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Les biscuits de lactation : arnaque ou miracle ?

S’il y avait une solution magique pour booster sa production de lait, ça se saurait.

Par
Caroline Décoste
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En mai dernier, un panneau publicitaire à Times Square a été temporairement retiré, possiblement en raison de plaintes, parce qu’il montrait… une femme enceinte qui tenait des biscuits devant ses mamelons (par-dessus un soutien-gorge en strass, en plus). La pub était de la compagnie Swehl, spécialisée en accessoires pour l’allaitement, et la femme n’était nulle autre que Molly Baz, cuisinière superstar et reine autoproclamée de la salade César. Bien sûr que le fait de retirer une publicité parce qu’on y voit le ventre proéminent d’une personne enceinte est aberrant.

[Insérez ici une longue tirade sur les doubles standards des femmes en bikini et des hommes torse nu en bobettes à Times Square versus un ventre de femme enceinte.]

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Mais les biscuits tenus par Molly, sous le slogan Just add milk, ne sont pas innocents, non plus.

Jeux de mots douteux et promesses miracles

Aux États-Unis et de plus en plus ici, les biscuits de lactation ont la cote. Les recettes en ligne abondent et plusieurs marques, toujours avec un nom qui inclut un jeu de mots un peu « toton », se disputent un marché lucratif. Milkin’ More, Milkmaker, Booby Boons, Pinky’s Boobie Bikkies et Bessie’s Best (avec, oui, un logo de vache) promettent tous la même chose : augmenter la production de lait chez la personne allaitante.

Ces biscuits ont aussi les mêmes ingrédients de base : de l’avoine, des graines de lin, et parfois de la levure de bière et du curcuma, tout comme la recette des Big Titty Cookies de Molly Baz. On appelle ces ingrédients des aliments galactogènes, ou des galactogues (sortez votre cours de grec ancien γάλα, « lait », γεννᾶν, « engendrer »), car ils sont utilisés traditionnellement dans de nombreuses cultures pour les vertus lactogènes qu’on leur prête.

Des bouchées d’avoine et pépites de chocolat vendues 30$ le sac peuvent-elles aider à produire plus de lait? Ça va prendre une réponse de spécialiste (alors non, je ne vais pas aller dans un groupe Facebook de jeunes parents pour poser la question).

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Aussi, ce n’est pas parce que j’ai moi-même allaité longtemps mes deux filles et que je suis marraine d’allaitement que je me considère comme une source fiable. Je me suis donc tournée vers Stéphanie Deschênes, consultante en lactation certifiée IBCLC et ma référence chez Allaitement Québec.

L’allégorie du gym

Stéphanie commence d’entrée de jeu en disant qu’il n’y a « rien de mieux que de mettre bébé au sein ou d’avoir une stimulation efficace au sein avec un tire-lait ». Surtout parce que les premiers mois, la production de lait est liée au principe d’offre et de demande : plus on stimule le sein, plus on sécrète d’hormones qui envoient le message au corps de produire du lait. De même, plus on espace les mises au sein, plus on fait chuter le taux de prolactine dans le sang, ce qui [tout le monde en chœur]… fait chuter la production.

« J’aime donner l’analogie de l’entraînement : mettons que je veux faire un marathon, mais que j’aime pas aller au gym, je peux prendre des suppléments. Est-ce que ça va donner les mêmes résultats que quelqu’un qui s’entraîne? Non. Est-ce que ça va nuire? Non plus. Au final, y a rien de mieux que l’entraînement. Moi, si je mange des biscuits, est-ce que je vais couler des seins? Ben non! » Stéphanie rigole, mais elle ne juge pas les parents qui sont tentés par ce genre de produits.

« Il y a un aspect marketing, c’est certain : les gens veulent la pilule magique. Si la maman me dit que ses biscuits marchent et qu’elle produit plus de lait parce qu’elle mange bien, qu’elle est détendue en les mangeant et que ça stimule sa production d’ocytocine, c’est sans doute dû à l’effet placebo, mais ça ne dérange pas! »

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Récemment, une étude s’est penchée sur le fameux biscuit de lactation. Sa conclusion? Il ne semble pas y avoir d’effet discernable sur la production de lait, perçue par les parents ou mesurée. Ainsi, s’il n’y a pas d’impact négatif (à part un bon trou dans le budget grignotines), les impacts positifs ne sont pas non plus au rendez-vous.

Donc… ça ne nuit pas, de manger des biscuits en allaitant, surtout si on les trouve bons, sauf que ça ne va pas propulser notre lactation dans le plafond. Ah! et c’est encore mieux si on les paie pas une fortune. Ou si quelqu’un de ben smatte nous en fait une batch maison!