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Mettre le Saint-Laurent dans notre assiette

Une action gourmande... et écolo! 

Par
Léopold Picot
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Depuis mon arrivée au Québec, je suis assez surpris de ce que je peux trouver en allant faire mes courses dans les épiceries… surtout au rayon poisson.

Avec le fleuve Saint-Laurent qui encadre l’île de Montréal, je m’attendais à avoir des dizaines de produits de la mer pêchés dans le coin. Un peu sur le modèle de ce qui peut se faire sur les villes côtières d’Europe : à Barcelone, tu as tes moules du coin, à Bordeaux tes huîtres, à Lisbonne, ta morue et ton rouget… pour une somme correcte.

Finalement, ce n’est pas tellement le cas : à part quelques crabes, crevettes et homards de prestige du Saint-Laurent dans certaines poissonneries, ce sont majoritairement des poissons type saumon, étiquetés « Atlantique » — plus vague, tu meurs.

Cette problématique, je suis clairement pas le premier à la rencontrer. Mais les choses sont en train de bouger, notamment grâce à un collectif : Mange ton Saint-Laurent. Ses objectifs ? Pousser les Québécois à manger plus de produits du Saint-Laurent, revitaliser l’économie des régions côtières, et découvrir de nouveaux horizons, au-delà du homard et du crabe.

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Changement d’habitudes

D’ailleurs, cette impression de prédominance des crustacés, elle ne vient pas de nulle part, m’informe François L’Italien, directeur adjoint l’Institut de recherche en économie contemporaine et membre du collectif Mange ton Saint-Laurent. « Le crabe, le homard et la crevette sont au cœur de la consommation de produits de la mer des Québécois, comme des Américains. Mais ça, c’est assez récent, ça date des années 90. Auparavant, elles n’étaient pas réellement valorisées. On avait un sac rempli de crabes qu’on vendait 1 $ dans les années 1960 », se remémore-t-il en souriant.

À l’époque, on mangeait surtout des poissons issus des stocks du fond des plans d’eau, et leurs populations se sont écroulées, provoquant une hausse de la consommation de crustacés, qui vivent généralement près des surfaces – ce qui est venu avec une hausse vertigineuse de leurs prix.

Avec la mondialisation on se retrouve désormais au Québec avec des produits de la mer du monde entier, qui ont fait des dizaines de jours de trajet dans des conteneurs réfrigérés.

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Pour tenter d’inverser la tendance, de nombreuses entreprises se lancent. François L’Italien ne manque pas d’exemple : « Il y a l’entreprise Chasse-Marée, installée à Rimouski, il y a aussi Océan de saveur d’Antoine Nicolas, un chasseur d’algues basé à Gaspé ». Alors certes les produits sont un peu plus chers, mais c’est de super qualité, et on peut en manger en moins grandes quantités.

Enjeu écologique

Un chiffre à retenir : 80 % de la production du Saint-Laurent est exportée, principalement aux États-Unis, mais aussi dans des pays asiatiques, pour trouver des débouchés pour nos concombres de mer et nos oursins. La quasi-totalité des poissons et des crustacés sont vendus avant même d’être pêchés, lors de la « Seafood Expo » de Boston, le plus gros marché aux poissons d’Amérique du Nord.

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Une initiative super intéressante tente de faire face à ce monstre : le salon de poisson Fourchette Bleue, qui prend de vitesse celui de Boston en se déroulant quelques semaines avant, pour valoriser les produits du Saint-Laurent auprès des consommateurs individuels, des restaurants et des grandes surfaces au Québec. Cette année, le salon se tient du 19 au 24 février à la Malbaie.

L’intérêt premier de manger des produits de la mer locaux est écologique. Ça permet de mieux retracer la production des produits et de mieux gérer les stocks pour éviter le gaspillage.

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Mais pas que! « On ne connaît pas exactement le bilan carbone de l’exportation de produits marins, on est en train de la calculer. Mais intuitivement, manger plus local aura un impact direct sur les émissions de GES », explique François L’Italien. Sans compter les conséquences pour le tissu économique, avec des entreprises qui se lancent à Rimouski, à Québec, et dans de nombreux ports le long du fleuve.

D’où l’intérêt de se faire plaisir et de manger des produits un peu plus cher, pour l’instant, mais de meilleure qualité et bien plus originaux. Pour vous donner des idées, vous pouvez consulter la liste des produits du Saint-Laurent ici. Oursins, couteaux, mactres de Stimpson, flétans et aiglefins n’attendent que vous!