Mon utérus est en burn-out

Je ne sais pas comment va le tien, ni même si tu en portes un, mais je te jase du mien.

J’ai fait une fausse couche y’a quelques mois et c’était pas une bénédiction du genre “OUFFF! Je savais pas c’était qui l’père, maudite bonne chose de réglée!”. Non, le boutchou était désiré et célébré dès le moment où le bâton de pisse nous a dit “Félicitations!”.

Huit semaines plus tard, le sang nous a annoncé que la fin commençait. On a reçu la confirmation d’la médecin et le jour où j’étais censée entendre un mini cœur battre, c’est le mien et celui de l’amoureux qui ont crevé. Le surlendemain, à 14h00, mon corps expulsait officiellement le sac amniotique et, à 20h00, j’étais sur scène à faire des blagues la serviette pleine de sang.

(Petite parenthèse)

On me demande souvent c’est quoi la différence entre un gars et une fille en humour et sincèrement y’en a pas tant, mais j’connais aucun gars qui a joué avec du sang de fœtus dans ses culottes. Du même coup, j’connais aucune fille qui a joué avec un semi-croquant dans les siennes. À part peut-être Mado Lamothe. À chacun ses combats, I guess.

Ceci dit, gars comme filles, on est une gang à vivre des trucs pas cool qui jettent l’humain à terre, mais on est aussi une gang à aimer tellement la scène qu’on préfère y monter que d’annuler le show. Pendant les minutes où on y est, tout le reste s’efface. La scène, c’est un lieu mystérieux qui nous sort de l’espace-temps, un monde parallèle qui nous permet de mettre notre vie sur pause. Si tu te demandes pourquoi y’a autant d’artistes multipoqués, dis-toi que c’est simplement parce que les poques se taisent quand le micro s’ouvre.

(Fin de la petite parenthèse)

“Ayoye on est beaucoup” que j’ai dit à la doc quand elle m’a fait part des stats. Je savais que ça faisait partie de la vie, mais je ne savais pas que les rues étaient piétinées par une armée de femmes qui ont perdu leur game de grossesse.

Ça m’arrive encore de regarder une femme au hasard me disant que y’a des bonnes chances qu’elle ait porté un fœtus pendant 2 mois à se priver de café, d’alcool, de fromage Brie, d’alcool, de bains chauds, d’alcool… Qu’elle s’est levée plusieurs matins les mamelons sensibles avec le feeling d’être en criss sans même savoir pourquoi, pour ensuite aller vomir “SON PAS D’ALCOOL” dans la bol… Et paf! Un jour, son foetus a dit au revoir sans dire au revoir. Du coup, l’amour qu’elle avait pour lui s’est rangé en douceur dans un tiroir de sa mémoire et elle s’est versé un verre de vin.

Je suis consciente que chaque fausse couche a son histoire et que je projette la mienne sur les visages anonymes que je croise dans la rue. Impossible d’avoir toutes vécues ça de la même façon, y’en partout des “mamanges”. By the way, j’aime pas ça le terme “mamange”. C’est un diminutif de maman d’ange. Un, j’imagine qu’il faut croire aux anges pour que ça t’interpelle, et deux, ça me fait plus rire que d’autre chose parce que ça sonne comme si j’ai mangé mon bébé au lieu de le perdre.

Une fausse couche, ça te scrape pas juste le moral, ça te varlope aussi l’utérus. Pas dans le sens: “Wow ce gars-là m’a varlopé l’utérus c’était chaud!” Plus dans le sens: “À sa dernière pratique, Serena avait pu de balles de tennis pis a varlopé mon utérus dans face à Eugénie!”

Y est décriss mon monsieur U et la cause en est assez simple: Y’a fait sa job d’utérus pour accueillir un fœtus qui n’a pas fait sa job de fœtus. Il s’est ramassé avec des dossiers et des heures supplémentaires et y’a fallu qu’il remette de l’ordre rapido presto dans la cie Reproduction. Là y’a besoin d’un break.

L’avantage c’est qu’un utérus c’est un muscle. Ça se magane comme n’importe quel autre muscle, ce qui veut dire que ça peut se guérir aussi comme n’importe quel autre muscle. C’est juste un peu dur de le frotter avec du A-535, donc j’ai frappé à la porte d’une ostéopathe qui voit mon appareil reproducteur à travers ses doigts de fée et qui lui dit de se calmer les tendons en le coachant pour sa future game de grossesse.

Love, Mama Mel.