Match imparfait: quand des amoureux ne s’entendent pas sur l’argent

Vivre d’amour et d’eau fraîche, le rêve? Disons plutôt que les bons comptes font les bons couples. L’argent est une des sources principales de conflits chez les amoureux… Pas étonnant que les clichés pleuvent sur le sujet! On a beau tripper sur l’autre comme c’est pas permis, ça peut gosser d’avoir une douce moitié qui a une approche totalement différente de son compte en banque. Comment faire quand on s’aime, mais qu’on grimace juste à regarder l’autre gérer son budget?

« Mon chum et moi, on ne pourrait pas être plus différents par rapport à l’argent même si on s’entend très bien», confie Camille dès le début de l’entrevue. « J’ai toujours été super économe. J’ai un pas pire coussin depuis que je suis toute petite. Encore plus depuis que je travaille à temps plein! Mon salaire n’est pas top, mais j’économise beaucoup. Même si je viens d’un milieu aisé, l’argent m’a toujours stressée », précise la graphiste de 25 ans. Son chum de 29 ans, qui travaille dans l’industrie du jeu vidéo, est son contraire parfait au niveau financier. « Je l’ai remarqué dès qu’on a commencé à sortir ensemble il y a quatre ans et demi. L’argent n’est juste pas une source de stress pour lui. Genre, zéro. C’est très insécurisant pour moi. »

Des difficultés à payer son loyer à d’innombrables tickets qui s’accumulent, en passant par des dettes d’études payées à la va-comme-je-te-pousse, le chum de Camille n’est effectivement pas du genre à se prendre la tête avec l’argent. « Au début, c’était vraiment difficile de le voir aller. Je ne veux pas faire la maman, mais je suis souvent stressée pour lui. J’ai eu tendance à lui proposer de lui avancer du cash, à lui payer le resto… » Ce qui rendait son chum assez mal à l’aise merci. « Il a toujours été très indépendant et orgueilleux, en refusant par exemple que je lui donne de l’argent. D’un autre côté, il trouve ça parfois hallucinant que je ne me fasse pas plus plaisir vu que j’ai les moyens de le faire! Ça a souvent créé des tensions entre nous. »

La rupture est-elle un passage obligé quand on a une vision de l’argent aussi différente de la personne qui fait battre notre coeur? Pas du tout selon Angela Iermieri, planificatrice financière. LE truc? Ouvrir le dialogue dès que possible, comme pour n’importe quel aspect du couple. « Dès qu’on commence à avoir des dépenses communes, il faut décider comment on va les gérer. En créant un budget commun, on évite beaucoup de conflits! On peut même consulter un conseiller financier ou un notaire, en cas de besoin. Déjà, ça peut être très pertinent de jaser de nos objectifs financiers. Est-ce qu’on veut voyager? Acheter un condo? Éventuellement, avoir des enfants? », ajoute Angela. Et hop, on risque de savoir beaucoup mieux qui on a devant soi… et de repenser à la relation si on réalise qu’on va droit dans un mur.

On n’est pas rendus à jaser kids, mais on aimerait quand même voir le visage de l’être aimé tous les matins (aka habiter ensemble)? Comment faire pour ne pas s’arracher la tête alors que la question de l’argent risque de popper assez souvent merci? « Souvent, les couples vont diviser les dépenses en deux. D’autres vont y aller au prorata selon leurs salaires. Des gens m’ont déjà confié que leur conjoint assume toutes les dépenses, alors qu’ils s’occupent de payer l’épicerie », indique la planificatrice financière. Chaque couple organise bien son portefeuille comme il veut… Mais Angela met une mise en garde. « Il faut s’assurer d’être équitable. Si un acquiert des actifs pendant que l’autre gère les dépenses courantes, ce n’est pas juste. Il ne faut pas que le couple permette à l’un de s’enrichir sur le dos de l’autre. »

C’est loin d’être sexy, mais ça peut être pertinent de signer un contrat de vie commune entre conjoints de fait si on n’est pas très mariage. Dans ce charmant papier, on peut inclure les contributions de chaque conjoint à la vie commune, les biens et les dettes de chacun, la gestion des biens (et des enfants!), le versement d’une pension alimentaire… Name it! « Peu le savent, mais le conjoint de fait n’est pas reconnu en cas de décès, par exemple. C’est certain que c’est délicat d’aborder ces questions, mais c’est l’option la plus responsable. J’ai déjà vu de tristes histoires, comme des femmes travaillant moins qui se retrouvent devant pas grand-chose. »

Pas question pour Camille de se retrouver dans cette situation. Au fil du temps, des solutions se sont dessinées pour son couple. « Je voulais absolument que mon chum ait un emploi stable avant d’emménager avec lui, par exemple. On paie moitié-moitié, on fait des épiceries séparées parce que je mange plus santé, j’économise pour un condo… Si je veux aller dans un resto plus cher, j’y vais avec des amis. Récemment, je suis allée au Mexique avec un de mes amis. Je fais mes trucs! Je suis consciente qu’avoir des enfants éventuellement risque d’ajouter un défi, mais je suis certaine qu’on va trouver une manière de s’entendre. J’ai été élevée dans une famille de femmes indépendantes financièrement. J’imagine que ça m’aide à mieux gérer cet aspect difficile dans ma relation! Et bien sûr, on a chacun notre compte en banque vu qu’on a des vies tellement différentes. »

Parce que non, un compte conjoint n’est pas la seule possibilité. C’est même une voie directe vers les chicanes de couple lorsque les amoureux n’ont pas la même vision de l’argent. Imaginez le shit show possible en cas de séparation… L’indépendance financière peut alors devenir une charmante alliée si l’amour tourne au vinaigre. « Si on souhaite avoir un compte conjoint pour les dépenses communes, je conseille à chacun de garder leur compte personnel! On n’a pas toujours envie que l’autre ait accès à toutes nos dépenses », ajoute Angela Iermieri en riant.

Malgré ces petits (OK, gros) accros par rapport à l’argent, Camille et son amoureux sont loin d’être sur le point de se quitter. Au contraire, ils sont même in love par-dessus la tête. « On est très fusionnels, comme des meilleurs amis! On est devenus très compréhensifs envers l’autre. Quand je panique sur sa manière de s’occuper de son argent, je me dis que ce n’est pas le mien! On s’explique, on communique. Surtout, on respecte l’autre dans ses choix. »

Et si c’était ça la clé, dans toutes les facettes du couple?