Si vous avez déjà eu à vous occuper d’un enfant, vous savez sans doute que la plupart des émissions jeunesse peuvent être insoutenables si on a dépassé la barre des 10 ans. Il y a de bonnes raisons pour les dialogues un peu débiles et la prévisibilité des histoires, mais c’est quand même un peu plus le fun quand les créateurs et créatrices pensent aussi aux adultes qui vont devoir regarder l’émission avec les petit.e.s.
C’est ce qui explique en partie le succès de la série de livres jeunesse Le facteur de l’espace, de l’auteur et illustrateur Guillaume Perreault, et dont l’adaptation en série télé vient d’être diffusée.
L’année 2022 n’aura pas été de tout repos pour Perreault. En plus d’avoir remporté le Prix des libraires du Québec, catégorie Jeunesse, avec ses illustrations pour La soupe aux allumettes, écrit par Patrice Michaud, il a publié le troisième tome des aventures de Bob, Le Facteur de l’espace, sa série à succès traduite en huit langues dans dix pays.
À l’occasion de la sortie de l’émission, on a jasé avec lui de sa transition vers le métier de réalisateur, et des possibilités infinies qu’offre une série dans l’espace.
Pour la première fois, tu adaptes un de tes livres en émission. Comment as-tu trouvé l’expérience?
C’est ma première expérience en tant que réalisateur. Les livres, ça me connaît, mais les séries d’animation, les films et tout ça, c’est un peu inconnu pour moi. Je crois que du moment où on a commencé à en parler au moment où ça s’est concrétisé, il y a eu environ trois ans qui se sont écoulés.
Mais le gros du projet, créer l’animation avec les comédiens, la musique et tout ça, c’est dans la dernière année que ça s’est fait. Ç’a été une grosse année de travail.
Comment fait-on une série pour enfants qui plaît aussi aux parents?
On s’entend qu’il y a beaucoup de séries pour enfants qui font rouler les yeux des parents quand ça part à la télé. Donc on voulait avoir une série qui était plaisante, drôle ou, du moins, pas gênante pour les parents à regarder avec leurs enfants.
«Je crois que j’ai choisi le facteur parce que j’ai une attirance envers les métiers «traditionnels», Je trouve que c’est des métiers nobles et super intéressants.»
Mais le livre se veut la même chose aussi! À ma grande surprise, bien que la série ait été conçue pour la jeunesse, il y a beaucoup d’adultes qui la lisent et qui aiment ça. Il y a une bonne portion de gens qui la consomment comme si c’était destiné à leur âge. Et c’est vrai que pour la série télé, on a gardé les parents en tête.
D’où vient l’idée d’une série dans l’espace qui n’est pas hyperfuturiste?
Avec la série, je dirais qu’on voulait faire quelque chose de plus comique, se plonger un peu dans le rétrofuturisme et la nostalgie. On veut vraiment jouer avec ce côté-là. Comme ça se passe dans l’espace, il y a souvent des moments de grandeur. C’est de beaux décors, c’est l’espace, vaste et gros. Mais ce qu’on a voulu faire, c’est pousser le côté nostalgique.
Même au niveau de la musique, on s’est inspiré des codes des années 80, il y a une influence sur l’esthétique. On s’est vraiment amusé à aller puiser dans le côté rétrofuturiste.
Ce qui m’a toujours un peu dérangé avec des séries comme Star Trek, c’est que dans le futur, tout est clean, tout est blanc et parfait, les appareils sont très futuristes. À part le fait qu’il y a des humains, on peut pas s’attacher à grand-chose là-dedans.
«On s’entend qu’il y a beaucoup de séries pour enfants qui font rouler les yeux des parents quand ça part à la télé.»
Ce que j’aime dans ce que j’ai créé et qui me tient à cœur, c’est qu’il y a quelque chose d’un peu inédit. On est dans la science-fiction, l’espace, les robots, les milieux inconnus et incongrus. Mais, autant pour les parents que les enfants, on garde une touche de commun. Bob a quand même un calepin et un crayon, son vaisseau est fait avec de la tôle raboutée au marteau. Il y a quand même des plantes en décoration, et on s’entend que dans Star Trek, tu ne vois jamais une plante sur le vaisseau. Il y a de gros écrans cathodiques plutôt que des hologrammes. Donc, c’est de garder un côté familier et terre-à-terre, malgré les scénarios invraisemblables.
Bob a aussi maintenant droit à une nouvelle acolyte, Odile…
Oui, c’est un personnage que j’ai très hâte d’introduire dans les livres, parce que c’est sûr que ça va finir par s’entremêler, ces deux univers-là.
Odile, c’est une mécanicienne-pilote-factrice qui accompagne Bob dans ses aventures. C’est un genre d’antipode, c’est vraiment le contraire de Bob, qui est une personne réfléchie, qui est craintif, peureux, routinier. Odile, c’est tout le contraire, et on l’a créée pour vraiment shaker Bob. Elle est fonceuse, plus énergétique, moins réfléchie au niveau de ses actions. Elle a des solutions à tout : même si ce ne sont pas toujours les bonnes, au moins, elle agit. Il fallait challenger Bob dans ses habitudes, même si elle a aussi ses propres problèmes. C’est un personnage que les gens vont bien apprécier.
Pourquoi un facteur? Qu’est-ce qui t’intéresse dans cette job-là : le sens de l’aventure ou du devoir?
Je crois que j’ai choisi le facteur parce que j’ai une attirance envers les métiers « traditionnels », comme cordonnier, boulanger, etc. Je trouve que c’est des métiers nobles et super intéressants.
Un facteur, c’était parfait pour le côté science-fiction, parce que mon but, c’était pas de créer une série jeunesse avec les clichés du genre combattre le mal, sauver l’univers. Je voulais qu’on puisse explorer et avoir de l’aventure, et facteur, c’était parfait parce que ça permet de visiter différents endroits. Et, sans qu’on fasse exprès, on tombe dans l’aventure.
Le facteur, sur Terre, il doit affronter les intempéries, les chiens parfois, il y a des colis un peu massifs. Donc je me suis dit :je vais juste prendre ces défis-là, super banals pour un facteur ici en 2022. Mais qu’est-ce qui arrive si on transpose ça dans la science-fiction et qu’on crinque ça à 11 pour voir ce que ça donne?
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La série Le facteur de l’espace est co-produite par URBANIA et La Pastèque et est disponible sur ICI TOU.TV