Pour son deuxième accouchement, Florence ne voulait pas d’une chambre stérile et lumineuse. Elle voulait une expérience intime, loin des interruptions et des vérifications. C’est ce qu’elle avait prévu, et c’est ce qu’elle a fait.
Ce que Florence désirait, c’est une expérience vécue par de nombreuses femmes et qui s’appelle le « freebirthing », soit accoucher sans soutien autre que celui d’un proche.
Le nombre de femmes qui accouchent sans assistance médicale est relativement bas. Au Canada, on estime qu’environ 5 000 femmes issues de milieux ruraux font ce choix chaque année. La tendance est présente et les groupes de soutien se multiplient sur les réseaux sociaux. Le point commun de ses membres : elles cherchent toutes à éviter la stérilité ou la perte de contrôle souvent associé avec les hôpitaux.
« Sincèrement, tout a été beaucoup plus doux, calme et rapide qu’à mon premier accouchement, à l’hôpital. Je crois qu’un accouchement est un grand moment de vulnérabilité, pour les femmes, et qu’on perd un peu nos superpouvoirs en s’abandonnant au système de santé. »
« Contrairement à mon premier accouchement à l’hôpital, lorsque j’étais constamment interrompue par les infirmières, où les lumières étaient très fortes et la climatisation trop froide, j’arrivais à mieux me concentrer sur moi, mon corps et mon bébé », raconte Florence, qui habite en République dominicaine depuis maintenant 10 ans.
Son deuxième accouchement s’est déroulé dans un hôtel, situé à environ 5 minutes de l’hôpital, afin de pouvoir facilement s’y rendre en cas de problème.
Pour l’événement, Florence et son conjoint s’étaient préparés : serviettes, couvertures, sacs en plastique, etc. Mais ils ont oublié un détail important : les ciseaux pour couper le cordon, qu’ils ont dû emprunter au personnel de l’hôtel.
À 41 semaines et 6 jours, son petit Oscar est né sous la douche, entouré de ses deux parents et de chandelles. Une expérience idyllique, selon Florence.
L’expérience de Florence fut très positive, et c’est aussi comme ça que les accouchements sont représentés dans les groupes de freebirthing. La réalité, cependant, est beaucoup plus nuancée.
Des risques sérieux
Accoucher seule ou avec un partenaire non qualifié pose de sérieux risques pour la vie du bébé et celle de la mère. Les risques de mort du bébé après la naissance sont de deux à trois fois plus élevés lors d’un accouchement sans assistance. Quant à la mère, les dangers qui se présentent à elle sont loin d’être négligeables : éclampsie, hémorragie, infection.
Les critiques envers le mouvement tendent à rappeler que depuis que les accouchements se passent davantage en milieu hospitalier, les risques de mort du bébé ont diminué de 90%, et ceux de la mère, de 99%.
Le freebirthing comporte aussi un autre risque non négligeable, soit celui de poursuites criminelles. Au Canada, il n’est pas illégal de donner naissance en dehors d’un milieu hospitalier. Cependant, la mère et/ou les personnes qui assistent à l’accouchement peuvent faire face à des accusations criminelles s’ils ne fournissent pas de secours à une personne en danger, en plus de potentiellement s’exposer à des poursuites pour pratique illégale de la médecine.
Sur les groupes Facebook, ces risques sont négligés et souvent ignorés. En fait, plusieurs femmes ont évoqué avoir été bannies de ces cercles lorsque leur expérience s’est avérée moins positive que prévu.
« Je ne recommanderais pas le freebirth à quelqu’un qui accouche pour la première fois », ajoute Florence. Il faut dire que la première naissance est souvent plus risquée, le risque de transfert à l’hôpital des maisons de naissance étant alors plus élevé. En effet, 16 à 18% des accouchements prévus en maison de naissance se terminent par un transfert à l’hôpital.
Une deuxième naissance a aussi l’avantage que la mère se trouve plus en terrain connu et risque moins d’être envahie par la peur.
La montée en popularité du freebirth démontre le besoin criant des mères pour des accouchements moins cliniques, plus doux et plus humains. Ceci dit, même si l’expérience d’un accouchement dans le confort de la maison peut paraître attirante, il me semble qu’un juste milieu s’impose. En militant pour des soins plus sensibles en maisons de naissance ou dans les hôpitaux, les familles pourraient vivre un accouchement axé tant sur leurs besoins et ceux de leur futur enfant.