Mission tête-de-violon : cueillette responsable et dégustation sécuritaire

Manger des courges et des pommes de terre, c’est terminé : les têtes-de-violon sont arrivées! Ce sont les premiers légumes de saison du Québec à trouver leur place sur les étals des marchés. Au grand dam de mon gourmand bedon, la fenêtre pour les déguster va trop bientôt se refermer. C’est donc le moment ou jamais d’en profiter.

Les têtes-de-violon sont des fougères en début de croissance. Leur petit nom latin est Matteuccia struthiopteris, on les appelle aussi communément fougères-à-l’autruche. Elles poussent dans tout l’hémisphère nord, peu importe le continent. Elles aiment les terrains ombragés et humides : on en trouve souvent dans les érablières ou près des rivières. Elles sont comestibles lorsqu’encore enroulées (et cuites), mais deviennent toxiques une fois déployées.

Depuis 2005, les fougères-à-l’autruche sont considérées comme une espèce vulnérable au Québec. La cueillette et la récolte abusive en sont les principales responsables. Il faut aussi ajouter qu’elles se régénèrent lentement : les plants peuvent prendre jusqu’à quatre ans avant d’arriver à leur maturité. La réglementation actuelle limite uniquement la récolte et la vente de plants de fougères en milieu naturel. Même si la cueillette est autorisée, des précautions s’imposent afin de revoir pousser, printemps après printemps, ce légume dentelé.

D’abord, on ne doit récolter qu’une ou deux têtes-de-violon par plant afin de ne pas l’affaiblir. De plus, il faut prélever les crosses lorsqu’elles sont bien sorties de leur couronne afin d’éviter de blesser le plant. Ainsi, si les jeunes pousses enroulées sont encore dans la couronne, il faudra attendre quelques jours que la tige s’allonge légèrement. Finalement, pour qu’elles conservent leur vigueur, on doit essayer de ne pas récolter chaque année les mêmes talles.

Croyez-le ou non, la Matteuccia struthiopteris est la seule fougère comestible au Québec. Il va sans dire qu’il vaut mieux s’informer avant de partir en expédition. Voici quelques trucs pour la reconnaître :

• Les crosses forment une couronne légèrement surélevée;
• Elles sont recouvertes d’écailles brun doré;

La tige possède un sillon (à l’image d’un céleri);

• On retrouve des tiges brunes et séchées ressemblant à des plumes d’autruche au centre de la couronne, ce sont les frondes fertiles.

Les crosses sont toxiques lorsque mangées crues; il est donc important de les cuire suffisamment. Au restaurant Hélicoptère, le chef David Ollu les rince 30 minutes sous l’eau courante afin de bien les nettoyer, puis il les fait cuire une minute à trois reprises en jetant l’eau salée entre chaque cuisson. Du côté du gouvernement du Canada, on suggère plutôt de retirer les écailles brunes avec nos doigts, de bien les laver sous l’eau, puis de les faire bouillir 15 minutes ou les faire cuire à la vapeur 10-12 minutes.

Lorsqu’on lui demande de décrire le goût, il répond : « C’est très végétal, ça tire sur le vert. On les cuisine avec les mêmes associations de saveurs que les asperges ou les haricots. » Ce printemps, on retrouve les têtes-de-violon sur le menu de l’Hélicoptère avec de l’omble chevalier, des crevettes et un mole verde.

Pour un repas rapide à la maison, il propose de les faire avec des noix et du jus de citron, cuites dans du beurre. Il ajoute qu’elles font un excellent accompagnement au crabe des neiges qui est aussi disponible en ce moment.

Oui, oui, c’est possible! On peut acheter des plants de pépinières ou encore les faire pousser à partir de semences. La culture de fougères exige un sol riche en humus et acide (entre 5 et 6 de pH), mais elles tolèrent l’ombre comme le soleil.

Bonne cueillette!