaners.
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On a fini ben cordés dans le stationnement absolument pas bucolique de l’overflow du camping du Lac Louise, avec une madame qui est venue me prier de lui partager ma connexion Internet. Connexion Internet que je n’avais pas. « Oui, mais pourquoi tu es sur ton ordinateur alors? » « Parce que je travaille, mais sans Internet, j’écris. » « Oh tu es une auteure? Je savais que j’ai bien fait de venir te parler. Mon amie qui habite en Californie a une vie rocambolesque. Elle est comme une chatte, elle a vécu sept vies. Je lui cherche une auteure pour écrire sa biographie, mais je n’ai jamais rencontré cette personne de confiance. Je tombe sur toi, c’est le destin qui t’envoie, enfin quelqu’un qui pourra mettre sa vie en mots. » Bien sûr, nos trois minutes de conversation font de moi cette personne de confiance que vous cherchez depuis si longtemps. Ma chance. Le lendemain matin, elle était partie à notre réveil. On l’a pus jamais revue. Comme le Lac Louise, d’ailleurs, parti dans la brume et scrapant ainsi toutes les séances Instagram cette journée-là.
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Le Insta hubby sur cette photo n’a pas jeté un seul coup d’oeil au lac en dehors de son appareil. Le Insta shooting de sa blonde a duré 15 minutes et le sien 10.
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