​​Norda : des chaussures pour courir partout, tout le temps

« On est ensemble depuis 20 ans, et ça fait 20 ans qu’on court ensemble », explique Nick Martire, cofondateur des chaussures norda.

Willa, aussi cofondatrice, poursuit : « Mais après chaque course, je disais à Nick que l’expérience serait plus agréable si les souliers de course étaient mieux adaptés aux terrains qu’on a ici. »

Tous les couples sur terre ont déjà eu, au moins une fois, une idée un peu folle du genre « On devrait reprendre une boulangerie dans le sud de la France » ou « Pourquoi on se partirait pas notre propre compagnie de souliers de course? ».

Avant de se lancer dans cette aventure, Nick et Willa Martire avaient déjà un pied dans la porte du footwear. Aldo figure au CV de Nick et Willa a tenu les rênes de Pretty Ballerinas, une entreprise de souliers de ballet qu’elle a fondée avec son mari.

En 2020, le couple décide finalement de mener à bien son projet, et présente norda 001 : la première chaussure de randonnée légère à assemblage sans coutures, fabriquée en Dyneema, une fibre biosourcée, et équipée d’une semelle Vibram à absorption des chocs. Autant courir sur un nuage!

« Nick n’aime pas quand je dis ça, mais je ne cours pas pour faire des courses, révèle Willa. C’est plutôt un complément aux autres sports que je pratique. Je dirais que je suis avant tout une skieuse, mais surtout, c’est le plein air qui m’allume. C’est fondamental à norda, courir pour le plaisir d’être dehors. »

Quand des souliers de mauvaise qualité, ou mal adaptés aux terrains nordiques, se sont mis à empiéter sur ce plaisir, il est devenu clair pour le couple qu’il fallait remédier à la situation. Mais dans un marché aussi compétitif, difficile de faire sa place.

Alors, comment est-ce qu’on s’y prend pour créer ses propres shoes? Comme le concède Nick, les obstacles dans cette industrie sont massifs, et les coûts sont rédhibitoires. C’est en partie pourquoi les compagnies qui survivent sont celles qui brassent des milliards de dollars par année : elles ont l’argent nécessaire pour la recherche, le développement et la production de plusieurs modèles par année. Simplement créer le moule pour les semelles d’un nouveau modèle vous coûtera 50 000 $.

« Ça nous a pris deux ans, et beaucoup de patience!, souligne Nick. Il faut les bons contacts, les connaissances de la cordonnerie. C’est une grosse industrie, mais très fermée et confidentielle. Donc nous avons décidé de nous démarquer grâce à ce qui nous tient à cœur : créer un produit de haute performance, de la manière la plus durable possible.

Lorsqu’est venu le temps de vraiment concevoir le soulier, les partenaires ont décidé de s’inspirer de Montréal jusqu’au bout! Les matériaux sont ultrarésistants et durables, capables de survivre aux chemins parsemés de roches, de boue et de branches du mont Royal. Les nervures dans la semelle sont incongrues et ébréchées, donnant au coureur ou à la coureuse une traction verticale et latérale.

Pour rendre le tout un peu plus ludique, ils se sont inspirés de la topographie du Bouclier canadien avec, au centre de la semelle, un logo à la forme de l’île de Montréal. Et, bien entendu, le produit final est beau à regarder, à tel point que les fondateurs doivent souvent rappeler aux gens que leurs souliers sont conçus pour courir, et pas seulement pour être portés comme accessoires de mode.

N’importe quel coureur vous le dira, la semelle de votre chaussure de randonnée, c’est la star du spectacle! C’est pourquoi norda a choisi le fabricant italien Vibram pour concevoir les leurs. « Quand tu fais affaire avec Vibram, il y a un genre de menu, où tu choisis la semelle que tu veux, explique Willa. On a voulu faire différemment, en concevant notre propre semelle, en y intégrant de la technologie Vibram, mais qui nous est exclusive », explique Willa

En un peu plus d’un an, les Martire et leur équipe ont dévoilé les 001 sous plusieurs formes, dont une paire spécialement conçue pour les randonnées d’hiver, ainsi que des collaborations avec Ciele et Ray Zahab. Les critiques positivent abondent sur les forums spécialisés, et norda s’est même taillé une place dans les pages de magazines de mode, ce qui leur a permis de compter des géants de la mode de luxe comme M. Porter et Ssense parmi leurs distributeurs.

« Les coureurs, c’est vraiment une classe à part, ils sont très pointilleux, admet Nick en riant. Ils peuvent essayer 10 paires différentes avant d’en choisir une. Il y avait donc beaucoup d’anxiété et de trépidation avant qu’on lance le premier modèle, parce qu’on ne savait pas si la communauté allait aimer ça ou pas. Mais aujourd’hui, on a une communauté physique et virtuelle dédiée, tout ça grâce à Willa. norda, c’est grâce à elle, et c’est de sa faute! »

La plupart des souliers de trail, explique le couple, sont très désagréables à porter sur de l’asphalte ou sur un trottoir. Mais les 001 se rangent dans la catégorie des « road to trail », soit des souliers conçus pour courir sur la route jusqu’au sentier. Puisqu’à Montréal, « si on veut aller courir sur le Mont ou au Canal, il faut d’abord jogger une quinzaine de minutes avant de se rendre à la piste qu’on veut tracer, souligne Nick. On ne peut pas trouver de meilleure ville au monde pour avoir une telle diversité de sentiers pour courir. »

Nouvelle qui fera bondir de joie les hypebeasts et les coureurs et coureuses endurci.e.s, norda lancera en mars une nouvelle collection. La 001 a été remodélisée et repensée par l’équipe. Entre autres, le haut de la chaussure sera désormais fait de matériaux biologiques, durables et recyclés. Des crampons en acier seront incrustés dans le caoutchouc de la semelle, donnant une chance aux coureurs et coureuses d’hiver de ne pas se retrouver sur le derrière après quelques pas sur la glace.

D’autres collaborations seront aussi dévoilées tout au long de l’année, et chaque drop est hautement attendu. Devant tout cet engouement, on pourrait s’imaginer que la compagnie prépare de grandes expansions et des contrats de distribution à l’international. Mais norda reste avant tout une compagnie boutique.

« On n’est que quatre. On a travaillé dans de grosses compagnies, on sait ce que c’est. Mais on veut bien faire les choses. Et si ça veut dire ne faire que trois souliers, on ne fera que trois souliers et on sera content avec ça », conclut Willa.