Le retour du Y2K

On pensait avoir enterré le Y2K quelque part entre un concert de Mixmania et les cheveux blonds platine de Marie-Mai. Il y a dix ans, on riait même des outfits de tapis rouge des années 2000 : robe portée par-dessus des jeans évasés, kitten heels en plastique, casquette gavroche et foulard beaucoup trop mince.

Pourtant, en 2025, le Y2K est partout, de votre feed Instagram aux magasins vintage, en passant par le Urban Outfitters, et surtout, dans la garde-robe des Gen Z et des Alpha, qui n’ont pas connu 2001, mais qui s’habillent comme s’ils sortaient tout droit d’un épisode de Lizzie McGuire.

La mode des années 2000, c’est un gros parapluie sous lequel on retrouve plusieurs esthétiques différentes : grunge, streetwear, cyber, etc. On peut aussi penser à des icônes de style comme Destiny’s Child, Christina Aguilera, Eminem, Justin Timberlake et Britney Spears (oui, je parle ici du fameux matching outfit en denim). Perso, c’est le garde-robe de Hannah Montana qui occupait tous mes rêves d’enfance.

Y2K signifie littéralement « year 2000 » (année 2000) et la mode de l’époque reflétait ce contexte : l’optimisme des débuts d’Internet avec une touche de rétrofuturisme. Ça se traduisait à travers des couleurs flamboyantes, du chrome, du transparent, du métallique et une exubérance vestimentaire.

C’était audacieux, éclectique et parfois un peu trash. Le parfait exemple : un jean taille basse avec un string qui dépasse, ou encore, le tracksuit de velours rose à la Paris Hilton.

Les éléments phares? Mini-jupes, capris, bandanas, pantalons cargo, jerseys de sport. Le tout accompagné d’une logomania, avec des vêtements étampés de noms comme Juicy Couture, Ed Hardy, Ecko ou Von Dutch.

Le Y2K de 2025 n’est toutefois pas une reproduction fidèle des années 2000. C’est plutôt un remix de toutes ces esthétiques, adaptées aux tendances d’aujourd’hui.

Pour Mariana Riberio, copropriétaire du Club 777, une boutique vintage qui s’inspire des années 2000, il est assez facile de reconnaître les vêtements Y2K d’aujourd’hui aux morceaux originaux des années 2000, notamment grâce aux marques et à la qualité des matériaux. Mais surtout, le Y2K a été réinventé à la sauce du jour.

« La partie inconfortable des années 2000, on l’a laissée de côté », dit-elle. Aller à l’école en talons hauts ou porter des pantalons à la taille si basse qu’on ne peut pas se pencher, on a laissé ça en 2003. Comme on l’a appris des frosted tips de Justin Timberlake, les goûts de l’époque sont à prendre et à laisser.

Dans l’esthétique Y2K d’aujourd’hui, on a plutôt gardé le bling, le camouflage, les gros logos, les vêtements baggy et l’esprit trash-chic assumé.

On dit que les tendances de la mode reviennent tous les 20 ans. Mathématiquement, le retour du Y2K était inévitable, allant même jusqu’à s’intégrer à la haute couture.

Pour Mariana, la mode Y2K apporte un nouveau souffle à celle des dernières années, plutôt réservée, minimaliste et monotone. « Dans les années 2000, on voulait se démarquer autant que possible », dit-elle. Chez les clients du Club 777, qui ont majoritairement entre 15 et 30 ans, c’est ce qui compte quand ils s’habillent.

Le côté bold et excentrique de Y2K permet donc à ces jeunes d’exprimer leur individualité et d’explorer leur identité.

Le retour de la mode des années 2000 s’inscrit aussi dans un sentiment de nostalgie plus large, le même qui ramène les caméras digitales ou la musique throwback. Selon Katharina Nieymayer, professeure à l’École des médias de l’UQAM, les réseaux sociaux amplifient ce sentiment. « On souhaite un temps moins connecté », explique-t-elle au sujet du retour des tendances des années 2000.

Avec la mode Y2K, les Gen Z et Alpha peuvent s’approprier cette époque qu’ils n’ont pas vécue, en l’imaginant et la recréant à leur manière. Comme un terrain de jeu créatif, le Y2K d’aujourd’hui est une esthétique hybride, entre nostalgie et nouveauté.

Mais cette nostalgie est aussi devenue un produit, rappelle Katharina Nieymayer. En une seule recherche « crop top Y2K » sur Shein, plus de 5 000 résultats apparaissent en une fraction de seconde. Si l’industrie de la fast-fashion génère deux milliards de dollars US par an, la mode inspirée des années 2000 est une mine d’or à exploiter.

Est-ce que le Y2K est là pour rester? Comme toutes les tendances de mode qui vont et viennent, la popularité du Y2K ne sera sûrement pas éternelle. Mais pour l’instant, on peut bien profiter de l’occasion de baigner dans la nostalgie du passé, de recycler des pièces et de réinventer les époques.

Et, surtout, faudrait commencer à préparer le prochain cycle. Parce que si le Y2K est revenu, c’est l’heure d’aller fouiller dans le sous-sol de chez nos parents pour nos vieux chandails à moustache et nos leggings galaxy print… Eh oui, ça sera bientôt à l’esthétique Tumblr de 2014 à se pointer le bout du nez.